Société civile ou scène politique ?

Một phần của tài liệu Acteurs locaux et régionaux face aux transformations du pouvoir en russie, 1989 1999 (Trang 179 - 188)

CHAPITRE II A la recherche du politique : des mouvements informels au renouveau

II. L’émergence des mouvements démocratiques indépendants : l’état de grâce de la démocratie locale ?

II.3. Société civile ou scène politique ?

L’apparition des mouvements informels puis de courants d’opposition plus politiques a conduit à s’interroger sur la formation, l’émergence, le développement d’une société civile, qui constituerait une sorte de baromètre ou d’instrument de mesure de l’état de la démocratisation. Il faut, pour mieux comprendre ce qui est dit à propos de la perestrọka, revenir aux débats qui marquent cette période, et dont les événements en Union Soviétique semblent n’être qu’un avatar assez lointain, qui viendrait presque gêner l’analyse. En effet, les débats autour de la société civile sont souvent centrés soit sur l’ộvolution des ô nouveaux mouvements sociaux ằ dans le monde occidental, soit encore plus sur les mouvements qui agitent l’Europe centrale. Ainsi, de ces expériences de terrain, s’élabore une nouvelle théorie, une nouvelle réflexion sur la société civile (Arato, 1991, Arato & Cohen, 1993). Sa ô marque de fabrique ằ en quelque sorte ộtant son altérité radicale vis-à-vis de l’État et des institutions, les processus de transformation qui ont cours en Union soviétique à la même période risquent fort de ne

212 O. Glebov la présidait toujours au milieu des années 1990.

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pas rentrer dans le cadre dans la mesure justement ó les évolutions impulsées d’en-haut par le pouvoir sont fondamentales. Des spécialistes de l’Union soviétique vont alors tenter de résoudre ce problème théorique en élargissant la notion de société civile. C’est le cas par exemple de Moshe Lewin, qui opère un déplacement et intègre les éléments initiateurs en provenance de l’intérieur des institutions dans son analyse des changements (Lewin, 1988). Ce raisonnement rejoint les réflexions autour de la participation au sein du système soviétique (cf. supra et chap. I) et que les situations concrètes vécues par les acteurs sur nos terrains permettent en partie de valider.

D’autres, au contraire, cherchant à intégrer la signification des transformations en cours en Union soviộtique au modốle est-europộen de la ô sociộtộ contre l’ẫtat ằ ou de l’antipolitique213, ont cherché à présenter la perestrọka comme la progression d’un rapport de forces entre des mouvements issus de la société et un régime à bout de souffle qui espère se maintenir en se réformant. Enfin, certains considèrent que la sociộtộ civile comme ô sphốre autonome de l’auto-organisation politique, syndicale, associative de la sociộtộ ằ n’existe pas plus dans la Russie post-soviộtique qu’elle n’a existé dans la phase précédant l’effondrement du communisme et qu’on a accordé plus d’influence aux mouvements de cette période (Colas, 2002, p.50).

Dès le début de la période Gorbatchev, la question se pose dans la mesure ó l’existence de dynamiques sociales n’est pas équivalente au processus de formation d’une société civile (Starr, 1988). Quelques soviétologues ont néanmoins repris cette notion pour décrire le processus des années Gorbatchev, considérant le concept suffisamment flou pour ne pas être inapplicable à l’Union soviétique de la fin des années 80 : ainsi, une définition qui conserve l’idée de séparation stricte des sphères de l’État et de la société mais qui retient l’idée de réseau d’institutions et d’organisations dans lesquelles des individus sont auto-organisés et engagés dans des activités non étatiques, économiques, bénévoles… qui font pression sur les institutions étatiques214 peut permettre de rendre compte partiellement des processus en cours, car elle insiste sur la dynamique, sur le caractère agissant de la société civile, plutôt que sur un état de société civile, (entre la

213 Concept mis à l’honneur par des intellectuels dissidents d’Europe centrale pendant les années 1970 et 1980, et titre d’un ouvrage du philosophe hongrois Georgyi Konrad, l’antipolitique se situe par rapport à un ẫtat perỗu comme tout puissant et totalitaire, comme une sphốre autonome, de pensộe d’abord, mais aussi de débat et d’action, proche du concept de société civile telle qu’il sera notamment développé au début des années 1990 à partir de l’exemple de l’Europe Centrale (Arato, Cohen…).

214 C’est par exemple la définition que propose J. Keane (dans Democracy and civil society, 1998) reprise par Steven Fish dans Democracy from scratch… (Fish, 1995).

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sphère privée et l’État) et la positionne dans son rapport à l’État. Les mouvements politiques nés pendant la perestrọka peuvent être alors confrontés à un certain nombre de critères, ideal-typiques bien entendu, pour autant qu’il n’existe pas de société civile pure et parfaite dans le monde réel. Steven Fish, qui a étudié en profondeur les mobilisations et les mouvements démocratiques en Russie à la fin des années 80, examine à la lumiốre d’un certain nombre de critốres la ô civile-sociộtude ằ des associations indépendantes qui ont vu le jour en Russie : l’agrégation des intérêts est le premier élément, la définition et la hiérarchisation des objectifs et des intérêts se font à partir d’une capacité à formuler les enjeux, les lignes de clivages et de conflits face auxquels va se construire tel ou tel groupe tout en construisant une identité collective (Fish, 1995, 53). Le second élément de critère, celui de la représentation des intérêts touche plus à la capacité de structuration interne des mouvements et groupes, avec l’objectif d’une entrée, d’une projection sur la scène publique : ceci constitue le troisième moment, celui de l’articulation des intérêts, de leur transformation en demandes politiques concrètes. Enfin, la capacité d’autonomie de ces mouvements vis à vis des acteurs étatiques est un élément important à prendre en compte.

En Russie, le débat sur la société civile, s’il reprend à son compte en partie le débat des sciences sociales américaines et européennes et les débats entre écoles de pensée autour de la notion, s’est cependant construit aussi selon des axes marqués par l’histoire du pays (Le Huérou & Rousselet, 1999). Tel est par exemple le cas de l’obchtchestvennost’, un terme populaire au XIXème siècle, que le sociologue Vadim Volkov propose de réhabiliter. Le débat russe autour du terme de civil society n’a pas fait l’objet selon lui d’une traduction et d’une appropriation théorique, et s’est retrouvé en quelque sorte projeté en Russie en restant prisonnier de son contexte théorique originel. Ceci est vrai également des auteurs qui se sont appuyés sur l’expérience des régimes communistes pour penser la société civile comme auto-organisation de la société face à l’État (Arato & Cohen, Molnar…). L’obchtchestvennost’ est un terme qui peut se lire à deux niveaux, l’un plus abstrait autour de la notion de solidarité et qui renvoie au lien social de manière générale, l’autre plus concret et qui désigne l’activité civique sous ses diverses formes (Volkov, 1997), qu’il s’agisse des manifestations

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naissantes de l’opinion publique ou des débats permis par l’émergence de médias pluralistes215.

Autre caractéristique du débat russe sur la société civile, la notion d’auto-administration locale qui prend elle aussi appui sur des pratiques pré-soviétiques, notamment celle du zemstvo. Alors que les échelons du pouvoir local se réorganisent, l’auto-administration locale, est théorisée comme un niveau distinct des rouages verticaux du pouvoir d’État et un maillon essentiel de la souveraineté, sa mise en place étant appelée comme un indicateur de la dé-totalitarisation de la société russe post-soviétique (Nikiforov, 1997;

Borisov, 1997).

La vision d’une société civile en partenariat avec l’État est développée dès cette période, notamment en province à travers la notion de partenariat social (sotsia’noe partnerstvo).

Les administrations régionales cherchent souvent à déléguer une partie de leurs fonctions, notamment sociales, à des structures issues d’initiatives de la société, supposộes plus efficientes. Cette ô dộlộgation ằ se comprend cependant avec le maintien d’un contrôle fort des administrations sur les activités de ces associations.

Le débat russe sur la société civile est également informé par le passé soviétique et la vision du système développée par ceux qui l’ont contesté de l’intérieur. Les dissidents font du régime soviétique une lecture totalitaire, même s’ils en admettent la

ô mollesse ằ pour la derniốre pộriode. Ils se perỗoivent et perỗoivent leur action en rupture totale avec le rộgime et ne peuvent reconnaợtre la filiation entre les formes de participation politique proposées par le système soviétique et les activités des mouvements civiques qui se développent dans le sillage de la perestrọka (Daucé, 2006).

Pour la Russie, il semble plus pertinent de parler d’affaiblissement de l’État lié au processus de réformes économiques comme résultat d’un choix conscient des auteurs de cette politique, plus que d’une consộquence ô naturelle ằ de la disparition du systốme soviétique. Cet affaiblissement a constitué une condition positive à l’émergence d’une société civile dans la mesure ó les partis indépendants, associations, médias se sont nourris de ce desserrement progressif du contrôle d’en haut. Mais la situation d’État

215 Des éléments qui tirent le terme d’obchtchestvennost’ vers la notion d’espace public.

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faible a produit des contraintes telles en termes de crise sociale, corruption, dysfonctionnements administratifs, abus de pouvoir qu’elle a fait en même temps obstacle à son développement. Un couple État fort / société civile forte peut fonctionner à la condition que la restauration de l’État fort ne se fasse pas contre la société civile (Squier, 2002). Ce raisonnement nous semble cependant quelque peu paradoxal car si l’ẫtat est plus fort et se met en quelque sorte à ô faire son travail ằ, qu’advient-il d’une société civile qui semble dans cette acception exister soit pour le pousser à le faire soit pour le faire à sa place ? On se rapproche plus alors de l’hypothèse couramment développée dans les analyses russes critiques, qui font des ONG un outil stratégique de l’affaiblissement de l’État et de la souveraineté, éventuellement au service d’influences extérieures216. En ce cas, État et société civile s’affrontent, l’affaiblissement de l’un renforỗant l’autre et vice versa. Ces visions antagoniques procốdent d’une mộmoire historique construite différemment dans son rapport à l’État. Pour la pensée politique américaine / libérale, peu d’État est synonyme de garantie contre la tyrannie et la société civile se pose en garde fou permanent face aux tentations de l’ẫtat d’accroợtre ses prérogatives. La pensée politique russe voit beaucoup plus souvent dans l’affaiblissement de l’État un risque fort d’instabilité voire d’anarchie, une vision que vont alimenter à l’orée des années 1990 la disparition de l’URSS et les réformes ộconomiques. En allant plus loin, c’est l’ensemble de la ô sociộtộ non ộtatique ằ qui est un danger pour l’ẫtat et l’identitộ nationale, alors que l’ẫtat est perỗu comme une institution positive, fonctionnelle et non destructive pour la société.

Dans la Russie des annộes Eltsine, ce n’est pas tant un ô trop-plein ằ de sociộtộ civile qui a affaibli l’État, mais au contraire le comportement de l’État qui a provoqué son propre affaiblissement en ne laissant pas exister, ou très insuffisamment, un système de partis indépendants et une compétition électorale libre, des médias pluralistes ou bien encore un ensemble d’organisations sociales représentant les intérêts des différents groupes sociaux, notamment ceux qui avaient payé le prix le plus lourd des réformes.

En résumé, le modèle étatiste a peu servi l’État mais l’a plutôt affaibli. Quant à l’opinion, les enquêtes peuvent donner des résultats contradictoires sur la question de

216 C’est à partir du début des années 2000 que s’est surtout développée cette approche critique, portée par certains intellectuels mais surtout par le discours de l’État, comme en témoignent les très nombreuses attaques en direction des ONG et associations.

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l’ordre privilégié, sur la démocratie ou les institutions de la société civile, et surtout, les institutions étatiques ne font pas l’objet de plus de confiance.

On peut considérer que dans la mesure ó les mouvements démocratiques avaient élaboré assez rapidement pour objectif un véritable changement institutionnel, c’était en premier lieu l’État qu’ils visaient explicitement. Tout en étant bien sûr favorables à l’existence d’une société civile pour pérenniser le nouveau système politique, elle constituait pas le cœur de leurs mobilisations, à la différence de Solidarnosc en Pologne ou d’autres groupes d’Europe centrale dont l’objectif était de conquérir l’espace public et de faire reculer les frontières de l’emprise étatique au profit de la société (Fish, 1995).

Si c’est dans le choix de privilégier l’État et les institutions que se situe la spécificité de ces mouvements, alors le lien est fait avec l’analyse générale qui fait du changement politique de la perestrọka une révolution par le haut. Cependant le choix fait d’étudier les formations qui sont le plus orientées vers cette activité, les partis politiques, pose le problème de savoir s’il est possible de parler de société civile à partir de l’exemple des partis politiques, même dans un contexte d’émergence, en phase de démocratisation.

Pourrait-on alors trouver un modèle alternatif à celui de la société civile pour décrire ces groupes ? Ceci amène à s’interroger sur le caractère civil, sociétal, ou bien politique des processus de mouvement observés : s’en tenir aux théories de la démocratisation telles qu’elles ont été développées pour l’Amérique latine ou l’Europe du sud suppose comme préalable au processus de développement d’une société civile une différenciation, c’est à dire la préexistence d’autres institutions démocratiques comme les institutions représentatives ou des élections libres qui vont favoriser l’implantation de la société civile. Or, tout dans l’observation des situations concrètes en Russie porte à penser que l’on se trouve dans un champ largement indifférencié, ó ce sont les mouvements qui forment les prémices de la société civile qui doivent remplir les fonctions des institutions politiques, dans un système ó par ailleurs, ces institutions politiques existent au moins formellement et ó certains de leurs éléments veulent eux-mêmes rentrer dans la logique de la démocratisation. Steven Fish avance l’argument selon lequel la particularité des mouvements sociaux de la perestrọka est qu’ils réunissent dans la même temporalité les différentes phases classiquement déclinées pour les mouvements sociaux dans les pays occidentaux : droits civils et libertés politiques dans un premier temps ; centralité de la question du travail, de la production et de la

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redistribution des richesses caractéristiques de la société industrielle ; nouveaux mouvements sociaux construits sur les valeurs et les enjeux de la société post- industrielle (Fish, 1995, 62). Le caractère unique de l’expérience soviétique explique cette particularitộ. L’absence de libertộs politiques est conjuguộe à un ô gel ằ de la question sociale par un régime qui revendique son règlement définitif tandis que la sociộtộ soviộtique connaợt une modernisation de fait qui autorise l’ộmergence de revendications caractéristiques de la société post-industrielle.

Ces mouvements contiennent ou ont contenu pour ceux qui les ont observés une forte charge symbolique, pour différentes raisons qui tiennent autant aux évolutions du discours académique qu’aux projections et identifications à distance de chercheurs et d’intellectuels à la recherche d’un nouveau modèle de mouvements sociaux et de société civile. A ce titre, l’ouvrage théorique sur la société civile de J. Cohen et A.

Arato est emblématique. De la même manière que la soviétologie avait pu, sans doute encore plus en France que dans le monde anglo-saxon, mettre un fort contenu idéologique et critique dans son étude de la vie politique soviétique, de même les années de perestrọka laissaient libre cours à des discours et des interprétations qui semblent donner raison aux ô rộvisionnistes ằ : la sociộtộ soviộtique ô en mouvement ằ (Chauvier, 1990) ou en ô mutation ằ (Lewin, 1989), aurait donc prouvộ qu’elle ộtait

ô transformable ằ.

CONCLUSION

A la veille des événements d’aỏt 1991, une dynamique politique certaine s’est installée à tous les niveaux du pouvoir et singulièrement dans la vie locale, les processus politiques institutionnalisés ont pris le pas sur les processus informels des premières années, mais globalement de larges segments de la société apparaissent mobilisés, politisés et organisés. En témoignent aussi l’engagement des mouvements informels locaux dans des actions et revendications à visée plus générales : ainsi, en janvier 1991 à Omsk, des actions publiques de protestation ont lieu contre la répression de Vilnius, qui n’hésitent pas à aller bien au delà des prises de position du soviet municipal dans

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leurs critiques ; une polarisation forte se construit autour du référendum du 17 mars217 et des personnalités locales comme S. Babourine ou A. Kazannik amorcent une carrière plus nationale218. La tenue d’élections pluralistes en 1990 a été un moment fondateur pour la démocratisation de la vie politique locale. Les nouveaux soviets espèrent devenir le pilier d’un système parlementaire en formation avec une branche exécutive procédant de la branche législative, même si le mode de désignation du chef de l’exécutif reste inchangé. Une compétition s’est ouverte qui va permettre l’émergence de nouvelles figures, de coalitions entre les nouveaux élus et les anciens de l’appareil ouverts aux réformes. En revanche, la constitution de partis souvent réputée comme étant favorisée par un système institutionnel parlementaire a fait long feu. A la faveur du coup d’État manqué d’aỏt 1991, c’est le pouvoir exécutif local qui prend le pas sur les instances représentatives, se substituant en quelque sorte à l’hégémonie du Parti, selon deux modalités différentes : soit ce remplacement est purement formel, puisque ce sont les mêmes hommes qui sont passés d’une fonction à l’autre-, soit de nouveaux venus prennent les commandes de l’exécutif et deviennent en ce cas les fers de lance localement des réformes économiques lancées par le nouveau régime russe à partir de fin 1991 et surtout en 1992.

Les réformes sont venues en partie heurter toutes les relations et procédures informelles ou de contournement qui permettaient au régime de - plus ou moins - fonctionner ou en tout cas de ne pas imploser. Certaines vont se maintenir, d’autres vont disparaợtre tandis que pour beaucoup, on constatera qu’après une période de perturbations qui aura permis l’émergence de nouveaux acteurs, notamment économiques, des processus de dérivation -ou plutôt de reconnexion - aboutiront à la (re)constitution de liens et de réseaux déterminants pour le fonctionnement économique, administratif et institutionnel.

Cette prộsentation nous paraợt rendre assez fidốlement compte de la situation d’alors, telle qu’elle a pu être – un peu - observée directement lors de premiers séjours, et surtout telle qu’elle est restituée dans les écrits et les discours des acteurs quelques années plus tard. Mais elle tend peut-être trop à éliminer les éléments de rupture forts, de remise en cause assez radicale du système qui ont existé lors de ces années,

217 Qui porte à la fois sur une réforme de l’Union et sur le principe d’une présidence Russe, M.

Gorbatchev et B. Eltsine ayant en quelque sorte chacun une question. Les résultats positifs pour les deux renforcent l’ambigüité qui règne sur la légitimité du pouvoir et préfigurent les événements de l’été 1991.

218 Voir la série du journal indépendant Demokratičeskij Omsk.

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perceptibles notamment au travers des débats qui émergeaient, très nombreux, dans l’espace public (presse, télévisions, réunions publiques de clubs….) et qui ne portaient plus sur de nouveaux arrangements à l’intérieur du système mais bien sur un changement de systốme. Une des ambiguùtộs du basculement de 1991 et de la pộriode qui lui succède réside dans la coexistence de ces deux visions parmi les nouveaux responsables en charge du pouvoir local et régional. Mais constater quelques années plus tard que ces idées ou ces tentatives n’ont pas produit les effets espérés ou ont été suivies de déceptions ou de processus vécus comme des retours en arrière ne signifient pas que les éléments de rupture n’aient pas existé.

Pour la population qui subit de plein fouet les réformes économiques et sociales et assiste impuissante aux remaniements au sommet de l’État, les pouvoirs locaux vont constituer un refuge de stabilité et de continuité, jouant le rôle d’amortisseur des crises219 comme ils avaient constitué une sorte de trame de fond du système soviétique, garant d’une certaine continuité. Mais les élites qui les composent sont aussi contraintes par leur itinéraire, leur idéologie, l’univers dans lequel elles se sont construites, autant d’éléments de trajectoire qui influencent leur positionnement et leur action. Nous allons retrouver ces caractéristiques du pouvoir, cette configuration des relations entre institutions et acteurs dans les évolutions post-soviétiques. La diversité des constellations entre dirigeants issus du système et de la culture politique soviétique et nouvelles élites sera un facteur déterminant pour la capacité des régimes politiques régionaux à se transformer (Gel’man & Steen, 2003).

219 Les enquêtes d’opinion tout au long des années 1990 attestent la notoriété et la popularité des gouverneurs et des maires à l’opposé du sommet de l’État qui bat des records d’impopularité.

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