L’environnement immédiat, cadre essentiel de l’action

Một phần của tài liệu Acteurs locaux et régionaux face aux transformations du pouvoir en russie, 1989 1999 (Trang 369 - 372)

CHAPITRE IV Crise de la représentation, tentatives de réinvestissement du politique-

III. Entre participation politique et contrôle social : des comités de quartier aux

III.1. Expộriences locales de participation politique : les ô comitộs de quartier ằ

III.1.2. Les deux comités en action : des expériences qui divergent rapidement

III.1.2.2. L’environnement immédiat, cadre essentiel de l’action

A Omsk, une dizaine de personnes actives sont mobilisées régulièrement par les employés des entreprises du député et par un assistant permanent. Le travail se fait par des démarches incessantes auprès des autorités, des articles dans les journaux600, l’utilisation des employés des entreprises du député et de ses divers réseaux de relations.

La gestion des problèmes quotidiens du quartier constitue l’essentiel du travail du comité de Dolgoproudny. Sur toutes ces questions, entretien des immeubles, services (eau, gaz, ramassage des ordures...), le travail du comité se fait sur un mode assez immuable ó l’on sent à quel point sont encore dominants les mécanismes de gestion concrète et les anciens cadres mentaux des habitants du quartier : exposé du problème et dolộances des habitants, ộnoncộ de ce qui ô devrait ằ ờtre fait par les services concernộs et constat que ces devoirs ne sont pas remplis. Il s’ensuit des discussions souvent assez confuses sur ce qu’il convient de faire, ó se mêlent dénonciation de l’incurie de l’administration, et plus rarement propositions concrètes, émanant en général de Iouri Charykine. Celui-ci, fidèle à une conception participative et constructive de la démocratie locale, tente en permanence de montrer que chacun peut agir, même si les services concernés ne font rien, par exemple sur le problème récurrent des voitures mal garộes : ô Commenỗons par des choses simples. Par exemple, ma fille a collộ des

598 Entretien le 23 mars 1995.

599 Il tente ainsi de rencontrer les acteurs d'autres initiatives de ce type en Russie et de faire connaợtre l'expérience du comité Sécurités : cf. V. Sobolev, “Neposredstvennaâ Demokratiâ v Zaozernom (dộmocratie directe dans le quartier Zaozernyù)”, Rossijskaja Federacija, n°16, 1995, p. 47-48.

600 Voir par exemple l’interview de l’animateur du comité dans Omskij Vestnik, 26 avril 1995, p.3.

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papillons sur les voitures mal stationnées. Les gens ont commencé à les garer ailleurs... ằ601. La rộplique qui lui est faite, ôla GAI602 est une trop grosse organisation, on ne peut rien faire...ằ ne le dộsarme pas : ôCommenỗons par noter le numộro de la voiture, le signaler, avant de dire qu’on ne peut rien faire...ằ. Les rộactions s’apparentent souvent à une logique de double contrainte vis à vis du député local : ces propositions concrètes sont rejetées mais le comité, et indirectement le député local, sont par ailleurs critiqués pour leur manque d’action. L’articulation entre la participation des habitants et la représentation de leurs intérêts par le député ne se fait pas sur le terrain de l’action, et il semble qu’ici, les habitants qui viennent aux réunions soient dans la logique traditionnelle qui consiste à venir exprimer ses doléances à l’élu local, charge à lui ensuite d’agir dans l’intérêt de ses électeurs.

La question du financement est essentielle car d’elle dépendent en partie les capacités d’action. A ce titre, les deux expériences ont choisi ou ont utilisé deux voies différentes.

Dans le cas d’Omsk, la particularité tient à l’existence d’une source unique au départ, les fonds de l’entrepreneur A. Golouchko. Celui-ci ne tient pas à trouver des cofinancements et préfère restreindre l’activité du comité plutôt que d’en perdre le contrôle et les bénéfices politiques en termes de reconnaissance et de popularité qui sont nécessaires à la bonne marche de sa seconde carrière, celle de député régional. Aussi, lorsque le permanent du comité cherche à étoffer l’activité du comité et à gagner en autonomie en voulant préparer un dossier de subvention pour une fondation américaine, il se voit opposer un refus poli. Une conduite qui confirme ses propos et sa conception de l’initiative qu’il a fait naợtre.

A Dolgoproudny, le problème aurait pu se poser de la même manière, puisqu’au départ de l’initiative, il y avait aussi un entrepreneur local, potentiellement intéressé à financer le comité. Igor Minievitch devrait être intéressé à soigner son image et sa popularité, éléments utiles à son statut de candidat aux élections municipales ; d’autre part, les magasins dont il est propriétaire se trouvant sur le territoire du quartier, il est directement intéressé à l’environnement urbain et à l’ordre public sur ce territoire, deux questions au centre des préoccupations et des compétences du comité. Or, la voie choisie délibérément par le candidat A. Golouchko à Omsk ne l’a pas été par Igor Minievitch à Dolgoproudny. S’agit-il aussi d’un choix, qui témoigne d’un plus faible

601 Réunion du 10 avril 1995.

602 Police de la route.

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engagement dans une initiative dont l’entrepreneur doit partager le leadership avec un autre député ? Ou bien d’une impossibilité, soit par manque de ressources financières (ou par crainte de trop perdre d’argent dans cette initiative), soit en raison de conflits qui l’auraient opposé à son alter ego sur le quartier ?

Dans le comité de Dolgoproudny, les positions ne sont pas unanimes sur l’importance à donner aux problèmes. Par exemple, sur les nuisances sonores occasionnées par une discothèque, objet de plaintes régulières des membres les plus âgés du comité, on sent des rộticences à engager ô pour si peu ằ une dộmarche collective au nom du comitộ.

Pour autant, personne n’intervient non plus pour mettre en avant des enjeux de niveau plus élevé quant à l’environnement du quartier et qui pourraient constituer une action plus politique. Seul un autre député, B. Iankov, concerné par les problèmes du quartier car élu de la circonscription voisine et présent de temps à autre aux réunions du comité, fait valoir un point de vue plus ouvert, ou moins sécuritaire, au risque de mécontenter les membres du comité, par exemple vis à vis des jeunes dans les cages d’escalier ou des nuisances sonores occasionnées par une fête.

A Omsk en revanche, la démarche originelle est de considérer qu’il n’y a pas de problème sans importance, et que des moyens doivent être mis en œuvre pour concourir au bien-être des habitants, dont les revendications deviennent automatiquement légitimes même si des intérêts contradictoires peuvent se manifester.

Le conflit est net sur le mécanisme des relations entre les habitants et les services municipaux. Un ingénieur présent lors d’une des réunions à Dolgoproudny est vivement critiqué par les habitants qui considèrent que ce n’est pas à eux d’aller les voir quand il y a un problème, c’est aux services municipaux d’intervenir, car ils sont justement au service de la population. L’ingénieur défend le principe inverse, tout en reconnaissant que cela ne marche plus. En mars 1995, une discussion similaire se déroule lors d’une réunion à Omsk, mais elle est plus constructive, à la fois du côté de l’ingénieur responsable que du côté des membres du comité. Alors que la tonalité initiale du comité était à la confrontation, la ligne générale au bout de quelques mois est à la coopération, les débats ne se politisent pas et portent sur la résolution de problèmes précis et non sur des mécanismes généraux. Seul un retraité, membre actif du comité, ironise sur la distance des autoritộs vis à vis des simples citoyens : ô Cela fait un mois et demi que le

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responsable de l’administration du rạon nous a promis de venir. Il n’a pas dû trouver le chemin, ỗa doit ờtre trốs loin… ằ603

D’autres domaines doivent permettre à l’activité des comités de s’exercer sur un mode plus participatif et moins en relation directe avec le problème des autorités. Ainsi, les activités de loisirs, les fêtes ou l’embellissement du quartier. C’est l’un des volets du programme ô Sộcuritộs ằ d’A. Golouchko à Omsk, sộcuritộ ộtant comprise ici comme bien-ờtre moral des habitants. ôOn veut emmener les enfants au thộõtre, en excursion.

Pourquoi plus personne ne le fait ? Si les gens ne vont plus au théâtre, ce n’est pas tellement parce que c’est cher ou loin, mais parce qu’ils n’y pensent pas. C’est pire... ằ604. A Dolgoproudny, l’organisation de loisirs pour les jeunes ou les moins jeunes revient régulièrement dans les discussions, mais personne ne propose de prendre en charge une initiative, de chercher des soutiens ou des financements605.

La préparation du cinquantenaire de la victoire de 1945, le 9 mai 1995, est l’occasion pour les deux comités de déployer leurs activités. Mais ce qui reste à Dolgoproudny une initiative modeste, la discussion principale ayant été de savoir s’il faut organiser le jour de nettoyage un samedi ou si ce rappel des subbotniki soviétiques risquait de nuire à la participation, le comité d’Omsk organise une véritable fête dans le quartier, en faisant notamment planter un arbre par chaque vétéran, assisté d’un jeune.

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