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Luận án tiến sĩ luật học: Tiếp cận so sánh trách nhiệm hình sự của người chưa thành niên trong pháp luật của Pháp và Việt Nam (Phần 1)

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THÔNG TIN TÀI LIỆU

Thông tin cơ bản

Tiêu đề Tiếp cận so sánh trách nhiệm hình sự của người chưa thành niên trong pháp luật của Pháp và Việt Nam
Tác giả Van Dung Tran
Người hướng dẫn Georges Fournier, Professeur, Soizic Lorvellec, Ingénieur de recherches, HDR, Joëlle Nguyen Duy Tan, Maître de conférences (ER), Aude Priol, Responsable de la section audit
Trường học Université de Rennes 1
Chuyên ngành Droit
Thể loại thesis
Năm xuất bản 2010
Thành phố Rennes
Định dạng
Số trang 214
Dung lượng 45,23 MB

Nội dung

Introduction | LE CONTEXTE DE LA GESTION PENALE DE LA | DELINQUANCE DES MINEURS Section, L`évolution des dispositions pénales a l’égard du mineur 5 délinquant en droit francais en vietna

Trang 1

N” dordre : ANNEE 2010

Go yas RENNES Í UCH

THESE / UNIVERSITE DE RENNES 1

sous le sceau de l'Université Européenne de Bretagne

Van Dung TRAN

Institut de l'Ouest : Droit et Europe, UMR CNRS 6262Faculté de Droit et de Science politique Université de Rennes‘

< Thèse soutenue à Rennes

Approche comparee le 5 Novembre 2010

de la gestion de la devant le jury composé de :

M Francis KERNALEGUEN

el i < Professeur de droit privé et de sciences criminelles

responsabilité pénmale ——Giverstede tence 1

M Loick M VILLERBU

du m I neur en d roit Professseur de Psychologie, psycho-pathologie et

- criminologie Université de Rennes 2.

francais et Mme Soizic LORVELLEC

Ingénieur de recherches, HDR,

vietnamien Université de Nantes.

Mme Aude PRIOL

Responsable de la section audit, Direction régionale Grand Ouest de la PJJ.

Inter-Joélle NGUYEN DUY TAN

Maitre de conférences (ER) a l'Université de Paris 2

— Georges FOURNIER

Professeur de Droit privé et de sciences criminelles, Unisersité de Rennes 1 Doyen honoraire /

Directeur de thése.

^ G SF Avec la collaboration de Mme Son Le Thi

= Professeur de sciences criminelles (ER), Université

de Droit d'Hanai.

Trang 2

4 tiens à remercier toutes les personnes qui m`ont permis de mener ce projet a bien

et en toit premier lieu M le Doyen Georges Fournier, mon directeur de thése, qui m`a

guidé toit au long de mon travail et a fait preuve à ce titre d’une trés grande disponibilité

J tiens a remercier aussi Mme Thi Son Le pour ses conseils considérables et Mme.Joélle hguyen Duy Tan, pour sa relecture

4 dédie ce travail 4 mes parents, 4 mon épouse et à mes deux fils, pour avoir

accepté ant de sacrifices durant ces derniéres années.

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Presse Universitaires de France

Bulletin des arréts de la Cour de cassation

Ministère de I’Intérieur vietnamien

Ministére du Travail, des Invalides et des AffairesSociales Vietnamien

Ministére de I’Education et de la Formation vietnamien

Ministére de la Justice Vietnamien

Bulletin Officiel du Ministére de la Justice

Cour d’appelConseil d’ Etat

Cour européenne des droits de l">homme

Centre éducatif fermé

Centre éducatif renforcé

Chronique

Circulaire

Convention Internationale des Droits de |’enfant

Conseil National des Barreaux

Code de l’organisation judicaire

Conseil constitutionnel

Convention

Convention européenne de sauvegarde des droits de

"Homme et des libertés fondamentales

Trang 4

CP Code pénal

CPI Centre de placement immédiat

CPP Code de procédure pénale

Crim Chambre criminelle de la Cour de cassation

D Recueil Dalloz

DDHC Déclaration des droits de Homme et du Citoyen

Doctr Doctrine

Dr.adm Droit administratIf

Dr Fam Droit de la famille

Dr Pénal Droit pénal

Ed Edition

FAE Foyer d’action éducative

Gaz.Pal Gazette du Palais

HDXX Tribunal Vietnamien

infra Ci-dessous

IR Information rapides du Recueil Dalloz

ISRD Etude internationale de délinquance auto-rapportée

Trang 5

OPALE Observatoire des prisons et autres de lieux

đ`emprisonnement

Op.cit Ouvrage citée

P./p Page

PJJ Protection judiciaire de la jeunesse

PUF Presse Universitaire de France

Rev.pénit Revue pénitentiaire

RI.crim et pol : Revue Internationale de Criminologie et de Police

techniqueRFD adm Revue francaise de droit administratif

RSC Revue de sciences criminelles et de droit pénal comparé

RHEI Revue de l°histoire et de l’enfance « irréguliére »SEAT Service éducatif auprés du tribunal

Supra Plus haut

QD -CP Décision du Gouvernement vietnamien

QD-CTN Décision du Président de la République vietnamienTATC Tribunal supréme Vietnamien

UEHD Unité éducative d’Hébergement diversifié

UECER Unité éducative de Centre éducatif renforcé

VKSTC Paquet supréme Vietnamien

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Introduction |

LE CONTEXTE DE LA GESTION PENALE DE LA |

DELINQUANCE DES MINEURS

Section, L`évolution des dispositions pénales a l’égard du mineur 5

délinquant en droit francais en vietnamien

Section II Les engagements internationaux et la réalité de la délinquance 23

Juvénile : contexte contemporain

PREMIERE PARTIE 51

LA GESTION DE LA RESPONSABILITE PENALE DUMINEUR DELINQUANT DANS UNE PERSPECTIVE

EDUCATIVEChapitre | LES INSTITUTIONS DONT LE MINEUR DELINQUANT 52

RELEVE

SectionI Les institutions a finalité éducative concernant le mineur 52

délinquant

Section IT Les évolutions de la specialisation des institutions judiciaires 71

CHAPITREI LA DIVERSITE DES MESURES EDUCATIVES 106

APPLICABLES AU MINEUR DELINQUANT

Section]: La personnalité - référence principale des mesures éducatives 107

applicables aux mineurs délinquantsSection II: L’adaptation des mesures éducatives en milieu ouvert 126CHAPITRE II: RENFORCEMENT D’ EDUCATION DU MINEUR 163

DELINQUANT EN MILIEU FERME

Section I: La poursuite de la démarche de rééducation du mineur dans les 164

établissements fermés

Section IT: Le placement judiciaire de transition du milieu fermé au milieu 187

ouvert

Trang 7

Les garanties protectrices du mineur poursuivi

LA DETERMINATION DES PEINES APPLICABLES AUMINEUR CONDAMNE

La peine encourue par le mineur condamné

Les critéres de détermination des peines applicables au mineurcondamné

INSERTION ET REINSERTION SOCIALES DU

DELINQUANT MINEUR INCARCERE

La spécialisation de personnels pénitentiaires prenant en chargeles mineurs incarcérés

L’aménagement de la peine d’emprisonnement favorisantl’insertion sociale du mineur condamné

Conclusion générale

BibliographieTables de matiére

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LE CONTEXTE DE LA GESTION PENALE DE LA

DELINQUANCE DES MINEURS

La délinquance juvénile est un objet de préoccupation pour les dirigeants

vietnamiens et francais

En droit pénal frangais, les premiéres dispositions procédurales spécifiquessont apparues au début du XVIIlème siécle’ et ont véritablement évolué en 1945,avec l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 2 février 1945 qui « constitue

!'aboutissement de la prise en compte progressive de la nécessité d'attribuer unstatut spécifique a l’enfance délinquante »? Ce texte, souvent appelé « Charte del’enfance délinquante », applicable à tous les enfants de moins de dix-huit ans,

repose sur les trois principes directeurs : la primauté de |’action éducative sur la

répression, la spécialisation des juridictions et l’excuse atténuante de minorité.

Dans les premiers codes pénaux vietnamiens, les Rois se référaient déja a la

responsabilité pénale du mineur pour des actes interdits par la loi A raison de la

difficulté a évaluer |’existence d’un discernement chez un mineur, le législateur

vietnamien a jadis imposé un seuil d’Age et le principe d’atténuation de la peine

pour tous les mineurs de seize ans Aprés la période de la présence francaise et des

guerres, ce n’est quà la fin du XX siécle que fut élaboré le code pénal de la

République Socialiste du Vietnam de 1985, suivi de la révision de 1999 Si lelégislateur vietnamien définit la responsabilité pénale du mineur, c’est pour donner

la priorité 4 |’application de mesures éducatives ou a |’atténuation des peines, sans

' Christine Courtin, La responsabilité pénale des mineurs dans l’ordre interne et international, Cahiers de la

sécurité, n°1, La violence des mineurs, edi INHES juillet — septembre 2007.

? Jean-Francois Renucci et Christine Courtin, le droit pénal des mineurs, PUF, Coll Que sais — je ?., 2001,

Nerac — Croissier Rosel, Le mineur et le droit pénal, L’Harmattan, 2000.

3 Bonfils P et Gouttenoire A., « Droit des mineurs », Dalloz, 1° éd.2008

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pour autant prévoir đˆinstitutons judiciaires spécialisées pour la prise en charge des

mineurs délinquants

Cependant, en France comme au Vietnam, l’explosion de la délinquance desjeunes ne cesse d’étre un important sujet de préoccupations qui conduit as’interroger sur l’efficacité des dispositions pénales relatives aux mineurs

délinquants’ En France, l'ordonnance du 2 février 1945 bien que revisitée a de trés nombreuses reprises”, est ainsi devenue un objet des passions politiques et sa remise

en cause a fait ]'objet des đébats” Ainsi, un premier ministre déclarait-il, « Nous

procéderons sans tabou aux modifications de I'Ordonnance de 1945 en respectant

les grands principes qui la fondent et qui demeurent valables et justes par dela

ladaptation nécessaire »’ Le jeune délinquant est considéré aujourd’hui comme

responsable d’une délinquance plus violenteŸ, ce qui implique que les procédures

doivent s’inscrire en cohérence avec une exigence d’une réponse pénale rapide et

systématique a chaque acte de délinquance afin de lutter contre le sentimentd’impunité ressenti par certains mineurs C’est la raison pour laquelle le législateur

francais prévoit une réforme au fond de la « Charte de la justice du mineurdélinquant »”

Au Vietnam, la délinquance juvénile, de la méme manière, augmente depuisquelques années mais change aussi de nature Les violences réalisées par les lycéenssont de plus en plus nombreuses Les meurtres, les trafics, les atteintes à l’intégrité

physique sont de plus en plus souvent relatées dans les médias'° Le législateur

* Jean Francois Renucci, Le droit pénal des mineurs entre son passé et son avenir, RSC 2000, p.79

” Ce texte a déja été modifié trente et une fois et à un rythme accru au cours des deux derniéres décennies, 14

fois durant les quarante premières années et 17 fois depuis 1985.

* Philippe Milburn, Quelle justice pour les mineurs? Entre enfance menacée et adolescence menacant, ,

Trajets, Eres, préface par Denis Salas, 2009,

7 Lionel Jospin, extrait du discours prononcé lors d’un déplacement thématique a Tours 2002

ở Lettre de mission de la Ministre de la justice du 4 avril 2008, faisant suite a différents discours du Président

de la République démontrant successivement « |’évolution de la délinquance juvénile (3 juillet 2006), « la quasi impunité garantie aux mineurs délinquants (devant le Sénat, le 3 septembre 2006 et demandent expressément aux « premiére réponse de lordonnance de 1945 sur des mineurs » (conférence de presse, 1 Ï janvier 2007).

? Discours de M Varinard le 1 décembre 2008 a |’occasion de la remise des soixante-dix propositions

issues de son rapport au ministére de la justice.

'° On peut lire dans les quotidiens électroniques vietnamiens les meurtres, vols, trafics dont sont coupables

des mineurs, voire des collégiens, ou des lycéens A savoir, récemment le meurtre un chauffeur de taxi en mars 2008 par un mineur de 17 ans Au commissariat, il a avoué qu'il a pris un taxi le soir du 23 mars pour aller au quartier Bich Dao, Ville de Thanh Hoa ; il a coupé la gorge du chauffeur, Dao et lui a volé 500.000

dong ; d'aprés http://www.vnexpress.net/GL/Phap-luat/Hinh-su/2010/03/3BA1A1B3/.

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vietnamien doit donc aussi s`interroger sur l'efficacité des réponses pénalesapportées a la délinquance des mineurs Malheureusement, lors la derniére de la

réforme du code pénal, seuls le trafic de drogue, la corruption, la pédophilie et les

infractions contre les biens ont retenu |’ attention de législateur en vue de renforcer

la répression'' En d’autres termes, il n’y a pas eu de grands changements sur la

responsabilité pénale concernant la responsabilité pénale du mineur délinquant

vietnamien depuis le premier code pénal de 1985 et les derniéres modificationsrécemment effectuées, en juin 2009, du code pénal de 1999

D’une maniére générale, les différences entre les deux systémes judiciaires

du point de vue de la responsabilité pénale du mineur délinquant sont restées assez

grandes, on percoit toutefois une tendance au rapprochement dans les dernièresréformes des lois frangaises et vietnamiennes Le législateur francais est a la

recherche d’une réponse plus rapide et systématique pour chaque acte de

déelinquance afin de lutter contre le sentiment d’impunité de certaines jeunes quisuscitent l’exaspération d’une partie du corps social’ Cela montre que les

dispositions légales prises par les gouvernements francais laissent apparaitre undurcissement de laction pénale envers les mineurs en réduisant laction de

protection au profit de mesures plus répressives'* En revanche, la montée du

nombre des jeunes délinquants conduit d’autre part a reconnaitre la nécessité desmesures répressives et la nécessité d’une intervention systématique et spécialisée"*

Sur ce point, le droit pénal vietnamien et le droit pénal francais relatifs au mineur serapprochent

L’étude de la responsabilité pénale du mineur délinquant repose sur

certaines observations préalables qu’il est difficile d’aborder dans une thése parce

'' Dans les années 1996, 1997, 1999, le législateur vietnamien se concentre sur la réforme des dispositions

relatives a la corruption, aux infractions contre des biens, a la violence sexuelle, en particulier la pédophilie Les modifications portent sur les sanctions plus sévères.

'? Lette de mission, Ministre de la justice francais du 4 avril 2008, cité supra

Philippe Milburn., Quelle justice pour les mineurs ? Entre enfance menacée et adolescence menacant, op

cit., p.17.

'* Jusqu’au début du XXè siécle, le législateur vietnamien n’arrivait pas a décider 4 quel moment |’avocat

pouvait intervenir au procés ; voir not Nghiem Xuan Yem, Prévention de la délinquance dans un contexte de

mondialisation, éd, Maison d’édition de la Police populaire, 2005, p 357; un grand progrés est toutefois résulté de la réforme de Il’art 56 al 4 CPP vietnamien de 2003 : voir not Lettre de mission du Président de la République Nguyen Minh Triet à l’occasion de la dix huitième réunion du Comité permanente du parti communiste vietnamien, relatif aux stratégies de réforme des institutions judiciaires jusqu’en 2020.

3

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que cela nécessite de faire des recherches dans des domaines dont les données sontperfois peu accessibles Cela tient d`abord au fait que la place de l’avocat n’est pasencore bien définie dans la procédure pénale vietnamienne' Par ailleurs celas’explique par les pouvoirs importants de la police judicaire qui est Ï'institution

d'instruction principale dans la procédure pénale vietnamienne

Bien que le Parquet populaire joue un rôle trés grand parce qu’il représentel’action publique et contrôle la conformité des actes juridiques a la Constitution et a

la loi", instruction est une étape dépendant du Ministére de la Police Elle échappe

en réalité au contrôle du procureur de la République qui est en l’occurrence leParquet Populaire Il n’effectue qu’un contrôle superficiel de l’action publique

cngagée a l’égard de la personne suspectée, des justificatifs des mandats d’arrét ou

des mandats de dépôt Les éléments d’investigations sont recherchés par desfonctionnaires de police chargés de linstruction Ainsi, a louverture del’instruction, si la police ne désire pas d’intervention de l’avocat dés le début, le

suspect majeur comme mineur ne bénéficie d’ aucune assistance juridique Le risque

d’atteinte à la loyauté des preuves augmente puisque le prévenu n’est pas assisté

Bref, le « monopole » de l’autorité d’enquéte au cours de |’ instruction d’un procéspenal demeure actuellement un problème délicat, toujours en débat parce que le réle

et le pouvoir de l°avocat ne sont pas encore respectés et protégés par la loi

La gestion différente de la responsabilité pénale du mineur délinquant entre

les deux pays résulte, à notre avis, des contextes dans lesquelles les dispositions

pénales des deux pays ont évolué et de la réalité de la délinquance juvénile propre a

chacun d’eux.

Conclusion n°8 — NQ/TW du 02 janvier 2002 et Conclusion n°49 — NQ/TW du 2 juin 2005; du Comité

national de réforme des institutions judiciaires du 22 septembre 2009; art.56 al 4 du code de procédure

penale vietnamien de 2003

° Art, la loi organique n° 32/ QH 10 le 2 avril 2002 régle |’organisation et fonction du Parquet populaire

4

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SECTION I: L'EVOLUTION DES DISPOSITIONS PENALES

A L’EGARD DU MINEUR DELINQUANT

EN DROIT FRANCAIS ET VIETNAMIEN

SOUS - SECTION I : Evolution historique des dispositions pénales

relatives au mineur délinquant au Vietnam.

Historiquement, les dispositions de droit pénal et de procédure pénale

vietnamiennes relatives aux mineurs délinquants se limitaient à un allégement de la

responsabilité du mineur Cet allégement trouve son origine dans le manque dematurité physique et intellectuelle du mineur et dans un esprit d’indulgence et un

souci humanitaire des Vietnamiens En revanche, aucune disposition procédurale

pénale n’évoque une institution procédurale spécifique en charge des procèsconcernant des mineurs ; seules on été créées quelques dispositions relatives aux

procédures concernant des infractions d’une extréme gravité'” commises par des

mineurs ; nécessitant le jugement du Roi lui-méme Les autres dispositions ne

valaient qu’au titre de « recommandations » non impératives

Les dispositions de I’époque relatives à la responsabilité pénale des mineurs

n’ont pas été nombreuses On peut distinguer deux périodes : la période de |’ancienrégime vietnamien et la période du régime colonial et post colonial jusqu’a la

réunification du Vietnam

§1 Les codes de Hong Duc et de Gia Long - deux codes pénaux typiques del’ancien régime au Vietnam

Les textes législatifs les plus représentatifs pendant trois siècles (KV —

XVIII) ont été les deux codes pénaux : celui de Hong Duc, établi sous la dynastiedes rois LE et celui de Hoang Viet, encore appelé Gia Long, sous la dynastie des

Rois NGUYEN Bien que de nombreux historiens essaient de prouver

l'indépendance de |’élaboration de ces deux codes pénaux, ils ont, sur le fond, subi

'’ A savoir les crimes de meurtre, de complot de - Cf article 14 du Code Pénal de Hong Duc, traduit par

Nguyen Quang Thang, éditions de la Culture et de I’Information, 1998, p 41.

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I'influence des réglements législatifs chinois ”, pays ot le Confucianisme |” existait

depuis plus de deux mille ans, et qui a profondément imprégné les régles de viesociale au Vietnam

Quant aux dispositions concernant la responsabilité des mineurs délinquants,

les législateurs des règnes Le et Nguyen les ont abordés sur deux points : exemption

d’accusation et absence de peine pour le délinquant mineur en bas Age et, en cas de

condamnation, prise en compte d’excuses atténuantes L’article 16 du Code HongDuc et article 21, livre 2 du Code Hoang Viet ont ainsi également prévu que « sỉ

l'enfant a sept ans ou moins, il ne sera pas condamné méme s'il a commis un crime

qui est puni de la peine de mort S’il était manipulé par un tiers, celui-ci seracondamné S’il s’agit dun vol, le receleur devra rendre l'objet volé ou

dédommager de la victime » A partir du XVe siécle, les dispositions du droit pénal

vietnamien ont clairement défini le seuil d’4ge Nous n’avons trouvé aucune

indication relevant que ces dispositions se référaient 4 l’immaturité de enfant ;

elles étaient inspirées de « J'esprit humanitaire vietnamien »”° qui perdure encore

dans les dispositions du Code Pénal vietnamien contemporain

Pour les enfants de sept a quinze ans, |’atténuation de la peine était accordée

selon différents degrés En fonction de l’infraction commise et de I’4ge de |’enfant,

la forme d’atténuation de peine dans les deux Code pénaux, qui était largement

appliquée sous le régime féodal, était le rachat de l’infraction si l’enfant avait « de

dix a quinze ans» ; \infraction commise était sanctionnée par « une peine de

travaux forcés ou une réclusion»*' Les dix crimes les plus graves?? sont toutefois

'* P Philastre, « Malgré tout rejet ou objection, les faits restent évidents, les deux pays avaient leur

souveraineté distincte mais des mœurs et organisations politiques quasi-similaires, surtout plus tard sous la dynastie des quatres Rois Annamites, ces similitudes devenaient des ressemblances », Préface de la traduction frangaise du Code Hoang Viet, édition du 5 mars 1875.

'* Université de Droit de Ha Noi, cours de I’Histoire de I"Etat et du Systéme Législatif du Viet Nam, Editions

de la Police Populaire, 2002, page 156 Le Confucianisme est une théorie philosophique morale et politique

Le noyau est |’Universalisme créé par Confucius En morale, le Confucianisme apprécie les cing vertus le Ren (I'humanité, la bonté), le Li Ji (le livre des rites), la Moralité, la Sagesse et la Confiance, les considérant comme les vertus parfaites de ]'homme Les punitions ne sont envisagées qu'à titre complémentaires ou en

dernier ressort.

*° Université de Droits de Ha Noi, cours de I’Histoire de |’ Etat et du Systeme Législatif du Viet Nam, op.cit

p 152.

*' Tội lưu est infraction dont I’auteur sera déporté En fonction de la gravité de |’ infraction, le criminel peut

étre exilé vers une province proche ou une province lointaine, ou encore extrémement lointaine Tôi dé est l’infraction dont l’auteur subira des travaux forcés.

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exclus de lapplication de ce réglement Ainsi, on peut considérer a travers ces

dispositions que l°âge minimal de la responsabilité pénale a été fixé à sept ans sous

le régime féodal et que lindividu de quinze ans révolus était considéré comme

majeur

Sous langle procédural, il n’existe pas de différences procédurales entreenfant et le majeur Sur ce point, un seul article évoque les dispositionsparticulières à suivre pour le jugement d’un délinquant mineur, notamment dans lescas de meurtre, tranché par la décision supréme du Roi L’article 16 du Code HongDuc et larticle 21, volume 2 du Code Hoang Viet prévoient que « pour les

meurtriers ayant de sept a quinze ans, la peine de mort devait être soumise au Roipour son approbation» Le Roi était donc la seule autorité supréme pour seprononcer sur la vie d’un délinquant mineur en cas de meurtre

On constate donc que les dispositions relatives aux délinquants mineurs

n’étaient pas nombreuses dans ces deux codes De plus, ils témoignent de

importance de la doctrine confucianiste dans I’établissement et lapplication deslois, en accordant une grande importance au pouvoir supréme du Roi En effet, ces

réglements restérent en vigueur non seulement sous les dynasties mais aussi

pendant la colonisation frangaise

§2 Le systeme législatif vietnamien relatif au délinquant mineur pendant la

période de co-existence de régimes politiques différents et de systemes pénaux

distincts.

Cette période a commencé avec la présence de la France et s’est terminée auprintemps 1975, l’année ot le Vietnam est devenu entiérement indépendant On

distingue trois étapes La premiére, de 1858 a 1945, ó il existait parallélement

deux autorités: |’autorité frangaise, puissance coloniale sur le territoire deI’Indochine et celle de la dynastie Nguyen qui continuait à régner dans le pays; la

deuxiéme étape: 1954 — 1975, dans le Nord du Vietnam ó les autoritésrévolutionnaires ont ceuvré pour la reconstruction du pays et la lutte pour la

?? Ce sont les crimes considérés comme les plus dangereux de l°ancien Code pénal, a savoir le complot de

félonie (coup d’Etat), le fils ingrat (assassinat des grands-parents et des parents), l’inhumanité (meurtre de trois personnes de la méme famille qui ne méritent pas la mort).

7

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libération du Sud Parallélement, le sud du Vietnam était gouverné pendant plus de

vingt ans (1954 — 1975), par Ngo Dinh Diem et ultérieurement par Nguyen Van

Thieu auquel s’opposait le dirigeant d’un gouvernement communiste au Nord du

Vietnam Chaque période a entrainé des modifications du systéme législatif engénéral et des règlements du code pénal et du code de procédure pénale, ce quin’a

pas manqué de retentir sur le statut pénal du mineur délinquant

1/ L’ambiguité des réglements du Code pénal et du Code de procédure pénalerelatifs aux délinquants mineurs au Vietnam pendant la période de 1858 a 1945.Les premiers Frangais sont arrivés sur le territoire vietnamien en 1858 La

Cour des Nguyén a ensuite officiellement reconnu la présence de la France au

Vietnam en juin 1862” La co-existence des deux autorités : celles de la dynastie

des Nguyên et celles des occupants francais a pendant longtemps caractérisé lesystème de la loi vietnamienne de cette époque Le mélange de ces deux systémes,

est alors constitué d’une part par un systéme archaique et d’autre par le systéme

francais caractérisé par |’ esprit législatif progressiste occidental’.

Néanmoins, dans les documents que nous avons collectés, nous n’avons pas

pu trouver la présence du Tribunal pour enfants et adolescents admis en droit pénalfrancais au Vietnam C’est pourquoi, les réglements relatifs aux délinquants

mineurs applicables étaient essentiellement ceux du Code pénal de la dynastie

Nguyên”, bien qu’en 1933, ait été promulgué le Code pénal de Hoang Viet

s’inspirant a la fois de nombreux articles du Code pénal de Gia Long et de plusieurs

aspects progressistes du Code pénal francais”.

? Université de droit d’Ha Noi, Cours de l’histoire de |’Etat et des lois du Vietnam, éditions de la Police

Populaire, 2003 p 485.

4 Université de droit d’Ha Noi, Cours de I’Histoire de |’Etat et des lois du Vietnam, précité, « Le Tribunal

est apparu au Vietnam a partir de la présence des francais, sous !’influence de la législation de la France », éditions de la Police Populaire, page 547.

25 Ce sont des dispositions du Code de Hoang Viet élaboré sous le régne du roi Gia Long.

26 Université de droit d’Ha Noi, cours de |’Histoire de I’Etat et des lois du Vietnam Op.cit.p 543.

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2/ Les dispositions du Code pénal relatives aux délinquants mineurs a lépoque du

pouvoir démocratique populaire dans le Nord du Vietnam de 1945 à 1975

Pendant cette période, les dispositions de droit pénal et de procédure pénale

relatives aux délinquants mineurs n’ont pas été codifiées par le législateurvietnamien mais inscrites sous forme de textes autonomes Ces textes restaient des

rapports de synthèse”” élaborés lors de réunions annuelles du Tribunal supréme qui

préconisait leur utilisation pour le traitement des affaires relatives aux mineurs

délinquants La loi pénale de cette époque fonde pour une partie importante lesdispositions du code pénal actuel

Tout dabord, le seuil de la majorité et de la responsabilité pénale a été

redéfini et des principes ont été posés : « Le mineur est un garcon ou une fille ayant

moins de dix huit ans »”* ou encore « en général, l'enfant de moins de quatorze ans

ne doit pas comparaitre devant le Tribunal »”° Ainsi, les lois pénales

prévoient-t-elles que les magistrats ne peuvent poursuivre que les enfants de quatorze ansrévolus ainsi que lindividu de dix-huit ans considéré comme majeur Cependant,

tous les enfants ayant quatorze ans étaient jugés par un tribunal mais « pour

lenlant de quatorze a seize ans, les poursuites pénales ne s'‘appliquent qu 'aux

crimes graves comme le meurtre, le braquage, le viol Pour les viols, le tribunal

compétent ne prononce que des mesures éducatives; les poursuites et les peines ne

sont applicables au mineur délinquant que seulement dans les cas graves »*°.

De plus, sont créées des excuses de minorités susceptibles de modifier lapeine applicable au mineur En fait, la peine atténuée est décidée par le juge de

jugement en tenant compte de l'âge du mineur On peut ainsi remarquer que,comme la loi pénale francaise, la loi pénale vietnamienne de |’époque a laissé au

juge un trés grand pouvoir en décidant de la peine, parce qu’il n’existait pas

d’échelle d’atténuation comme dans les codes pénaux ultérieurs Ainsi, il était

7 Une fois par an, le Tribunal supréme organisait un congrés de fin d’année ó les problémes les plus

marquants étaient débattus, votés et promulgués à |’ attention des Tribunaux subordonnés Dans plusieurs cas, ces décisions équivalaient une loi.

** Rapport de synthése de quatre ans d'activité du Tribunal Supréme (1965 — 1968), Systématisation des

Réglements pénaux en 1975.

* Instruction N° 46-TH du 14/1/1969 du Tribunal Suprême du Vietnam

°° Rapport annuel du Tribunal Supréme de 1997, Systématisation des Réglements pénaux en 1975

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prCcIsé que, « si Ïimfraction nécessite la mise en examen, il faut tenir compte de

l’age de l'enfant »” De plus, le Tribunal supréme préconisait un traitement

particulier « pour les enfants vagabonds de quatorze a seize ans, récidivistes de

vols, en les assimilant à des voyous »*’ Pour autant, il était suggéré qu’ « il ne faut

pas considérer le caractére professionnel de linfraction puisque, l’accusé étant

encore jeune, le considérer comme un voyou professionnel serait susceptible de le

faire entrer dans un chemin de désespoir » ; ou encore « qu'il faut condamner un

mineur a une peine de prison seulement dans le cas de multiples circonstances

graves et dangereuses ; dans le cas ó infraction reste de gravité moyenne, il faut

mettre l’enfant dans une école a fin de rééducation ou le remettre a sa famille, ou

encore prononcer une peine de prison avec sursis »” Quant à « ]'accusé de seize

a dix-huit ans, il faut tenir compte pour les poursuites pénales de ses

connaissances médiocres de la loi et de sa capacité a s éduquer plus vite et par

conséquent prononcer un jugement moins sévère, une peine environ deux fois moins

élevée que pour un accusé adulte ».**

La séparation entre les mesures pénales et les mesures administratives

applicables aux mineurs délinquants constitue un des signes caractéristiques de laloi de cette période Les dispositions pénales ont commencé à distinguer deux types

de mesures appliquées aux mineurs : les mesures pénales a travers des poursuites

pénales et des mesures administratives résultant de décisions administratives Unedécision du Conseil gouvernemental en date du 1967, au sujet du renforcement de

l’ordre et de la sécurité publique’, a insisté sur la mise en place de mesures

administratives telles que l’obligation de rééducation Elle précise que sontconcernés, les « enfants de sept a dix-sept ans, y compris les enfants dont l'âge de

la responsabilité pénale au moment de l'infraction n était pas atteint et ceux qui

n'ont pas subi de poursuites pénales ou qui n ont pas été mis en examen Ce sont, pour la plupart d'entre eux des sans domicile fixe, des voleurs récidivistes, dévoyés

'! Rapport de synthése et Directive N° 329-HS2 du 11/02/1967 du Tribunal Supréme a propos de la politique

du jugement des viols et d’autres crimes sexuels, Systématisation des Réglements pénaux en 1975, Introduction.

'# Rapport de synthése et Directive 1967 du Tribunal Supréme, voir supra, p.2

® Rapport de synthèse et Directive 1967 du Tribunal Supréme, voir supra, p.4

* Rapport de synthése et Directive 1967, voir, supra, p 7

* Décision n° 164 du 11 novembre 1997

10

Trang 18

el dévergondes, qui ont été soutenus e( éduqués pendant longtemps mais qui ne lesont plus Ils seront envoyés dans une école rééducative pour une durée de deux

ans Ce délai pourrait étre raccourci ou prolongé en fonction de la bonne conduite

de I inféressé » Ainsi au Vietnam, une nouvelle institution administrative a-t-elle

été créée, comme solution a la délinquance juvénile et aussi a la criminalité chez les

mineurs en évitant les poursuites pénales II s’agit de décisions applicables a partir

de règlements concrets de la loi pénale et des lois administratives du Vietnamrelatives au traitement des mineurs délinquants quand leurs actes ne constituent pas,

ou ne sont pas considérés comme constitutifs d’une infraction

Par rapport aux dispositions pénales et procédurales promulguées par

l’autorité révolutionnaire dans le Nord, les dispositions relatives au délinquant

mineur sous |’autorité du président Nguyen Van Thieu dans le Sud sont différentes

en particulier avec la création du premier Tribunal pour enfants et adolescents au

Vietnam en 1972 et l’adoption d’un code pénal

3/ Les dispositions relatives au mineur délinquant dans le code pénal de 1972 de laRépublique du Sud Vietnamien

Les trois points les plus importants relatifs 4 la responsabilité du mineur

délinquant dans le code pénal, promulgué en 1972 par le Président de la République

du Sud*® sont la détermination d’un seuil d’age, latténuation de la peine et la

création du Tribunal pour enfants et adolescents, nouvelle institution spécialiséerelative au mineur délinquant, crée pour la premiére fois au Viet Nam

Le Code pénal de 1972 a fixé le seuil d°âge selon lequel « / infraction n'estpar constituée lorsque le mineur de moins de treize ans commet une infraction au

moment des faifs »'” Par conséquent, ]'âge est considéré comme une condition de discrimination des éléments constitutifs d’une infraction®® Si l’enfant a moins de

*° Le 20 avril 1972, le Président Nguyen Van Thieu a promulgué le code pénal et le code procédural par deux

décrets-lois N° 026/TT/SLU et N° 027/TT/SLU.

'” Article 17 du code pénal de 1972, précité

® Université de droit d’Ha Noi, Selon des spécialistes pénalistes vietnamiens, une infraction est constituée

par quatre éléments : élément matériel, tentative, !'auteur, et Ì objectif du crime Pour condamner_ |’auteur

d”une infraction, i] faut justifier que |’auteur des faits a la capacité de discernement et a atteint |’age requis: Manuel de droit pénal général, ed Maison de police populaire, 2003, p 51.

11

Trang 19

treize ans, i] n’est pas responsable pénalement parce que l’infraction n`est pasconsidérée comme constituée.

Le code pénal 1972 prévoit ainsi l’atténuation de la peine applicable au

mineur délinquant L’article 91 du Code pénal considére que la minorité est un

élément permettant à |’enfant de bénéficier d’un « régime d’indulgence »'” selon

lequel « l'enfant de treize a dix-huit ans » bénéficiera d’une atténuation de peinebien plus importante qu’un majeur commettant la méme infraction Ainsi, selon

l’article 92 de ce Code, dans le cas du régime d’indulgence prévu par l’article 91,

: T z ; 4

les peines sont particulièrement atténuées”?,

Le Code pénal de 1972 est le premier code pénal vietnamien qui a prévul’exonération de la peine de mort pour les délinquants mineurs, peine qui, une foisprononcée, ne permet évidemment plus de possibilité au mineur délinquant decorriger sa faute ; et il prévoit que le mineur ne saurait encourir de peines trop

sévères, telles que la prison ou les travaux forcés ou |’exil Les autres peines sont

deux fois moins élevées que celles normalement applicables aux majeurs En outre,

ce code pénal prévoit également la remise obligatoire de l’enfant aux parents plutôtque |’emprisonnement En |’absence de parents, |’enfant condamné est placé chez

une personne digne de confiance, ou au sein d’un établissement charitable éducatif

: 4I

ou dans un pensionnat réservé aux mineurs

Enfin, le Tribunal pour enfants et adolescents est la premiére institutionJudiciaire propre aux mineurs figurant dans un code pénal au Vietnam Cependant,

en raison du faible nombre de documents auxquels nous avons pu accéder, nousn’avons pas pu procéder a des observations exhaustives sur le fonctionnement de

® Selon l’art 92 CP 1972, en cas d’application du régime indulgent, prévoit a l’article 91, les

peines sont atténuées comme suit :

a/ L’enfant délinquant peut être condamné a une peine d’emprisonnement de dix a vingt ans s’il a commis

un crime puni de la peine de mort, de la perpétuité avec travaux forcés ou de |’exil ;

b/ Pour un crime puni d’une peine d’emprisonnement a durée déterminée, de travaux forcés ou de |’exil,

|”en fant peut subir une peine d’emprisonnement d’un a dix ans ;

c/Pour un crime punit d’une peine d’emprisonnement, l'enfant peut étre condamné a une peine d’emprisonnement de un a cinq ans ;

d/ Pour une infraction faisant |’objet d’une mise en examen par le tribunal correctionnel, la peine applicable

au mineur délinquant doit étre au moins deux fois plus basse que la peine encourue par les majeurs.

e/Pour une contravention, seulement une peine d’amende.

“° Art.91 du CP 1972 Voir ref 39

"' Art 309 CP de 1972

12

Trang 20

cette institution”” De 1972 jusqu’a 1975 date de la chute du régime du président

Nguyen Van Thieu au Sud du Vietnam, |’expérience a été trop courte pour évaluercette toute nouvelle institution juridique Nous regrettons que le rôle et I`influence

du Tribunal pour enfants et adolescents n’ait pas été plus importante

En résumé, pendant trés longtemps, les lois pénales vietnamiennes relatives

aux mineurs se limitaient à des dispositions atténuant les peines par rapport a celles

appliquées au majeur En procédure pénale, le législateur de cette époque n’a pas eu

la volonté d’établir des instituions judiciaires spécifiques Les dispositions de

procédure pénale concernant les poursuites et l’instruction étaient communes auxmajeurs et aux mineurs, a part la bréve apparition du Tribunal pour enfants etadolescents sous le régime du président Nguyen Van Thieu Ainsi, le concept de

spécialisation des institutions judiciaires pour mineurs est apparu fugacement enprocédure pénale vietnamienne mais n’a pas vraiment été reconnu ni mis enapplication

Jusqu’a la fin du XXe siécle, les délinquants mineurs vietnamiens ne

bénéficiaient que des atténuations de peines alors que rien n’existait dans le cadre

de la procédure pénale Par contre, en France, les dispositions pénales relatives au

délinquant mineur avaient déja évolué Cependant, il faut reconnaitre que cette

évolution résulte de nombreuses discussions L’ordonnance du 2 février 1945 a

vraiment marqué des progrés dans la législation francaise concernant le mineurdélinquant dans la premiére moitié du vingtiéme siécle Cependant, si au cours desdix derniéres années, le législateur frangais a promulgué massivement des lois qui

sont de plus en plus répressives, notamment contre les mineurs récidivistes,

certains doutent de l’efficacité de ces lois et s’interrogent : l'attitude répressive

actuelle du législateur francais est-elle efficace” ?

“ Van Dung Tran, « Nous ne pouvons toutefois affirmer que dans le Sud du Vietnam, de 1954 à 1975, ces

institutions existaient déja », Mémoire, |’ Université de droit d’Ha noi, préci, en 2003, p 14.

2 Huyette M Encore un rapport (a venir) sur la délinquance des mineurs,

http://www.huyette.net/article-encore-un-rapport-a-venir-sur-la-delinquance-des-mineurs et les références indiquées infra.

13

Trang 21

SOUS - SECTION II : Evolution du droit pénal et de la procédure pénale

applicables aux mineurs en France

Le droit pénal et la procédure pénale des mineurs ont fait l’objet d’un

développement complexe en France En effet, aussi bien les mutations de la norme

pénale générale en France que les évolutions communes dans les pays étrangers

depuis la deuxiéme partie du XIXè siècle jusqu’au début du XXé siécle ont été a

l'origine de transformations profondes telle que la naissance du Tribunal pour

enfants Cet événement a été considéré comme une mutation considérable pourconcrétiser une volonté de spécialiser les institutions judiciaires concernant lesmineurs Toutefois, il a fallu attendre trente ans, jusqu’a l’ordonnance du 2 février

1945, pour prétendre a une amélioration plus compléte du statut du mineur Pour

mieux comprendre, il faut rappeler I’évolution des dispositions pénales relatives aux

mineurs délinquants depuis la Révolution de 1789“.

§1 Le sort du délinquant mineur décidé par le Code pénal de 1810 et le Coded’instruction criminelle

Dans l’ancien droit frangais, le juge seul détenait le pouvoir de prendre en

compte le jeune Age de |’auteur d’une infraction L’ancien droit considérait lemineur comme un adulte en réduction et les juges recherchaient s’il avait atteint

lage de raison, en général, fixé à sept ans*’ Jusqu’a cet Age, il était considéré

comme « infans» et comme incapable de commettre une faute constitutive

d'infraction Entre sept et quatorze ans le mineur était dit « impubére », susceptibledans certains cas d’étre considéré comme responsable selon les conditions de

commission de l’infraction*® ; si l’infraction échappait a toute sanction, I’ impubére

était le plus souvent puni du fouet ou de l|’enfermement

* Pour l'histoire de la gestion pénale de la délinquance juvenile, on référera avec le plus grand intérêt a la

Revue d’ Histoire de l’enfance « irréguliére », crée en 1998.

*' Voir not André Laingui, La responsabilité pénale dans l ancien droit (XVĩe - XVIIe siécle), LGDJ 1970,

*° André Laingui, op.cit.p.226

14

Trang 22

A partir de quatorze ans, |’enfant était considéré comme responsable des sesactes : théoriquement les peines réservées aux adultes pouvaient leur étre appliquées

: ` ree , 1 47

mais le plus souvent la sanction était atténuée””.

Avec la Révolution, sont apparues les premières dispositions qui faisaientune distinction entre mineur et majeur mais qui n’étaient que des lois de fond ; il

n’existait guère de lois de procédure Les premiers codes élaborés a l’issue de laRévolution, le code pénal de 1791 et le code pénal de 1810, ont abordé le sort dumineur mais seulement sous trois aspects:

Tout d'abord, ces codes définissaient la majorité pénale a partir de seize ans.

Ainsi, les enfants de seize à dix huit ans ne bénéficiaient donc pas d’atténuation depeine comme les mineurs de seize ans, ni de meilleures conditions d’exécution des

peines prévues pour les majeurs

C'est la référence à \’évaluation du discernement du délinquant qui peut étre

considérée comme une des caractéristiques les plus importantes de ces codes Aussibien le code pénal de 1789 que le code pénal de 1810 posait en principe que les

enfants de moins de seize ans ayant agi sans discernement ne pouvaient pas étre

considérés comme coupables”” et leur procés était classé sans suite Lorsque, au

‘ : 8 § z +o? „ : - 4

contraire, ils étaient jugés coupables, ils bénéficiaient d’une atténuation de peine”.

Enfin, les dispositions relatives a l’exécution de peines prévues par ces codes

constituent aussi un point important Ils distinguent des niveaux de traitement en

fonction de la nature des peines et de |’Age du condamné”” Ainsi, dés le code pénal

de 1791, on établit une distinction quant a l’exécution des peines d’emprisonnement

entre majeurs et mineurs afin d’éviter les influences négatives durant |’exécution de

la peine, avec la mise en place de maisons de correction”).

A côté des lois de fond, le code d’instruction criminelle fixe les étapesgénérales de la procédure pénale Le mineur est certes soumis a la procédure de

*” André Laingui, op.cit.p.237

“8 Art 1, titre V Code pénal de 1791.et Art 66, CP de 1810

* Art 1, titre V Code pénal de 1791.et Art 67, CP de 1810

` Bourquin J., La difficile émergence de la notion d éducabilité du mineur délinquant, Histoire de la Justice,

n° 10, 1997, p 223-238.

| Art.2, 3 al 2 et 3,4 tire V, code pénal 1791 ; art 67, al.2,3 et 4, CP 1810

15

Trang 23

droit commun mais lart 340 du code d’instruction criminelle impose au juge

` x : : bated?

đ évaluer la capacité de discernement du mineur au moment de I’acte””

Cette premiere distinction entre le mineur et le majeur du point de vue de laprocedure pénale n’était néanmoins pas suffisante pour perdurer L’évolution de la

société et la complexification de la loi pénale ont, avec certain retard, rendu

nécessaire des textes plus spécifiquement adaptés à la délinquance des mineurs.

§2 Loi du 22 juillet 1912 et la création du Tribunal pour enfants et adolescents

La naissance du Tribunal pour enfants et adolescents en France au début du

XXe siecle est le résultat inéluctable du mouvement d’idées existant au long du

XIXe siécle jusqu’au début du XXe siècle nourries par des débats entre les écoles

philosophiques et les courants spirituels Le résultat a finalement été |’apparition,

au fur et 4 mesure, de premiéres bases législatives fondamentales Parallélement à

ce mouvement interne, le développement de modéles de tribunaux pour enfantsdans les pays étrangers, en particulier dans certains états américains, peut étre

considéré comme la seconde source d’ inspiration de la loi du 22 juillet 1912°.

En fait, en juin 1910, une proposition de loi sur « les infractions a la loipénale imputables aux enfants mineurs de douze ans, sur les tribunaux pour enfants

et la liberté surveillée » est soumise au SénatTM ; cette proposition est adoptée le 22

juillet 1912 ; pour la premiére fois, la situation du mineur délinquant est prise en

compte de facon distincte dans le jugement Cette loi ne prévoit pas d’atténuation de

peine mais consacre des dispositions procédurales spécifiques applicables au

mineur, dont la plus marquante était la création du Tribunal pour enfants et

adolescents et le régime de liberté surveillée

1 "article 340 du code d’instruction criminelle de 1808 a prévu que « S7 !'accusé de moins de dix-huit ans,

le président posera, a peine de nullité, cette question : « L 'accusé a-t-il agi avec discernement » ?

http://ledroitcriminel.free.fr/la_legislation_criminelle/anciens textes/code instruction criminelle 1929/code 1808_2.htm.

** Mickael Landry, Le mineur et le juge pénal au XIXème siècle, thèse pour le doctorat en Droit, Université

Montesquieu - Bordeaux IV, 2003, p 253

* Dreyfus F., « Rapport sur la proposition de loi portant la création des tribunaux spéciaux pour |’enfant et

instituant le régime de la mise en liberté des mineurs délinquants », Paris 1910.

16

Trang 24

1/ La distinction du statut pénal entre le mineur de treize ans et le mineur de trelze

a đx-huit ans

La particularité de cette loi a été de supprimer la référence au discernement

chez l’enfant de jeune age Selon cette loi, |’enfant de treize ans doit désormais être

toujours considéré comme ayant agi sans discernement

Dans tous les cas, le juge d’instruction doit mener une enquéte qui a pourbut non seulement de faire apparaitre la vérité et d’identifier le mineur auteur del’infraction mais aussi de rechercher des informations concernant sa famille, sa

personnalité, son passé et son entourage En outre, le juge d’instruction peut faire

examiner le mineur par un médecin II a également le droit d’appliquer des mesures

provisoires” durant l’enquéte dans l'attente de jugement De maniére

exceptionnelle, |’enfant peut étre mis en détention provisoire si le juge estime quec’est nécessaire

Lorsque |’enquéte est close, le dossier du mineur est pris en charge par lachambre du conseil qui peut aussi bien remettre l’enfant a sa famille ou déciderd’un placement jusqu’a sa majorité chez une personne digne de confiance, dans un

établissement de soin ou charitable, ou enfin de le remettre a l’assistance publique”’.

Le titre II de la loi 1912 est consacré a l'instruction et au jugement des

infractions a la loi pénale imputable aux mineurs de treize à dix huit ans et autribunal pour enfants et adolescents Dans cette tranche d°âge, la loi différencie

deux catégories La premiére concernant |’enfant qui a commis une infraction mais

qui est considéré avoir agi sans discernement Le régime appliqué est

quasi-similaire 4 celui de l’enfant de moins de treize ans Dans la seconde catégorie,l'enfant est considéré avoir commis |’acte avec discernement

La création du Tribunal pour enfants et adolescents et de certainesinstitutions concernant le mineur délinquant a été considérée comme une initiative

positive du législateur francais du début du XXe siécle

EL "art 3 de cette loi dispose que « | ‘enfant peut étre confié temporairement a une personne de responsabilité

ou a/ assistance publique, un dispensaire ou toute autre institution désignée par le préfet ».

°° Art.6, loi juillet 1912

17

A117

Trang 25

2/ L émergence d`une procédure spécifique concernant l*adolescent de treize a

dix-huit ans reléve de la compétence de la Cour d’assises La loi du 22 juillet 1912

introduit pour la premiére fois une volonté du législateur de créer une distinction

concernant les dispositions relatives aux mineurs ; trois particularités de cette loi

peuvent étre retenues :

Tout d’abord, \’instruction préparatoire est restée obligatoire pour toutes lesinfractions commises par des mineurs ; le législateur veut donner a |’instruction et

au jugement, une finalité a la fois répressive et éducative Ainsi, le juged’instruction doit prendre le temps de collecter des renseignements relatifs a

infraction et ceux liés a la situation familiale et au passé de lenfant, qui vont

servir de base a ses décisions’’ En outre, l’article 4 de la loi du 22 juillet 1912

décide que pendant |’enquéte, le juge d’instruction doit mener une enquéte sociale

relative 4 la personne du délinquant De plus, méme s’il n’est pas obligatoire,examen de santé d’un mineur est considéré comme une garantie juridique destinée

a le protéger physiquement et psychologiquement au cours de la procédure pouréviter tout abus du pouvoir

Par ailleurs, la création du Tribunal pour enfants et adolescents est

l’illustration la plus importante de la spécialisation de l’instruction définitive Afind’épargner a l'enfant des influences négatives sur son développement

psychologique qui pourraient étre provoquées par la sévérité d’une audience

« majestueuse » et « publique », l’article 8 de la loi du 22 juillet 1912 décide que

« dans chaque arrondissement, le Tribunal de premiére instance se constitue en

Tribunal pour enfants et adolescents pour juger, dans une audience spéciale lesmineurs de treize a seize ans auxquels sont imputés des crimes et des délits et les

mineurs de Seize a dix-huit ans ayant commis un délit » Ainsi, en théorie, la plupart

`” C'est pour cette raison que cette loi n’admet pas la comparution immédiate devant le tribunal par la

procédure du flagrant délit ou d'autres procédures directes.

18

Trang 26

des enfants de treize a dix-huit ans échappail a une comparution devant un tribunalpenal ordinaire Ils sont jugés dans une audience spéciale par des jugesexpérimentés Les adolescents de seize a dix huit ans, auteurs de crimes ou des

complices de majeurs continuent de relever du tribunal correctionnel ou de la cour

3 : 5

d’assises’®.

Lorsque la culpabilité est établie, l’enfant bénéficie d’une peine atténuée I]s’expose au maximum de vingt ans de prison pour un crime, et au maximum de la

moitié de la peine encourue pour un délit En fonction de la peine encourue”’,

Venfant doit l'exécuter dans différents établissements, soit en Maisonsđ'adolescents, soit en Maison d’éducation surveillée ou dans des centres

pénitentiaires

Enfin, l'innovation de la loi du 22 juillet 1912 tient a l’instauration du

régime de « liberté surveillée » pour les enfants délinquants II s’agit d’une mesure

intermédiaire entre la remise du délinquant a ses pére et mére et le placement encentre éducatif Cette mesure est décidée par le juge d’instruction durant |’enquéte,

s’il a besoin de temps pour éclaircir des circonstances de |’infraction” ou elle est

décidée par le juge dans le jugement’’ Par conséquent, le juge désigne un

représentant qui surveille les actes du délinquant Ce représentant est en généralmembre des organismes de protection de |’enfance Dans le cas ó |’enfant adopteune mauvaise conduite, le juge a le droit de remplacer cette mesure par des mesuresplus répressives Donc, c’est une bonne mesure éducative qui épargne au délinquantdes effets négatifs du systéme correctionnel, méme s’il existe désormais une

séparation entre mineur et majeur dans un cadre de vie normal

En résumé, la loi du 22 juillet 1912 a marqué un nouveau pas dans Vhistoirelégislative relative aux mineurs délinquants en France La détermination explicite

du seuil d'âge exprime le refus du législateur d’une évaluation du discernement

*’Voir M Boitard et A Houdot, « Bien qu’il y ait une spécialisation, le Tribunal pour enfants et adolescents

n’est pas une institution indépendante mais seulement une audience spéciale Cette disposition concernant donc la composition du tribunal, des participants a l’audience, la procédure d’instruction définitive et les conditions de prononcé de la décision Cette loi ne prévoit pas encore le juge spécialisé » in Le probléme de

|*enfance délinquante, Sirey, 1947, p 150 et ss.

°° De 6 mois ou 6 mois a 12 mois, ou plus de 2 ans

' Articles 16 et 20, loi du 22 juillet 1912

*' Articles 15 et 21, loi du 22 juillet 1912

19

Trang 27

chez les enfants « trop jeunes»: cela permet de leur épargner des poursuites

pénales dans une procédure sévère Les mesures appliquées sont a caractère

réellement éducatif Lorsque des poursuites pénales sont encourues, la création du

Tribunal pour enfants et adolescents, ainsi que la liberté surveillée constituent un

remèede limitant la sévérité dune procédure pénale ordinaire Cependant, l’évolution

de la société pendant et aprés la deuxiéme guerre mondiale, rend nécessaire une

meilleure prise en charge des mineurs délinquants, ce que propose |’Ordonnance du

juvénileTM ; « il n’est donc pas surprenant dès lors que les pouvoirs publics se soient

émus de cette évolution et aient essayé d’y remédier par une meilleure législationpermettant Ì étude de la personnalité des jeunes délinquants, des causes sociales,

familiales ou individuelles, psychologiques et biologiques de leur chute Ils se sont

proposés d'opposer a ces causes un plan cohérent de dépistage et de relevement»®?.

Par ailleurs, les deux institutions spécialisées du 22 juillet 1912 ont démontré

leurs limites La spécialisation partielle du Tribunal pour enfants et adolescentsrendait le statut juridique de ]*enfant délinquant peu différent de celui de |’ adulte IIn’était pas vraiment un tribunal indépendant mais seulement une spécialisation de

audience du tribunal de premiére instance En effet, l'enfant délinquant

comparaissait devant des juges habitués a juger des adultes La différence s’estlimitée a certaines dispositions relatives 4 la procédure de |’audience L’ instruction

préparatoire concernant les mineurs était obligatoire pour tous types de procés, alors

que les procédures spécifiques telles que l’enquéte sociale ou le bilan de santé ne

“Joseph Magnol, |’Ordonnance du 2 février 1945 relative a la délinquance juvénile, Revue Scientifique

Pénale, 1946, p.7 « en seulement quatre ans, de 1939 à 1943, le nombre d’enfants délinquants en France est passé de 12.000 en 1939 a 34.000 enfants On estime méme que, selon certaines sources d’informations

50 000 ont été condamnés en 1943 ».

"Joseph Magnol I*Ordonnance du 2 février 1945 relative a la délinquance juvénile, cité supra, p.7

20

Trang 28

| ¿taient pes Par conséquent lorsque le juge d`instructon n`avait pas mené uneenquéte sociale auparavant, le juge de jugement ne pouvait pas rendre une décision

éclairée sur la personnalité du mineur Enfin, la mise en liberté surveillée restait une

disposition formelle inapplicable dans la pratique

I] faut reconnaitre que ces dispositions de |’ordonnance du 2 février 1945 se

sont inspirées de la « loi propre a la délinquance juvénile»TM, du 22 juillet 1942

k II: ‘i a š W ; : 5

promulguée sous le régime de Vichy, mais jamais entrée en vigueur®.

L’Ordonnance 174-45 du 2 février 1945 a été promulguée il y a maintenant

plus de soixante ans mais elle est toujours considérée comme « un code pénal

complet relatif au mineur délinquant» ou « une charte de la délinquance

juvénile »'“, Les grands principes de cette ordonnance sont toujours en vigueur,

c’est justement la raison pour laquelle nous n’évoquerons ici que les réformes lesplus significatives

Bien qu’elle ait fait l’objet de critiques sur plusieurs de ses aspects’, dans

ensemble l’ordonnance 174-45 du 2 février 1945 a laissé une marque profondedans |’évolution des dispositions pénales relatives a l’enfance délinquante francaise.L’ordonnance a d’abord annulé la distinction entre l|’enfant de moins de

treize ans et celui de plus de treize ans Cette différenciation résultant de la loi de

1912, ne permettait d’appliquer des mesures éducatives qu’aux seuls mineurs de

treize ans En revanche, |’enfant de treize à dix huit ans, pouvait étre jugé enfonction de son discernement, était exposé a la responsabilité pénale et pouvait étre

condamné méme s’il bénéficiait d’une peine atténuée De plus, les mineurs de seize

a dix huit ans encourraient des peines identiques a celles des adultes

L’ordonnance du 2 février 1945 apparait comme un texte applicable a tous

les mineurs délinquants de moins de dix huit ans qui, par principe ne peuvent étre

l'objet que des seules mesures de protection, d’ assistance, de surveillance et

“* Joseph Magnol, L’Ordonnance du 2 février 1945 relative a la délinquance juvenile, cité supra p.7

°Š Cette loi devait étre promulguée par une ordonnance quin’a pas été éditée Elle a perdu son effet

°° Jusqu’a présent, elle est toujours en vigueur (selon l’article 122-8 du Code Pénal Frangais de 1994) bien

qu'elle ait été l'objet de quelque réforme.

*” Joseph Magnol, L’ordonnance du 2 février 1945 relative a la délinquance juvénile, cite supra, p 7 et s

21

Trang 29

d’ education Pour autant enfant de treize ans et plus peut toujours étre condamné

a une peine que les juges considèrent nécessaire ; et méme, la situation de l’entant

de moins treize ans a pu apparaitre trẻs ambigué ; il faut en effet reconnaitre quel’institution de jugement du mineur a été concue de maniére plus spécialisée que ce

que proposait la loi de 1912, le tribunal pour enfants et le juge des enfants

apparaissant comme une combinaison exceptionnelle de fonction et decompétences

Lenquête sociale de I'enfant est enfin obligatoire, il s’agit d’une nouveauté

par rapport a la loi du 22 juillet 1912 Ces enquétes peuvent être menées par le juge

des enfants en personne ou sur commission rogatoire ; son résultat constitue le55

, z h 8

fondement du choix des mesures adaptées prononcées par le juge"”,

On se doit d’observer que lévolution du droit pénal et de la procédure pénalerelative à la délinquance du mineur est particuliére d’un pays a l’autre Jusqu’aux

années 70, la différence entre enfant et l’adulte délinquant au Vietnam se limitait à

des dispositions d’atténuation de la peine ; ces dispositions n’occupaient pas uneplace capitale parmi d’autres en droit pénal En Franee, a la fin de la Seconde

Guerre Mondiale, les dispositions relatives au mineur délinquant étaient évoluées

Cette évolution s’est_manifestée non seulement dans la loi de fond mais aussi dans

la loi de procédure ; du point de vue du droit penal, il s’agit de dispositions

d’atténuation de la peine ; du point de vue de la procédure, la création du Tribunalpour enfants et adolescents depuis 1912, et confirmé dans l’ordonnance de 1945, aassuré I’indépendance des juges des enfants, leurs fonctions et leurs compétences enfaisant l’une des plus importantes innovations du droit pénal frangais

°° Cendant lord “nance ne consacre pas les centres d’observation des mineurs suggérés ‘049 vn tí, ` ^§ centres étaient une institution placée auprés du tribunal, c par la loi de

omposés de spécialistes en

PSYCMwiugie, santé, cure) Li, et avaiens pes: =aCuoii de tester et d’évaluer état psychologique, médical et

biologique du délinquant mineur pendant I’instruction avant le jugement.

22

Trang 30

SECTION II : LES ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX

ET LA REALITE DE LA DELINQUANCE JUVENILE :

CONTEXTE CONTEMPORAIN

Jusqu’a présent, l’idée à toujours prévalu que la gestion de la délinquance

Juvénile s`inscrit dans une démarche qui, d’une maniére générale, place |’intérét de

69

‘ ion/0

l’enfant’” au-dessus de toute autre preoccupation

La réunificaton du Vietnam en 1975 doit étre considérée commel’événement marquant une nouvelle période de l’histoire législative vietnamienne

quant au traitement pénal du mineur délinquant Le systeme législatif du Vietnam

est conforme aux objectifs du nouveau régime qui entend respecter les normes

internationales dont le Vietnam est désormais signataire Le Viet Nam réunifié de

1975 a succéđé a I'ONU à la République du sud Viet Nam”

En France, la premiére moitié du XXe siécle a été le moment marquant pour

l*encadrement pénal de la délinquance juvénile C’était un moment ou le systémelégislatif interne traduisait un état d’esprit ; depuis s’y ajoutent les influences desdispositions internationales auxquelles la France a adhéré

SOUS - SECTION I : Les textes internationaux relatifs aux mineurs

délinquants : les exigences externes

Il existe un paradoxe : de nombreuses dispositions de droit pénal et deprocédure de la France relatives à la délinquance de l'enfant ont été promulguéesavant que les conventions internationales aient été signées et n’entrent en vigueur ”.Cependant, les conventions internationales relatives aux droits fondamentaux del’enfance délinquante ont exercé leur influence sur le système des dispositions

® Art.3-1 de la CIDE: « Pintérét supérieur de I’enfant doit étre une considération prImordiale»

” Jean Zermatten, L’intérét supérieur de l’enfant, de l’analyse littérale a la porté philosophique, Institut

international de |’enfant, mars 2003 ; et Rapport, Hammarberg Th., « Construire une Europe pour et avec les

enfants» et stratégie pour 2009-2011 », 15 juillet 2010.

” Le Vietnam a officiellement adhéré aux Nations Unies, le 20 septembre 1977

” Linstitution du Tribunal pour enfants et adolescents en France est apparue en 1912; voir supra

23

Trang 31

penales relatives aux mineurs interne En outre, pour des raisons d’ordre

,

: : 73 -

:gcographique, historique’, la loi pénale frangaise a été influencée par les exigences

des institutions européennes qui relévent de preoccupations plus concrétes

Le Viet Nam a ratifié plusieurs textes internationaux concernant les droitsdes mineurs en général et des mineurs délinquants en particulier, mais il sembleencore loin d’avoir répondu aux normes internationales relatives aux droits dumineur délinquant

§1 Les préconisations des législations internationales sur les droits relatifs auxmineurs délinquants

1/ L’exigence des textes au niveau mondial

On se doit d’observer que les principes fondamentaux imposés par les textes

internationaux pour le traitement de l'enfance délinquante coincident avec les

Principes fondamentaux relatifs aux droits de l’enfant et à leur retentissement en

procedure pénale Aujourd’hui, se développent des dispositions internationales

spécifiques pour assurer la protection de l’enfant Ainsi, en est — il des Régles deBeijing adoptées par I’ Assemblée generale des Nations — Unis dans sa Résolution

du 29 novembre 1985 TM: ainsi en est — il avec encore plus de netteté de laConvention internationale de droits de |’enfant”> du 20 novembre 1989 ou desprincipes directeurs de Riyad, adoptés par IONU dans sa Résolution du 14

décembre 1990”%,

Tạ L’esprit qui anime les motifs de l’ordonnance 174-45 du 2 février 1945 témoigne d’un engagement

particuliérement fort, notamment lorsque le texte observe que « La France n’est pas assez riche d’enfants

pour qu”elle ait le droit de négliger tout ce qui en fait des êtres sains».

Résolution 40/33 dite « Ensemble des régles minima des Nations Unis concernant i’administration de la justice pour mineurs ».

Ainsi, la Convention précise — t — elle dans son article 37 que le mineur ne saurait être soumis à la torture

ou a des traitements inhumains ou dégradants, qu’il ne saurait subir la peine capitale ni un emprisonnement a vie (point a), qu’il doit être traité avec humanité et respect en tenant compte des besoins de son Age, qu’il doit

étre resté en contact avec sa famille ; de méme l°art 37 (b) et l’art 40 -2 a font — ils expressément référence,

au respect du principe de |’égalité et à son droit au bénéfice d’une assistance juridique Enfin, le souci

concret de l’intérét de l'enfant est évident dans I’article 40 qui rappelle la présomption d’ innocence, I’art.40,

2, b, 1), la célérité et le caractère équitable de la procédure (art.40, 2, b, VII); et en fin la nécessité de

respecter la vie privée du mineur (art.40, 2, b, VII).

” Résolution 45/112 adoptée par I’Assemble générale de I*ONU sur la Prévention des mineurs délinquants,

de décembre 1990.

24

Trang 32

Dans ccs contextes l'enlant qualifié de délinquant présente lescaracteristiques de tout délinquant, c’est un enfant ou un adolescent condamné et

déclaré coupable d’infraction’” La condamnation d’un enfant délinquant a une

pcine reléve des lois pénales de chaque pays II en résulte des différences qui

proviennent de la divergence de l’approche de la conception de l'enfance

délinquante, de la définition des infractions, de la classification des délinquants ou

de la philosophie politique Š Malgré ces différences, les lois des Etats signataires se

doivent de respecter les principes relatifs aux mineurs délinquants imposés par des

textes internationaux auxquels ces Etats ont adhérés”’.

a/ Renforcement de la protection de la vie privée de l'enfant délinquant.

Les recherches criminologiques dans ce domaine ont montré les effets nocifsrésultant du fait que des jeunes soient une fois pour toute qualifiés de "délinquants"

ou de "criminels" dans la mesure ot ils sont particulièrement sensibles a la

qualification pénale”° Donc, ce principe traduit l'importance de la protection du

droit du mineur a leur vie privée*! interdisant, en cas de publication dans la presse,

d'informations sur leur affaire, qu’il soit fait mention de leur nom et de leursituation de prévenu ou condamné Par ailleurs, les archives concernant les jeunes

délinquants doivent être considérées comme strictement confidentielles et

incommunicables a des tiers; l'accès à ces archives est limité aux personnesdirectement concernées par le jugement de l'affaire en cause ou aux autrespersonnes dũment autorisées ; il ne pourra étre fait état des antécédents d'un jeune

délinquant dans des poursuites ultérieures contre adultes impliquant le méme

mineur®.

” Régles de Beijing, art.2.2.c

TM Jean Zermatten, La prise en charge des mineurs délinquants : quelques éclairages a partir des grands

textes internationaux et d'exemples européens, mars 2002, Institut international des droits de |’enfant.

” Reynald OTTENHOF, Aspects actuels de la minorité pénale, Archive de politique criminelle, 2008/1,

n°30, p 37 - 44.

*° ‘Théorie de la spécialisation ou de la libération

*' Règles de Beijing, art.8 prévoit que « le droit du mineur a la protection de sa vie privée doit étre respecté a

tous les stades afin d'éviter qu'il ne lui soit causé du tort par une publicité inutile et par la qualification

pénale » ; al - 2 : « aucune information pouvant conduire a Iidentification d'un délinquant juvénile ne doit étre publiée ».

”*Rèples de Beijing, art.21 Voir toutefois infra, les conditions de maintien des condamnations au casier

Judiciaire en droit francais, notamment depuis la réforme de 2004.

25

Trang 33

b/ Le droit des parents, du tuteur ou d'autres personnes de la famille a être

informés dès | arrestation du mineur

I] s’agit ici de tirer les conséquences logiques du rôle et de la responsabilité

primordiale des parents dans |’éducation de leur enfant”” Les conventions insistent

sur la participation des parents pendant toute la procédure pénale concernant leur

enfant, pourvu que leur présence ne nuise pas a |’ intérét de celui - ci Cela éveille la

conscience et la responsabilité parentales à l’égard de l°éducation de |’enfant et aideéventuellement les parents a appliquer des mesures éducatives plus efficaces Ainsi,

de nombreux pays menacent d’ailleurs de poursuites pénales les parents qui ont des

enfants délinquants

c/ La nécessité de considérer la peine de privative de liberté applicable au mineur

délinquant comme un dernier recours.

Evidemment, comme pour tout autre délinquant, pour des raisons d’ordre et

de sécurité publique ou pour la sécurité du délinquant lui-méme, il peut étre

nécessaire de priver de liberté le mineur délinquant Toutefois, il faut reconnaitre

que «par privation de liberté, on entend toute forme de détention,

d'emprisonnement ou le placement d'une personne dans un établissement public ouprivé dont elle n'est pas autorisée a sortir à son gré, ordonnés par une autorité

judiciaire, administrative ou autre »* ; ces mesures ne doivent étre appliquées

qu’en dernier recours et pour un délai le plus bref possible : « Ja privation de liberténest applicable au mineur délinquant que dans le cas d’atteinte a | intéprité

physique des personnes ou en cas de récidive et en labsence de mesure

adéquate »® Au point de vue du délai d’enfermement, la loi internationale impose

aux magistrats ou a toute personne concernée ayant une _ responsabilité

s8 Régles de Beijing, l'art 10.1 impose « dés qu'un mineur est appréhendé, ses parents ou son tuteur sont

informés immédiatement ou, si ce n'est pas possible, dans les plus brefs délais ».

”* Règles de La Havane, art I].b

*5 Règles de Beijing, I’art 17.1c prévoient « La décision de Ï'autorité compétente doit s'inspirer des principes

Suivants : a) La décision doit toujours étre proportionnée non seulement aux circonstances et a la gravité du

délit, mais aussi aux circonstances et aux besoins du délinquant ainsi qu’aux besoins de la société; b) II n'est apporté de restrictions a la liberté personnelle du mineur - et ce en les limitant au minimum - qu'aprés un

examen minutieux; c) La privation de liberté individuelle n'est infligée que si le mineur est jugé coupable d'un délit avec voies de fait a l'encontre d'une autre personne récidive et s'il n'y a pas d'autre solution qui convienne » ; d) Le bien-étre du mineur doit être le critère déterminant dans l'examen de son cas ».

26

Trang 34

institutionnelle d’examiner, a tout moment, en toute circonstance, la remise en

, , , an " 86

liberté du mineur détenu si la détention ne s’avére plus indispensable”

Par ailleurs, les Régles de la Havane*’ imposent aux Etats membres d'être

garants d’un régime spécifique pour les mineurs détenus ; par exemple, |’ obligation

de séparer les mineurs mis en examen de ceux qui sont condamnés et les mineurscondamnés des majeurs condamnés En outre, les Etats signataires doivents’engager a assurer |’éducation scolaire ou professionnelle des enfants pour leur

offrir de plus grandes chances de réussir leur réintégration sociale

Pour résumer, en comparant avec les délinquants majeurs, les institutions

internationales ont abordé globalement les procédures pénales relatives a l°enfantdélinquant moins dans un but répressif que éducatif et dans une perpective de

réinsertion sociale Les dispositions relatives à la protection des informationsconcernant la vie privée, |’appréciation du rôle parental, l’appréciation de

assistance juridique et de la nécessité d’une détention séparée, traduisent

explicitement l’importance de cette spécificité du statut du mineur délinquant IIs’agit « d’un couloir législatif» au niveau international qu’il appartient a chaque

pays de mettre en place en fonction de ses propres contraintes La Communauté

lšuropéenne confirme une telle propension du fait notamment d’un plus grandniveau d’expérience en matiére de traitement des délinquants dans les pays

démocratiques

% Régles de Beijing, l’art 17, cité supra.

*’Les articles 17, 18 de ces Régles prévoient que « Les mineurs en état darrestation ou en attente de

Jugement sont présumés innocents et traités comme tels La détention avant jugement doit être évitée dans la mesure du possible et limitée a des circonstances exceptionnelles Par conséquent, tout doit étre fait pour appliquer d'autres mesures Si toutefois le mineur est détenu préventivement, les tribunaux pour mineurs et les parquets traiteront de tels cas avec la plus grande diligence pour que la détention soit aussi brève que

possible Les mineurs détenus avant jugement devraient étre séparés des mineurs condamnés Et les

conditions dans lesquelles un mineur non jugé est détenu doivent étre compatibles avec les régles énoncées ci- dessous, sous réserve de dispositions spéciales jugées nécessaires et appropriées en raison de la présomption d'innocence, de la durée de cette détention, de la situation légale du mineur et des circonstances Ces dispositions seraient les suivantes, sans que cette liste soit nécessairement limitative:

a) Les mineurs doivent avoir droit aux services d'un avocat et pouvoir demander une assistance judiciaire lorsque celle-ci est prévue et communiquer réguliérement avec leur conseil Le caractére privé et confidentiel

de ces communications devra étre assuré;

b) Dans la mesure du possible, les mineurs pourront travailler, contre rémunération, étudier ou recevoir une

formation, sans y étre tenus Ce travail, ces études ou cette formaticn ne doivent pas entrainer la prolongation

de la détention;

27

Trang 35

2/ Les exigences plus concrètes des institutions européennes relatives auxprocedures pénales applicables a l’enfance délinquante.

« Le champ institutionnel européen incite a renforcer la conviction quel’enfant, étre vulnérable et en devenir est, au sein des pays membres de l'Unioneuropéen et du Conseil de |’Europe, objet de valeurs fortes et naturellement

partagées»"" Les principes qui gouvernent les solutions européennes ne sont pas

différents des solutions retenues par les normes mondiales®’ ; même préoccupations, méme orientations et méme incitations” Par exemple: Pexigence de

l’enregistrement vidéo des interrogatoires du juge d’instruction ou la mise en place

des structures d’ assistance éducative pour enfant” Pourtant, on percoit de plus en

plus souvent, un décalage entre les normes européennes et les solutions que les

Etats européens tendent 4 mettre en place” II est clair que, au niveau européen, la

délinquance juvénile est devenue, en quelques années, un facteur d’inquiétude,

générateur d’un sentiment d’insécurité

a/ Le seuil d’age de la responsabilité pénale chez le mineur délinquant

Selon la recommandation 2003-20 du Comité des Ministres du Conseil de

l’Europe, « D’une part, la loi émet I’idée que les adolescents doivent étre tenusresponsables de leur conduite illicite et que la société a le droit de se protéger

contre une telle conduite, D’autre part, elle reconnait que les adolescents ont desbesoins spéciaux et qu’ils ne sauraient, dans tous les cas étre assimilés aux adultes

quant à leur degré de développement et de maturité” Suivant cet esprit, les Etats

membres de la Communauté Européenne admettent que « /'enfant d’aujourd ‘hui est

le monde de demain, c est pourquoi toutes les mesures qui leur sont appliquées

doivent être a but éducatif » et «la loi pénale doit continuer a concrétiser le but

** Georges Fournier, Quelle responsabilité pour l'enfant en droit européen ?, in Le statut juridique de

l'enfant dans I 'espace européen, éd BRUYLANT, 2004, p 363.

® Ainsi, l’art.10 de la Recommandation 2003 ~(20) du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe

précise-t- elle prend en compte la Convention des Nations Unies relative aux droits de |’enfant et les Règles de Beijing.

” Georges Fournier, Quelle responsabilité pour l'enfant en droit européen, op.cit p.372

”' Recommandation 1987 (20), dont l’article 16 impose aux nations signataires d’« assurer un soutien

éducatif après la fin de l’incarcération et éventuellement un appui à la réinsertion sociale des mineurs ».

” Bailleau F et Cartuyvels Y., La Justice pénale des mineurs en Europe Entre modéle Welfare et inflexions

néo-libérales, éd.Harmattan, Déviance et Société, collection "logiques Sociales", 2007.

”* Recommandation 2003 -20 du Comité des Ministres du Conseil de Europe

28

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éducatif et de réintégration sociale de I ‘enfant»” Afin d’assurer ce but, le Conseil

de Europe recommande aux institutions judiciaires des Etats membres de s`assurer

de Vopportunité des poursuites pénales engagées a l’encontre des mineurs et de

veiller à ce que le proces du mineur se déroule rapidement, en évitant les délais

inutiles et en recherchant des mesures éducatives efficaces” Pourtant, aucune

norme européenne commune ne fixe l’4ge minimum pour que la responsabilité d’un

enfant et notamment sa responsabilité pénale, puisse étre engagée” Dans sa

recommandation, le Comité des ministres du 24 septembre 2003 n’aborde cettequestion que par une formule inhabituelle et indirecte en considérant que « Je ferme

mineur désigne les personnes ayant atteint l'âge de la responsabilité pénale, mais

n-ayant pas atteint celui de la majorité I] s’agit là dune définition technique

finalement assez soucieuse d'un régime pénal spécifique pour les enfants »’’.

b/ Les garanties procédurales spécifiques

Le droit d’informer les parents ou les tuteurs doit étre respecté S’agissant

notamment des causes d’un placement ou une détention du mineurŠ.

Par ailleurs, le droit d’étre défendu par un avocat ct le droit de consulter un médecn immédiatement après l'arrestaion” sont considérés comme

particulièrement importants par le Conseil de l’Europe’”’ En fait, le Conseil de

lEurope encourage les Etats membres 4 aller plus loin en mettant en place des

réglements de protection des droits de l’enfant privé de liberté, et considèrent

« qu'il est souhaitable que le mineur ne puisse étre interrogé en l'absence d’un

proche ou d'un avocat » '°', C’est un grand progrés de la Communauté Européenne

tendant vers une protection de I’ assistance législative maximale pour |’enfant, dans

le but d°éviter les abus de pouvoir des institutions

°4 Recommandation européenne | 987 (20), préambule

*SRecommandation européenne 1987 (20), art 4.

*°Massias F., Les seuils d'âge de la responsabilité pénale et la peine, Rev Trim.dr h 2002, p 129 et s

*” Georges Fournier, Quelle responsabilité pour |'enfant en droit européen ?, op.cit p 372

*® Ce réglement est obligatoire pour les établissements pénitentiaires, |’enfant et sa famille doivent étre en

mesure de porter plainte contre tout retard.

*” 9° rapport du Comité européen pour la prévention de la torture 1990

'° L"art 8 de la Recommandation européenne 1987 (20) impose aux pays signataires de renforcer la

Position légale du mineur tout au long de la procédure, y compris au stade policier en reconnaissant

«assurer le droit a |’assistance d’un défenseur ».

'91 0e rapport du Comité européen pour la prévention de la torture, 1990

29

Trang 37

Enfin, la question de l’impartialité du juge des enfants au cours de la

, s2 13-1: ca: No SH 102

procédure a été l’objet de réflexions très vives en France et dans d’autres pays de

la Communauté Européenne En droit commun, la répartition entre le pouvoir

d'instruction préparatoire et le pouvoir d’instruction définitive est indispensable

dans la procédure pénale Cela est considéré comme une garantie de |’impartialité

du juge Dans I’affaire Nortier c/ Pays bas, du 24 aoôt 1993, le requérant, mineur a

l*époque des faits, reprochait au juge qui avait été a la fois magistrat d’ instruction et

de jugement d’avoir manqué à son obligation d’impartialité au sens de I’article 6-1

de la Convention européenne de droit de l’Homme ; la Cour a rejeté le recours “3,

consacrant ainsi implicitement la spécificité des juges des enfants à la fois en charge

de l’instruction et du jugement des mineurs'*.

c/ Les sanctions applicables aux mineurs délinquant

On peut observer que les dispositions européennes n’énumérent pas en détailles peines applicables au mineur mais définissent seulement des principesgénéraux : encourager les peines et les mesures éveillant la volonté du mineur,promouvant des mesures de réintégration sociale, interdisant les châtimentscorporels et réduisant ]’isolement de |’enfant pour ne pas lui nuire physiquement et

psychologiquement

Concernant la privation de liberté, les normes européennes affirment encoreune fois que seuls les pouvoirs judiciaires peuvent décider d’une peine de privation

de liberté pour les délinquants mineurs ; et que le maintien en détention du mineur

ne peut se justifier que si l’on peut établir qu’il fait courir un danger a autrui Pourdécider de l’application d’une peine, les Etats membres doivent tenir compte de

l’dge de l’enfant et de la conviction que les conditions pénitentiaires sont favorables

'92Jean Chazal, « L’institution du juge des enfants », Rev.sc.crim, 1956, p 780 et s, cité par Jean — Francois

Renucci, Droit pénal des mineurs MASSON 1994; Pierre Pedron, Traitement de la délinquance des mineurs : pour une rationalisation du droit et des pratiques éducatives sur le fondement des propositions de la

Commission Varinard, Revue pénitentiaire 2009, p.16 et s.

'°3La CEDH, dans sa décision, refuse de voir dans le seul fait que le méme juge ait pu prendre des mesures

d’instruction et des mesures applicables à un mineur, une atteinte au principe d’impartialité de l'art.6 et que

«sĩ les inquiétudes du suspect, pour compréhensibles qu’elles puissent être ne constituent pas |’élément

déterminant: i] échait avant tout d’établir si elles peuvent passer pour objectivement justifiées, en l"occurrence que Jes décisions prises par le juge « ne coincidaient pas avec les mesures qu’ il avait prises ».

m4 IC Soyer, Commentaire sous |’ article 6 de la Convention, in L —E Pettiti, Decaux E et Imbert, J-P, p 239

et s not, p.261 et Georges Fournier., Quelle responsabilité pour Ì 'enfant en droit européen, préci p 375.

30

Trang 38

a son développement En fait, la privation de liberté au mineur ne doit êtreconsidérée comme nécessaire que pour la recherche des preuves et lorsque lasécurité de l’accusé et de la société l’exige ; mais |’enfant doit être immédiatement

libéré, sans retard, « s 7l n'est plus dangereux »'°° D’ ailleurs, la Cour européenne, a

su faire savoir qu’elle attendait des Etats que si une mesure de privation de liberté

s’imposait a l’égard d’un mineur ce ne pouvait être que dans une perspective, ]

éducative 6.

Ainsi, nous pouvons constater que les institutions européennes ont tenu

compte des exigences des conventions internationales relatives a lenfance

délinquante Cependant, certaines de ces dispositions vont a l’encontre des

conventions internationales, s’agissant notamment de la détermination du seuild”âpe pénal En principe, le seuil d°âpe pénal est celui selon lequel Jes mineurs, au

moins a partir d'un certain age, sont punissables, et celui qui les fait sortir du droit

pénal pour les soumettre a des simples mesures de stireté'*’ Mais plusieurs Etats européens!ont supprimé ce seuil d’age et dans les textes législatifs correspondants

de la Communauté Européenne, il n’y en a aucune qui fixe un 4ge minimum, au

moins celui permettant d’imputer une responsabilité pénale au moment de

l’infraction'”’ On doit donc reconnaitre que le mouvement des nations n’est pas

homogéne et méme dans certains cas, observer que de très jeunes enfants peuvent

être mis en examen!!9,

"5 Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté adoptées par I'Assemblée

générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990: « Toute personne privée de sa liberté par la détention, a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue a bref délai sur la légalité de

sa détention et ordonne sa libération si sa détention est illégale»

°° Affaire D.G c/ Irlande, le 16 mai 2002 de la Cour observe que « aucun élément n’ayant été avancé pour

justifier une telle pratique l’internement » d’un mineur était incompatible avec I’art 5-1 de la Convention.

'°7 Jean Pradel, Droit pénal comparé, deuxiéme édition, p.739

'°8 Larticle 37 de la loi 1965 de la Belge relative a la protection de la jeunesse prévoit que les mineurs

déférés au tribunal de la jeunesse peuvent faire l'objet de "mesures de garde, de préservation et d‘éducation" Aucune sanction pénale ne peut être prononcée a leur encontre Cependant, dans certains cas, lâge de la responsabilité pénale peut étre abaissé a seize ans, car l'article 38 de cette loi précise que, compte

tenu de linffaction commise, si le tribunal de la jeunesse estime inadéquates les mesures prévues par

l'article 37, il peut renvoyer le mineur âgé de plus de seize ans et de moins de dix-huit ans devant la Juridiction de droit commun Cf infra, sur l’art 122-8 du Code pénal francais qui rend pénalement

responsables les mineurs qui ont une capacité de discernement.

°F Massias, « Le seuil d’age de la responsabilité pénale et la peine », Rev Trim.dr.h.2002, pp.129 et s

Voir la synthése des solutions retenues par différents pays européens dans le rapport au Sénat sur /a

responsabilité pénale des mineurs de 1999, cité supra.

!9 Roselyne Nérac — Croisier, Le mineur et le droit pénal, L’Harmattan, 1997, p, 133

31

Trang 39

§2 La conformité du droit pénal francais et du droit vietnamien aux normes

internationales

Conformément a |’exigence des dispositions internationales en traitant de laresponsabilité pénale du mineur délinquant, le législateur vietnamien a tranchéclairement la difficile question de la responsabilité pénale du mineur délinquant

mais il s’est montré trés peu préoccupé du statut procédural du mineur; en

revanche, en droit frangais, les institutions judiciaires spécifiques ont vraimentévolués et que méme si cela n’est pas fait sans débat, il n’y a pas en certaines entre

vraiment de rupture de la longue de gestion pénale des mineurs

1/ Le seuil d’Age et la responsabilité pénale de la délinquance juvénile

Si dans le code pénal vietnamien, le seuil d’Age et de la responsabilité pénale

du mineur délinquant est précisément et explicitement fixé, par contre le droitfrancais n’a fixé qu’un critére imprécis, ce que certains auteurs considérent comme

un exemple de finesse et de souplesse' !!,

On la wu au Vietnam, le seuil d°âge est de quatorze ans Selon l’article 12 ducode pénal de 1999, lorsque le délinquant a moins de quatorze ans, les institutions

Judiciaires rendent une ordonnance de classement sans suite et transférent le mineur

aux institutions administratives pour lui appliquer « des mesures administratives

éducatives » S’il a de quatorze a seize ans, le code pénal prévoit qu’il ne doitassumer sa responsabilité pénale que dans certains cas A partir de seize ans,l’adolescent doit assumer pleinement la responsabilité de ses actes mais il peutbénéficier de peines atténuantes Pourtant, si les magistrats considérent que lapoursuite n’est pas nécessaire, ils peuvent décider de l°application d’une mesure

administrative, ou d’une remise judiciaire aux parents

Le droit francais, a regu en héritage la référence au discernement de |’anciendroit dians la loi du 22 février 1912

'" Christine Lazerges, Lecture du rapport Varinard, RSC n° 1 2009, p 226 et s Selon l’auteur « Des 7 ou 8

ans environ, un enfant reléve du système pénal mais jusqu à 10 ans, il ne peut faire l'objet que des mesures

educatives, dès 10 ans le prononcé de mesures éducatives devient être possible, à 13 ans, une peine

proprement dite peut étre prononcé De 13 a 16 ans, la diminution de peine est de droit, au-dela de 16 ans, elle peut ou méme droit étre refusée par Ja juridiction de jugement ».

32

Trang 40

L `Ordonnance de 1945 initiale avait certes abandonné cette référence etnavait pas fixé explicitement de seuil d’dge C’est ce changement qui a engendrédes interprétations différentes quant a la détermination du seuil de la responsabilitépénale de mineur, et qui a suscité des applications divergentes des dispositions decette Ordonnance, en particulier pour l’enfant de moins de treize ans.

L’article 2 de l?Ordonnance prévoit que « Je tribunal pour enfant et la courd'assises des mineurs prononceront suivant les cas des mesures de protection,d’assistance, de surveillance, et d’éducation qui sembleront appropriées et ils

pourront cependant, lorsque les circonstances et la personnalité du mineur

l’exigent, prononcer une peine a l'encontre des mineurs de treize a dix-huit ans en

tenant compte de |atténuation de leur responsabilité pénale » Ainsi, a travers cettedisposition, l’application des mesures exclusivement éducatives à tout mineur

Jusqu'à l°âpe de dix-huit ans est un principe Toutefois, |’enfant de treize a dix huit

ans peut subir une peine si les circonstances et sa personnalité le justifient

Pourtant, les dispositions de l’Ordonnance de 1945 n’apporte pas uneréponse satisfaisante et suffisante 4 la question du fondement de la responsabilitépénale du mineur, alors même que le texte prévoit que « les mineurs auxquels estimputée une infraction qualifiée crime ou délit ne seront pas déférés aux

Juridictions de droit commun, ne seront justiciables que des tribunaux ou des coursd'assises des mineurs » Cet article ne prévoit en effet qu’une différenciation entre

magistrat de droit commun et magistrat spécifiquement en charge des mineursdélinquants ; i] ne dit qu’une chose, c’est que l’enfant n’est pas traité par les

institutions procédurales de droit communs mais par des institutions procéduralespénales spécifiques Le seuil d’age de ce traitement spécifique n’est pas déterminé

Cette ambiguité n’a pas été sans conséquence

Certains auteurs ont estimé que les mineurs de treize ans ne pouvaient en

aucun cas étre frappés d’une condamnation mais relevaient exclusivement desmesures de resocialisation car la simple commission matérielle d’un acte interdit par

la loi pénale ne suffisant pas pour qu’une infraction puisse étre imputée a un

mineur sans qu’il soit nécessaire de se référer au discernement ; ainsi un nouveau-né

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Ngày đăng: 27/05/2024, 13:20

TÀI LIỆU CÙNG NGƯỜI DÙNG

TÀI LIỆU LIÊN QUAN

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