Raison de choix du sujet
Une recherche n‟est pas quelque chose d‟évident, elle ne peut pas être réussie si elle ne vient pas de l‟intérêt et des motivations personnelles de son auteur
Les titres des articles de journaux, depuis le début de mes études post- universitaires, sont toujours un des sujets qui me rendent curieuse La presse, ayant une grande influence sur la faỗon de penser et le point de vue des lecteurs, est donc considérée comme un des discours dominants de notre époque Les titres, qui ont deux fonctions : résumer tout l‟article et/ou attirer l‟attention, sont utilisés comme une invitation, une incitation à lire, mờme un hameỗon pour certains cas C‟est pourquoi nous voudrions étudier, dans cette recherche, quelles sont les stratégies des journalistes en crộant ce type d‟ ô hameỗon ằ
Il existe maintenant des milliers quotidiens et magazines en France mais un des journaux les plus connus et prestigieux, c‟est toujours ô Le Monde ằ Crộộ en
1944, depuis plusieurs décennies, ce quotidien devient un journal de référence qui est diffusé dans beaucoup de pays, même dans les non-francophones C‟est pourquoi nous voulons prendre les titres de ses articles comme corpus pour pouvoir chercher les stratégies des journalistes.
Questions de recherche
La plus grande question qui s‟est posée à nous alors était la suivante :
Comment utilisent les journalistes du Monde les procédés linguistiques dans les titres des articles pour un tel nombre de lecteurs ?
Hypothèses
Les procộdộs linguistiques et discursifs qui vont apparaợtre dans les titres des articles de journaux sont comme ceux des autres types de discours : les modalités de l‟énonciation, de l‟énoncé ou les thématisations,… Mais pour créer les titres intộressants dans ô Le Monde ằ, les journalistes ne peuvent pas appliquer trop servilement les procédés mentionnés dans la partie du cadre théorique Ils peuvent les combinent avec d‟autres stratégies qu‟on ne trouve pas encore dans la théorie.
Objectifs
- Étudier la théorie de l‟analyse du discours et des théories d‟énonciation
- Savoir comment ces théories sont appliquées dans le discours de la vie quotidienne, dans les titres des articles de journaux en commun et ceux du ô Monde ằ en particulier
- Connaợtre la tendance d‟utilisation des procộdộs linguistiques dans chaque rubrique de quelques journaux franỗais de nos jours.
Méthodologie
Pour répondre aux questions de recherche, nous recourrons à deux corpus dont les bases de données sont les titres des articles en faisant l‟hypothèse que les traces des outils linguistiques et discursifs y sont représentées Nous avons procédé d‟abord à la constitution d‟un premier corpus qui englobe des titres que nous trouvions intéressants dans toutes les rubriques dans les journaux ou magazines que nous avons consultés depuis mai jusqu‟à octobre 2015 Cela nous a aidé à acquérir une vue globale sur les stratégies qui, utilisées par les journalistes dans les titres de plusieurs aspects de la vie, vont être choisies comme notions pour former notre base théorique
Le deuxième corpus, que nous présentons dans l‟annexe, est une collection de cent vingt titres des articles qui viennent de douze rubriques du journal numérique lemonde.fr Afin de garantir l‟objectivité, les titres sont choisis par hasard selon la date : dix titres parus aux différentes années pour chaque rubrique
Il est indéniable qu‟on ne pouvait pas trouver dans ce premier corpus toutes les stratộgies, le corpus principal va donc nous permettre de vộrifier les ô anciennes ằ stratộgies et d‟en dộcouvrir de ô nouvelles ằ
La méthode que nous recourons dans notre recherche est la méthode descriptive Comme déjà représentée par son nom, cette méthode aide le chercheur à présenter une situation, à décrire, à présenter les circonstances, à fournir une image prộcise d‟un phộnomốne ou d‟une situation particuliốre ô La recherche descriptive est associée aux hypothèses de recherche statistique, c‟est-à-dire celles qui posent des questions sur les ộtats plutụt que sur les changements d‟ộtats ằ (Nguyen Quang Thuan, 2007, p.38) Alors à travers le corpus qui compose des titres sélectionnés, nous allons dresser un tableau combiné des unités de l‟analyse du discours et des théories énonciatives qui donnerai une vision plus générale par la statistique, le pourcentage de chaque unité utilisée dans les titres dans la presse.
Plan du mémoire
Par rapport aux questions posées afin de résoudre la problématique, nous avons divisé notre recherche en trois parties principales
Le premier chapitre va s‟interroger sur le cadre théorique dans lequel figurent les notions de l‟analyse du discours et des théories énonciatives qu‟on a trouvées dans l‟approche du premier corpus : il s‟agit des modalités de l‟énonciation et de l‟énoncé D‟ailleurs, plusieurs titres se composent de la formule ô sujet – prộdicat ằ ou de guillemets qui ne font pas partie des modalitộs
C‟est pourquoi nous tenons également à aborder les thématisations et les modes de citations dans une sous-partie de même niveau que les deux parties sur les modalités
Avant d‟entrer dans l‟analyse du corpus, il nous a semblé aussi nécessaire de procéder d‟abord dans le deuxième chapitre à une petite présentation du journal ô Le Monde ằ pour mieux comprendre le contexte, l‟environnement dans lesquels les articles de journaux et leurs titres fonctionnent Nous allons expliquer plus précisément notre choix et son résultat La dernière sous-partie est exclusivement destinée à l‟analyse des titres des articles présentés dans le corpus en se basant sur les théories présentées dans la partie précédente Nous essayerons de trouver des autres stratégies auxquelles les journalistes ont recouru dans les titres choisis
Notre recherche porte sur les titres des articles de journaux qui, on le sait, en tant que formules brèves, obéissent à un type de discours spécifique Ce choix s‟explique par l‟abondance et la variộtộ des titres dans la presse franỗaise notamment Elle frappe notre esprit, nous impressionne et attire les yeux
Afin de mieux comprendre ce discours, il nous semble important de faire appel aux théories qui nous ont semblé les plus utiles pour cet objectif, à savoir les théories énonciatives, les théories et outils de l‟analyse du discours
1.1 Présentation générale de l’Analyse du discours ô Faire de l‟analyse du discours, c‟est apprendre à dộlinộariser le texte pour restituer sous la surface lisse des mots la profondeur enchevêtrée des indices d‟un passộ ằ (Courtine, 1989, p.37)
En se présentant ainsi comme l‟un des éléments indispensables dans les sciences sociales et humaines mais en s‟opposant à l‟analyse de contenu, l‟analyse du discours (couramment abrévié AD) ne traite pas la question de ce que le texte dit mais plutôt comment il le dit, autrement dit elle porte sur les marques énonciatives, sur les liens qui unissent le destinateur et le destinateur, ou encore sur le contrat qui les lie dans une situation particulière Comme l‟affirme J
Marandin (1979, p.18) : ô ce qui distingue l‟analyse du discours d‟autres pratiques d‟analyse du texte, c‟est l‟utilisation de la linguistique ằ
Nộanmoins le terme de ô discours ằ, qui est au centre de cette discipline, varie selon les contextes et est une notion complexe dont la signification a besoin d‟être précisée Ainsi dans la vie courante, par exemple, il peut être utilisé pour parler d‟un énoncé solennel, prononcé lors d‟événements particuliers, devant une grande audience Il peut ờtre perỗu comme quelque chose de nộgatif, ô il fait des discours, beaucoup de discours mais n‟agit pas ằ
Ce n‟est pas ce sens qui nous intéresse dans ce mémoire, notre objet d‟étude s‟inscrit dans les approches des sciences du langage ó la notion de ô discours ằ, est beaucoup plus complexe, dộfinie par des multiples courants linguistiques qui se complètent mais parfois s‟opposent l‟un l‟autre Dans
L’Analyse du discours (1991, p.15), Dominique Maingueneau cite au moins sept emplois du terme ô discours ằ depuis la fin des annộes 1960 :
Discours 1 : ộquivalent de la ô parole ằ (l‟usage de la langue par un individu donnộ selon des contextes) de l‟opposition ô langue / parole ằ de Saussure
Discours 2 : tout ộnoncộ supộrieur à la phrase, ộquivalent du ô texte ằ
Discours 3 : au point de vue des théories de l‟énonciation ou de la pragmatique, en comparaison avec l‟ộnoncộ, le ô discours ằ insiste plus sur le caractère dynamique de l‟énonciation, son pouvoir faire agir l‟autre dans sa dimension interactive
Discours 4 : ộquivalent de la ô conversation ằ, de l‟interaction orale
Discours 5 : l‟opposition de ô langue / discours ằ comme ô un systốme virtuel de valeurs peu spécifiées, à une diversification superficielle liée à la variộtộ des usages qui sont faits des unitộs linguistiques ằ
Discours 6 : on entend parler souvent de ô discours politique ằ, ô discours fộministe ằ ou ô discours administratif ằ, etc Dans ce cas le terme dộsigne le système qui donne une même vision du monde à un ensemble d‟énoncés à partir d‟une certaine position sociale ou idéologique
Discours 7 : l‟AD dộfinit son objet en recourant l‟opposition de ô ộnoncộ / discours ằ de L Guespin (1971, p.10 ; citộ in Maingueneau 1991, p.11) : ô L‟ộnoncộ, c‟est la suite des phrases ộmises entre deux blancs sémantiques, deux arrêts de la communication ; le discours, c‟est l‟énoncé considéré du point de vue du mécanisme discursif qui le conditionne ằ
L‟AD et les chercheurs qui s‟en réclament, comme nous l‟avons présenté ci-dessous, s‟ouvrent, d‟un point de vue ộpistộmologique et de faỗon progressive, à d‟autres disciplines du discours comme les théories énonciatives, la pragmatique linguistique, les théories de l‟interaction ou encore l‟argumentation 1 Différents courants, qui vont donc s‟y croiser, vont l‟enrichir ; les plus connus sont : les approches énonciative, communicationnelle, conversationnelle, pragmatique
Nous suivrons l‟une de ces extensions qui nous semble la plus pertinente pour notre projet Nous souhaitons en effet croiser ces différents courants afin de mieux appréhender les titres de presse et aborder tout d‟abord l‟approche énonciative
1.2 Enonciation/Enoncé ou approche énonciative
Parler de l‟énonciation, c‟est nécessairement évoquer Emile Benveniste dont les travaux synthétisent l‟approche des deux notions énonciation / énoncé : L‟ộnonciation, ô c‟est la mise en fonctionnement de la langue par un acte individuel d‟utilisation ằ (Benveniste, 1970, p.12) De fait, l‟ộnonciation met en évidence l‟émergence du sujet dans l‟énoncé, la relation qu‟il entretient avec son interlocuteur, son attitude par rapport à son propos ou énoncé En résumé, ô l‟ộnonciation ằ est un acte de crộer, de produire, d‟utiliser la langue, de la mettre en œuvre, en action tandis que ô l‟ộnoncộ ằ est le rộsultat de cet acte Les deux termes s‟opposent donc comme la fabrication de l‟objet et l‟objet fabriqué
Avant d‟entrer dans les deux premières sous parties, il me semble nộcessaire de mieux comprendre la notion de ô modalitộ ằ
Pour expliquer ce qu‟est la ô modalitộ ằ en sciences du langage, on a coutume de rappeler l‟opposition entre ô modus ằ et ô dictum ằ posộe par C Bally
(1965) Selon lui, la modalitộ, appelộe modus, est dộfinie comme ô la forme linguistique d‟un jugement intellectuel, d‟un jugement affectif ou d‟une volonté qu‟un sujet pensant énonce à propos d‟une perception ou d‟une représentation de son esprit ằ tandis que le dictum est ộquivalent au contenu Une absence totale de modalité correspond à un jugement de la réalité, montre alors la vérité telle qu‟elle existe
Les travaux dans ce domaine permettent de distinguer deux types de modalité :
CADRE THÉORIQUE
Présentation générale de l‟Analyse du discours
ô Faire de l‟analyse du discours, c‟est apprendre à dộlinộariser le texte pour restituer sous la surface lisse des mots la profondeur enchevêtrée des indices d‟un passộ ằ (Courtine, 1989, p.37)
En se présentant ainsi comme l‟un des éléments indispensables dans les sciences sociales et humaines mais en s‟opposant à l‟analyse de contenu, l‟analyse du discours (couramment abrévié AD) ne traite pas la question de ce que le texte dit mais plutôt comment il le dit, autrement dit elle porte sur les marques énonciatives, sur les liens qui unissent le destinateur et le destinateur, ou encore sur le contrat qui les lie dans une situation particulière Comme l‟affirme J
Marandin (1979, p.18) : ô ce qui distingue l‟analyse du discours d‟autres pratiques d‟analyse du texte, c‟est l‟utilisation de la linguistique ằ
Nộanmoins le terme de ô discours ằ, qui est au centre de cette discipline, varie selon les contextes et est une notion complexe dont la signification a besoin d‟être précisée Ainsi dans la vie courante, par exemple, il peut être utilisé pour parler d‟un énoncé solennel, prononcé lors d‟événements particuliers, devant une grande audience Il peut ờtre perỗu comme quelque chose de nộgatif, ô il fait des discours, beaucoup de discours mais n‟agit pas ằ
Ce n‟est pas ce sens qui nous intéresse dans ce mémoire, notre objet d‟étude s‟inscrit dans les approches des sciences du langage ó la notion de ô discours ằ, est beaucoup plus complexe, dộfinie par des multiples courants linguistiques qui se complètent mais parfois s‟opposent l‟un l‟autre Dans
L’Analyse du discours (1991, p.15), Dominique Maingueneau cite au moins sept emplois du terme ô discours ằ depuis la fin des annộes 1960 :
Discours 1 : ộquivalent de la ô parole ằ (l‟usage de la langue par un individu donnộ selon des contextes) de l‟opposition ô langue / parole ằ de Saussure
Discours 2 : tout ộnoncộ supộrieur à la phrase, ộquivalent du ô texte ằ
Discours 3 : au point de vue des théories de l‟énonciation ou de la pragmatique, en comparaison avec l‟ộnoncộ, le ô discours ằ insiste plus sur le caractère dynamique de l‟énonciation, son pouvoir faire agir l‟autre dans sa dimension interactive
Discours 4 : ộquivalent de la ô conversation ằ, de l‟interaction orale
Discours 5 : l‟opposition de ô langue / discours ằ comme ô un systốme virtuel de valeurs peu spécifiées, à une diversification superficielle liée à la variộtộ des usages qui sont faits des unitộs linguistiques ằ
Discours 6 : on entend parler souvent de ô discours politique ằ, ô discours fộministe ằ ou ô discours administratif ằ, etc Dans ce cas le terme dộsigne le système qui donne une même vision du monde à un ensemble d‟énoncés à partir d‟une certaine position sociale ou idéologique
Discours 7 : l‟AD dộfinit son objet en recourant l‟opposition de ô ộnoncộ / discours ằ de L Guespin (1971, p.10 ; citộ in Maingueneau 1991, p.11) : ô L‟ộnoncộ, c‟est la suite des phrases ộmises entre deux blancs sémantiques, deux arrêts de la communication ; le discours, c‟est l‟énoncé considéré du point de vue du mécanisme discursif qui le conditionne ằ
L‟AD et les chercheurs qui s‟en réclament, comme nous l‟avons présenté ci-dessous, s‟ouvrent, d‟un point de vue ộpistộmologique et de faỗon progressive, à d‟autres disciplines du discours comme les théories énonciatives, la pragmatique linguistique, les théories de l‟interaction ou encore l‟argumentation 1 Différents courants, qui vont donc s‟y croiser, vont l‟enrichir ; les plus connus sont : les approches énonciative, communicationnelle, conversationnelle, pragmatique
Nous suivrons l‟une de ces extensions qui nous semble la plus pertinente pour notre projet Nous souhaitons en effet croiser ces différents courants afin de mieux appréhender les titres de presse et aborder tout d‟abord l‟approche énonciative.
Enonciation/Enoncé ou approche énonciative
Parler de l‟énonciation, c‟est nécessairement évoquer Emile Benveniste dont les travaux synthétisent l‟approche des deux notions énonciation / énoncé : L‟ộnonciation, ô c‟est la mise en fonctionnement de la langue par un acte individuel d‟utilisation ằ (Benveniste, 1970, p.12) De fait, l‟ộnonciation met en évidence l‟émergence du sujet dans l‟énoncé, la relation qu‟il entretient avec son interlocuteur, son attitude par rapport à son propos ou énoncé En résumé, ô l‟ộnonciation ằ est un acte de crộer, de produire, d‟utiliser la langue, de la mettre en œuvre, en action tandis que ô l‟ộnoncộ ằ est le rộsultat de cet acte Les deux termes s‟opposent donc comme la fabrication de l‟objet et l‟objet fabriqué
Avant d‟entrer dans les deux premières sous parties, il me semble nộcessaire de mieux comprendre la notion de ô modalitộ ằ
Pour expliquer ce qu‟est la ô modalitộ ằ en sciences du langage, on a coutume de rappeler l‟opposition entre ô modus ằ et ô dictum ằ posộe par C Bally
(1965) Selon lui, la modalitộ, appelộe modus, est dộfinie comme ô la forme linguistique d‟un jugement intellectuel, d‟un jugement affectif ou d‟une volonté qu‟un sujet pensant énonce à propos d‟une perception ou d‟une représentation de son esprit ằ tandis que le dictum est ộquivalent au contenu Une absence totale de modalité correspond à un jugement de la réalité, montre alors la vérité telle qu‟elle existe
Les travaux dans ce domaine permettent de distinguer deux types de modalité :
- Les modalités de l‟énonciation qui marquent la relation entre les acteurs de l‟échange et montrent les caractéristiques relationnelles qui les lient La modalité de l‟énonciation prennent des formes diverses, elle peut être interrogative, déclarative, assertive…
- Les modalités des énoncés se présentent sous deux types : o modalités logiques qui renvoient au positionnement du locuteur par rapport à la vérité, à la fausseté, à la vraisemblance ; o modalités appréciatives qui renvoient au positionnement du locuteur par rapport à des jugements subjectifs tels que la beauté, la tristesse, la joie,…
Plus précisément en linguistique, cette distinction est liée relativement à celle de ôsignification/sens ằ En fait, ô l‟ộnonciation ằ et ô la signification ằ sont toujours dộterminộes par le contexte et forment le ô dit ằ pour reprendre la terminologie d‟Oswald Ducrot (1984), alors que ô l‟ộnoncộ ằ et ô le sens ằ ne comportent que les aspects sémantiques liés aux composants linguistiques du propos et constituent le ô dire ằ Prenons l‟exemple suivant pour mieux nous faire comprendre: l‟ộnoncộ ô Il fait chaud ici ! ằ porte le sens en langue de la température dans le lieu ó on se trouve, mais selon les différents contextes, le fait d‟ộnoncer cette phrase peut donner plusieurs significations comme ô Il fait froid dehors ằ, ô Ouvre la fenờtre ! ằ ou ô Je ne veux plus rester ici ằ, etc
Comment peut-on alors distinguer les modalités de l‟énonciation à celles de l‟ộnoncộ ? ô Si les modalitộs d‟ộnonciation portent sur le dire, les modalitộs d‟ộnoncộ portent sur le dit ằ (Nứlke, 1993, p.143) Autrement dit, dans une communication, la modalité de l‟énonciation s‟exerce sur les interlocuteurs pendant que celle de l‟énoncé s‟exerce sur le contenu, de ce qui est dit Dans un discours, ces deux types de modalités sont toujours ensemble comme le recto- verso d‟un papier, mais quand une seule modalité d‟énonciation est présentée dans une phrase, plusieurs modalités d‟énoncés peuvent être y apparaissent (Meunier,
Nous allons donc nous intéresser tout d‟abord aux modalités de l‟énonciation et faire une présentation des types et des formes verbale/nominale de phrases qui vont servir à l‟analyse de notre corpus a Les types de phrases
Dans la suite des travaux de A.-M Diller (1980), Kerbrat-Orecchioni
(1991) classe les phrases en trois grands groupes qui correspondent aux trois principales fonctions pragmatiques du discours : ô ceux qui dộcrivent le monde, ceux qui interrogent sur le monde, et ceux qui cherchent à changer le monde ằ Ce sont les trois types des phrases fondamentaux : déclaratif (assertif), interrogatif, impératif (injonctif) On y ajoute souvent un quatrième correspondant à l‟expression d‟un sentiment vif du locuteur : le type exclamatif car ô l‟exclamation fait appel à une grande diversitộ de structures ằ (Maingueneau
Terminée habituellement par un point, la phrase déclarative ou assertive est le type le plus répandu mais le moins marqué d‟affectivité Elle est employée normalement pour énoncer un fait ou donner une information Sa structure est souvent présentée sous forme d‟une phrase canonique groupe nominal – groupe verbal L‟assertion ô pose un ộtat de choses comme vrai ou faux D‟un point de vue syntaxique, il s‟agit d‟énoncés qui comportent un sujet exprimé et dont le verbe porte des marqueurs de personne et de temps ằ (ibid., p.46)
Elle peut être affirmative (ex : Il est content) ou négative quand elle veut nier quelque chose en contenant un marqueur négatif composées de deux adverbes ô ne… pas ằ ou leurs variantes (ex : Il n’est pas content)
Parmi les quatre types de phrase, la phrase déclarative est toujours considérée comme de modèle de phrase de base (phrase canonique) tandis que les autres formes sont des phrases transformées C‟est pourquoi ces trois formes peuvent garder leur structure et leurs formes ou les modifier en changeant de position des groupes de mots et ajoutant les mots marquées de leur nature de phrase
Les phrases interrogatives sont souvent divisées en deux types : l‟interrogation totale (ou la question fermộe) qui sollicite une rộponse de ô oui ằ ou ô non ằ, et l‟interrogation partielle (ou la question ouverte) qui est accompagnée par un mot d‟interrogation (Qui ? Que ? Quel ? Quand ? Où ? Pourquoi ? Comment ? Combien ?)
Pour l‟énonciateur, la phrase interrogative est un outil qui permet de poser une question ou d‟exprimer une demande, et cet acte de langage initiatif doit théoriquement déboucher sur une réponse, une action ; bref le locuteur demandeur est à la recherche d‟une information, de quelque chose et attend une réponse ou une réaction C‟est un acte qui impose bien souvent des contraintes, comme le remarque Maingueneau (ibid., p.48) ô interroger quelqu‟un, c‟est le placer dans l‟alternative de répondre ou de ne pas répondre C‟est aussi lui imposer le cadre dans lequel il doit inscrire sa rộplique ằ
Mais la valeur ou la force pragmatique de ce type de phrases varie selon le contexte et de l‟intention de celui qui pose la question Ainsi, à titre d‟exemple, cette valeur pragmatique peut être montrée à l‟oral par l‟intonation
La question reste un acte de langage complexe et dire qu‟elle nécessite une réaction ou une réponse n‟est pas toujours juste ; il y a des cas ó le locuteur n‟attend de son allocutaire ni une réponse et parfois ni une réaction : il s‟agit de la question rhộtorique, par exemple : ô Mais les hommes conservent-ils de la passion dans ces engagements ộternels ? ằ (Mme de Lafayette, La Princesse de Clốves) en est un exemple
PRÉSENTATION DU CORPUS
Afin d‟exploiter le plus clairement possible tous les outils de l‟AD mentionnés dans la partie théorique pour l‟analyse du corpus, nous avons dressé un tableau 10 divisé en plusieurs colonnes qui chacune reprend un élément abordé
Nous avons mis ensuite les numéros de titres dans la presse qui permettront au lecteur de les retrouver plus aisément et avons indiqué par une croix que le titre contient l‟outil linguistique correspondant
Le tableau nous aide à avoir une vue générale sur les stratégies que les journalistes emploient pour construire les titres de leurs articles mais il n‟est bien sûr pas suffisant pour indiquer précisément que tel ou tel procédé est employé Par ailleurs, le corpus n‟est pas exhaustif et pas forcément représentatif de tous les journaux, mais il est un peu plus représentatif des titres dans la presse de la mode et de la gastronomie puisque nous avons centré notre sélection dans ce domaine
Les pourcentages de la derniốre ligne ô Totaux ằ du tableau (Annexe 3) permettent de dégager les tendances des titres actuels : les procédés préférés sont la thématisation utilisée par 45% des titres étudiés, la nominalisation (45%) et le type de phrase déclarative (73,3%) De plus, si on jette un regard rapide sur les articles des autres journaux de genre généraliste, on trouve que ce sont aussi les outils couramment pratiqués En revanche, parmi les outils qui ne sont pas beaucoup employés, nous n‟avons trouvé aucun titre qui utilise le discours indirect et le discours indirect libre On en peut ô deviner ằ les causes en se basant sur la théorie qui est attachée à ces formes :
- Le discours indirect donne l‟impression que le titre et son article, prenant plutôt le point de vue du journaliste, ne sont pas neutres Comme nous avons examiné les modalités données aux verbes introducteurs, il est difficile de choisir un verbe qui est tout à fait pertinent vis-à-vis du contexte et de l‟intention de la personne qui parle De plus, en esthétique, un discours rapporté indirect est plus long, plus lourd stylistiquement et moins efficace dans l‟accroche alors que les deux points et les guillemets du discours direct donnent une typographie plus diverse et donc attirent plus d‟attention du lectorat
- Le discours indirect libre est souvent utilisé dans la littérature, on le trouve aussi dans les articles de journaux mais rarement dans les titres C‟est le type de discours rapportộ le plus difficile à maợtriser L‟un des titres dans notre corpus nous a semblé d‟abord d‟appartenir au discours indirect libre :
Un Argentin à Athènes : Ici, la crise est toujours la faute d’un d’autre (N° 38) parce qu‟il n‟y a pas de guillemets qui entourent la parole Pourtant, comme on le sait, le langage de la presse est maintenant plus libre 11 et ne dépend pas trop des règles de la grammaire traditionnelle, c‟est ainsi le cas du titre n°38 dans lequel la typographie des guillemets du discours direct n‟est pas respectộe Mais la faỗon de les supprimer peut vouloir dire aussi que le journal reprend à son compte les propos de l‟Argentin
D‟ailleurs, nous avons trouvé, en cherchant à analyser la liste de cent vingt titres, d‟autres procédés, auxquels nous n‟avions pas pensé et qui n‟ont donc pas été présentés dans le cadre théorique Autrement dit, l‟étude du corpus nous a permis de découvrir plusieurs autres concepts linguistiques utilisés pour créer les titres dans les journaux Nous allons présenter alors à la fois, comment les outils dộjà prộsentộs fonctionnent, et quels sont les ô nouveaux ằ, vis-à-vis à nos connaissances.
ANALYSE DU CORPUS
La distinction entre les types de phrases est généralement manifestée par les ponctuations : le point à la fin de la phrase déclarative, le point d‟interrogation pour les questions et le point d‟exclamation pour les phrases impérative et exclamative Cependant, ces règles sont un peu modifiées dans les titres des articles de journaux
Tous les titres sous la forme de la phrase déclarative, soit canonique, soit nominale, soit propositionnelle du discours direct, ne sont jamais terminés par un point Cette règle fait partie des conventions typographiques pout les titres, comme insiste J Andrộ : ô on ne met pas de point à la fin d‟un titre ằ
Claude Bartlone avance ses pions sur l’échiquier du Grand Paris (N° 19) Dans les pays riches, des dizaines de millions d’enfants pauvres (N° 68)
La plupart des phrases interrogatives suivent toutes les règles nécessaires de ponctuation et d‟inversion sujet-verbe :
Faudra-t-il nourrir les ours polaires pour sauver l’espèce ? (N° 69)
Pourtant il existe des titres qui ne veulent pas les rétablir, comme l‟exemple de manque de point d‟interrogation :
Comment la forờt mộditerranộenne renaợt de ses cendres (N° 1)
Il y a de même les cas ó les questions finissent par les points de suspension :
L'accord donné par l'Europe à la nomination de l'ancien secrétaire adjoint à la défense américain, Paul Wolfowitz, à la tête de la Banque mondiale constitue-t-il à vos yeux…(N° 5)
Pour reformuler une interrogation directement adressée aux lecteurs, le journaliste évite d‟insérer une tournure interrogative (est-ce que) et de changer l‟ordre du sujet et du verbe Le résultat est une question proche à la forme employée le plus souvent à l‟oral
Il faut réduire les inégalités ? (N° 48)
En outre, une des faỗons de poser les questions à la franỗaise est représentée aussi dans les titres : les phrases interrogative qui contiennent un ou des verbe(s) infinitif(s) comme seul(s) verbe(s)
Sauver ou brûler les festivals d’été ?, par Bernard Faivre d’Acier (N° 42)
On peut les considérer comme des tournures elliptiques ó un auxiliaire de mode n‟apparaợt pas : c‟est le contexte qui apporte la nuance d‟obligation ou de possibilité et qui éclaire également sur la nature du sujet (la personne qui parle, celle dont on parle, les gens en général…), la situation dans le temps (passé, présent, futur)
Dans le cas des titres de journaux, les questions fermées jouent le rôle de non seulement aborder et interroger mais d‟abord d‟affirmer un fait dans l‟article :
Les dinosaures ộtaient-ils ô des amants autant que des guerriers ằ ? (N°
Le plus souvent encore, les titres, en accomplissant sa mission de ô briốvetộ ằ, prennent des ộlộments nộcessaires mais ne posent pas toute la phrase dite de type Sujet-verbe-complộment On ne connaợt pas quelle fonction joue l‟élément dans la question mais cela ne bloque pas notre compréhension, au contraire, elle devient plus claire et directe :
Le travail à perpétuité ? Créativité, flexibilité, mobilité … (N° 31)
Madame Lagarde au FMI : une fausse bonne idée ? (N° 36)
L‟impératif et l‟exclamatif n‟occupe que 11,7% dans le total de 120 titres du corpus : l‟un 7,5% et l‟autre 4,2% Comme les phrases interrogatives, celles des deux derniers types sont reconnues par leur propre ponctuation
La thalassothérapie, c’est seulement au bord de la mer ! (N° 40) Fumeurs, allez en Corse ! (N° 55)
Pourtant quelques titres nous font hésiter de leur identification en type de phrase :
Regardons la réalité en face (N° 56)
D‟un point de vue grammatical, on ne voit pas de point d‟exclamation ou de verbe conjugué à l‟impératif Cependant du point de vue de l‟analyse du discours, c‟est autre chose car il faut faire intervenir ô l‟absence de sujet du verbe quand celui-ci est au mode impộratif ! ằ comme on a citộ de Riegel et al (2009, p.665) dans la partie de théorie
Parmi les phrases assertives et exclamatives, on doit faire une place à part aux phrases dites nominales Ces énoncés sans verbes sont un des choix favoris pour créer un titre de livre, de réunion, de recette, etc et sans doute d‟articles de journaux
Elles sont souvent accompagnées de la thématisation, cela forme un stéréotype de titre de structure : o ô A, A’ ằ ou ô A : A’ ằ comme
Autriche: l’Europe contre Jửrg Haider (N° 22)
Le numérique, une nouvelle chance pour les littéraires (N° 102)
Elle peut avoir plusieurs dộrivations, par exemple celle de ô A, A’, A’’ằ ou ô A : A’: A’’ ằ dans le titre n° 34 :
Claire, 24 ans, neuf stages d’affilée, et rien au bout (N° 101) Alcatel : 1994-2004 : un groupe totalement transformé (N° 34)
Les A et A’ de la structure sont quelques fois séparés l‟un de l‟autre du point de vue de la graphie mais pas de la sémantique, car les éléments qui se mettent entre A et A’ portent aussi des informations complémentaires sur A et dans la majorité des cas ils sont de même nature lexicale
Tom Waits, la passion animale du blues (N° 41)
Pourtant, il y a aussi des cas ó ils n‟en sont pas
Terence Stamps, fascinant malgré lui (N° 49)
Ou on peut aussi mélanger tous les deux cas
On a trouvé … Patrice Martin, le Petit Prince qui glissait sur l’eau (N° 79)
Une question se pose quand nous trouvons les titres dans lesquels il existe le verbe qui garde la forme infinitive
Courir la nuit, dans la forêt, avec des zombies (N° 97) ô Perdre son temps sur Internet ằ, nouveau cours d’une fac amộricaine (N° 106)
Nous pensions d‟abord qu‟elles sont les phrases nominales mais après avoir rộexaminộ leur dộfinition ô une phrase nominale est construite sans verbe, autour d‟un nom ằ, on doit alors rejeter cette hypothốse
Nous avons pensộ à la notion donnộe pour ô une phrase simple qui ne contient pas de verbe conjugué ou une phrase qui ne contient de verbe conjugué que dans les propositions sujets ou complộments ằ (A Goosse, 1997, p.626) ? C‟est-à-dire la phrase dite ô averbale ằ Mais on ne peut pas se compter ô comme averbales les phrases dont le prédicat est un infinitif : " Pourquoi ne pas y aller ? " ằ (ibid, p.626)
Florence Lefeuvre, dans son article ô Les marqueurs de prộdication ằ dans la phrase averbale en franỗais ằ (2007), lui donne la dộfinition plus dộtaillộe : ô La phrase averbale est une structure syntaxique qui comporte une modalité (l‟assertion, l‟exclamation, l‟interrogation ou l‟injonction) et un prédicat averbal (adjectival, substantival, pronominal, adverbial ou prépositionnel) avec trois types d‟organisation possibles : Le prédicat peut être relié, par la modalité, à un sujet explicite ou implicite, ou bien simplement posộ par la modalitộ ằ
Il nous semble donc que les appeler ô phrases infinitives ằ est une solution acceptable Par exemple, 97 et 106 thématisent le verbe à l‟infinitif, c‟est-à-dire l‟action d‟ ô courir (la nuit) ằ et celle de ô dợner (son temps sur Internet) ằ
3.2 Les modalités de l’énoncé 3.2.1 Les marqueurs modaux
La division des marqueurs modaux en trois types (verbal, adjectival, adverbal), en suivant celle du cadre théorique, nous permet de les chercher plus facilement dans les titres des articles de journaux A travers du tableau de l‟annexe 3, on constate que les type de modalités de l‟énoncé ne sont pas très souvent employés par les journalistes dans les titres de journaux Pour les trois formes, on n‟en compte que vingt quatre