C’est pourquoi l'idée de « l'éducation tout au long de la vie » est considérée comme la clé d'entrée dans le XXIe siècle UNESCO 1996 ; le concept de l’apprentissage et le rôle de l’appre
Trang 1INTRODUCTION
Choix du sujet
Une bonne éducation est toujours le fruit d’une bonne qualité de l’enseignement et celle de l’apprentissage D’autant plus que, de nos jours, elle fait continuellement face à de grands défis dans un monde multiculturel plein de changements et de concurrence Nous savons que l’océan des connaissances est sans bornes tandis que la durée scolaire est limitée L’image de petits élèves vietnamiens en primaire portant un gros cartable au dos nous est maintenant très familière, et on se demande si ce sac grossira proportionnellement à la multiplication des connaissances dans les années à venir… Il est vrai qu’on ne peut pas tout apprendre à l’école C’est pourquoi l'idée de « l'éducation tout au long de la vie » est considérée comme la clé d'entrée dans le XXIe siècle (UNESCO 1996) ; le concept de l’apprentissage et le rôle de l’apprenant deviennent plus que jamais un grand centre d’intérêt Puisque le travail d’études ne s’arrête pas au contexte scolaire, les élèves doivent avoir une autonomie pour pouvoir bien agir dans différentes situations de la vie Ils ont besoin d’acquérir des connaissances, des habiletés qui leur permettent d'analyser les situations d'apprentissage et d’utiliser des stratégies appropriées
Ainsi, l’autonomie reste une des principales finalités de l’éducation en général et de l’enseignement des langues en particulier “L’apprentissage en autonomie constitue un enjeu essentiel de la didactique des langues et même, vraisemblablement, l’objectif majeur de toute entreprise de formation” (Louis Porcher 1981) D’autre part, l’auto-apprentissage est considéré aujourd’hui comme une nécessité incontournable, surtout en milieu universitaire Il constitue aussi un travail d’entraînement pour les activités de recherches scientifiques En fait,
il implique une participation active des gens à leur propre apprentissage Un élève autonome a
du plaisir à chercher tout en prenant des initiatives pour arriver à son but Il demande de l'aide
Trang 2ou des explications à un autre élève et au professeur quand il a un problème ; il sait utiliser tous les moyens d'information qui sont à sa disposition: dictionnaires, encyclopédies, moyens audio-visuels, Internet…
L’acquisition du vocabulaire joue un rơle important dans la maỵtrise d’une langue étrangère Cette composante de la langue évolue toujours Et, à un certain niveau, l’apprenant trouvera que l’enrichissement du vocabulaire –“la chair de la langue” – est plus d’une nécessité L’apprentissage du vocabulaire se ferait alors tous les jours sous les auspices de l’autonomie
Mais acquérir l’autonomie est un travail à la fois long et difficile qui exige un effort soutenu de la part de l’apprenant et un accompagnement durable de l’enseignant Sinon, les étudiants risqueraient fort de se rabattre sur des stratégies de survie, comme la simple mémorisation pour réussir à l’examen
En tant qu’enseignante du Département de Langue et de Civilisation françaises, nous reconnaissons le manque des recherches sur ce sujet Pour compléter cette lacune, nous avons décidé de mener cette recherche qui commence par la première année
But de recherche
Ils manquent de vocabulaire Cette plainte est tellement fréquente chez nos enseignants Trouver les difficultés des étudiants tout en identifiant leurs besoins, puis chercher à développer chez eux une autonomie dans l’acquisition lexicale est juste le but de notre recherche Favoriser une indépendance chez les étudiants est en effet une préoccupation majeure des éducateurs modernes aussi bien dans l’enseignement des langues que dans d’autres disciplines Les manières d’apprendre, les techniques pour apprendre font partie des compétences qu’il faut aider l’apprenant à acquérir « Enseigner c’est aider à apprendre.» (Louis Porcher) Il s’agit là d’une mission laborieuse des enseignants dans la mesure ó ils doivent orienter les étudiants dès leur entrée à l’université vers une autonomie
Mener ce travail de recherche, beaucoup de questions se posent :
- Qu’est- ce que l’autonomie en apprentissage?
- Quelle est la situation de l’auto-apprentissage du vocabulaire chez les étudiants en première année?
- Comment faire pour pouvoir être autonome dans l’acquisition lexicale en vue de communiquer et de découvrir la beauté de la langue ?
Trang 3- Quels seront les outils?
- Les enseignants en première année sont-ils conscients de l’importance de apprentissage ? Si oui, que font-ils pour encourager et aider les étudiants à la développer? Quelle sera la méthode de guidage des enseignants?
l’auto-Nous formulons les hypothèses :
- que l’auto-apprentissage améliorera la qualité de l’apprentissage chez les étudiants, notamment dans leur élargissement du vocabulaire,
- qu’il demande la bonne prise de conscience de tous les deux acteurs de l’éducation,
- que cette capacité implique certaines connaissances et d’autres capacités nécessaires
Ainsi, nous allons aborder premièrement le fondement théorique concernant la notion d’autonomie dans son contexte de genèse, son évolution, et celle-ci dans l’acquisition du vocabulaire Nous étudierons ensuite les concepts du vocabulaire du point de vue de l’apprentissage d’une langue étrangère
La deuxième partie portera sur l’étude du terrain Elle présentera d’abord nos réflexions sur l’auto-apprentissage du vocabulaire chez les étudiants en première année, à travers l’observation de leurs manuels utilisés au lycée et à l’université Nous analyserons par
la suite, les résultats de nos enquêtes auprès de ce public et des enseignants de la première année
Nous réserverons les pages qui restent aux propositions pédagogiques portant sur :
- la méthode d’apprentissage autonome en général, et dans l’élargissement du vocabulaire en particulier,
- le matériel pour s’orienter vers cette autonomie,
- le rôle de l’enseignant au profit de cette acquisition
Trang 4CHAPITRE 1 FONDEMENT THÉORIQUE
I QU’EST-CE QUE L’AUTONOMIE ?
La réflexion sur ce concept fécond – celui d’autonomie – n’est pas nouvelle, mais il reste actuellement encore à éclaircir Nous allons découvrir cette notion dans une optique générale afin d’avancer d’un pas par la suite dans notre recherche située dans le contexte de l’éducation
Nous commencerons par aborder l’étymologie du mot autonomie Il est formé de deux racines grecques auto et nomos qui signifient soi-même et loi Avant 1815, il est défini en philosophie comme « droit pour l’individu de déterminer librement les règles auxquelles il se soumet » (Le Petit Robert 1997) Le sens le plus ancien du terme apparaỵt dans l’expression
« l’autonomie du Droit », qui est une conception importante de l’Occident et cette origine purement occidentale ne fait pas débat Mais de quel droit s’agit-il? Selon Maurice Tardif (2005) et douze historiens européens de différentes nationalités1, les Grecs en tant que fondateurs de la civilisation occidentale, ont inventé la démocratie ó le pouvoir était indépendant de la volonté d’un seul homme (le roi) ou d’une élite (les nobles, les aristocrates, les riches ou ploutocrates) Le pouvoir devenait pour eux, un exercice de négociation ouverte
ó la parole, la discussion et le dialogue représentaient les instruments de ce pouvoir (Maurice Tardif 2005) « Pour la première fois, des hommes peuvent décider ensemble de leur avenir, ils doivent en discuter entre eux, sans maỵtre, et s’orienter en utilisant un langage cohérent, argumentatif, compréhensible par les autres et susceptible d’être contesté publiquement Ainsi naissent les premières formes de rationalité, d’argumentation, de logique et de raisonnement » (Maurice Tardif 2005 : 17) Avec cette démocratie, ce dernier auteur souligne que l’homme devenait un individu libre et responsable, autonome et capable d’une réflexion personnelle Nous en déduisons l’esprit suivant du mot autonomie : liberté, responsabilité, indépendance
et capacité d’un individu de réflexions personnelles
De nos jours, le terme possède plus d’un sens Il s’agit, en politique, de l’indépendance d’un groupe ou d’une communauté se gouvernant par ses propres lois En
1 Jacques Aldebert, Johan Bender, Jiri Grusa, Scipione Guarraccino, Ignace Masson, Dr Kenneth Milne, Foula Pispiringou, Dr Juan Antonio Sanchez Y Garcia Sauco, Antonio Simoes Rodrigues, Ben W M Smulders, Dieter Tiemann, Dr Robert Unwin (1992)
Trang 5technologie, il désigne la durée de fonctionnement d’une machine sans recours à une source d’énergie externe En philosophie, c’est la faculté d’agir par soi-même en se donnant sa propre loi
Dès lors, nous pouvons nous demander ce que signifie ce terme, en pédagogie Comment l’idée d’« autonomie de l’apprentissage » est-elle née ? Nous supposons que, dans
sa formation, cette idée se rattache beaucoup à l’esprit primitif du mot autonomie cité dessus Nous allons approfondir « l’autonomie de l’apprentissage » dans un contexte, que nous qualifions plus ou moins de culture pédagogique
ci-1 Contexte occidental
Il est nécessaire avant tout de dire quelques mots sur le contexte occidental Ce que nous examinons, c’est la civilisation centrée sur l’Europe de l’Ouest, qui émerge dans la seconde moitié du premier millénaire de notre ère D’après Olivier Galland et Yannick Lemel (2007), elle est issue de la civilisation gréco-romaine et de l’Empire romain qui en est l’apogée, mais elle en est clairement distincte : temporellement d’abord puisqu’un hiatus de quelques centaines d’années l’en sépare, géographiquement aussi, puisque l’Empire romain s’étend des deux côtés de la Méditerranée, occupe tout le Proche-Orient, tandis que la civilisation occidentale se développe dans les franges nord-ouest de ce qu’était cet empire, dans une zone qui va de la Loire au bassin de l’Escaut C’est à partir de ces franges, à la limite
du limes romain, que la civilisation occidentale étendra progressivement son domaine vers le corridor du Rhin, l’Italie du Nord et l’Angleterre d’abord, plus au nord vers les pays scandinaves, vers le sud et l’Espagne plus tard Evidemment, passer de l’Angleterre à la France ou l’Italie correspond à un changement de culture, mais au-delà de leurs différences immédiates, ces pays partagent des traits culturels communs, ainsi que l’éducation Nous ajoutons, dans le contexte étudié, les Etats-Unis, appartenant à un autre continent mais qui premièrement ont une histoire étroitement liée à celle de l’Europe et deuxièmement connaissent un grand progrès indéniable dans le développement de la pédagogie
Nous nous appuierons sur l’oeuvre La pédagogie : théories et pratiques de l’Antiquité
à nos joursde Clermont Gauthier et Maurice Tardif (2005) pour avoir une vue historique sur
le contexte Dans une société occidentale traditionnelle, l’éducation avait pour mission de transmettre aux nouvelles générations les contenus et le respect de la tradition Les enfants étaient éduqués dans la famille, en fonction de la vie de tous les jours Il n’y avait pas
Trang 6d’enseignant Les professeurs étaient le père, la mère, le voisin, les autres enfants Et la tradition ne se fondait pas sur le savoir du sens commun Il ne s’agit pas d’un savoir individuel mais d’un savoir socialement partagé, collectif, culturel en somme (la façon de marcher des garçons et des filles, l’attitude des gens devant la mort, la manière de manger, le choix des vêtements )
Puis, toujours selon cette source, les Grecs anciens ont jeté progressivement les bases
de cette civilisation avec leurs nombreuses créations (la philosophie, la géométrie, la logique, l’astronomie scientifique ) qui font partie du patrimoine de l’humanité Ces bases ont en commun, trois choses : la valorisation de la pensée rationnelle, la valorisation de la parole et
la valorisation de l’être humain Un modèle de culture est né : le rationalisme et l’humanisme
Ce modèle est basé sur la conviction que les êtres humains sont capables de se soustraire à la violence, aux préjugés, aux contraintes et de se déterminer grâce à leur propre force intérieure, à leur liberté Kant, vingt-deux siècles après Socrate a affirmé de nouveau : « Osez penser par vous-mêmes ! » Tel est le principe de base du rationalisme antique ou actuel L’éducation était au centre du rationalisme classique Les sophistes de l’Antiquité sont les premiers professeurs Ils proposaient de nouvelles valeurs formatrices, qui étaient autant de réponses à la question du pourquoi et du comment éduquer : l’individualisme, le progrès, l’apprentissage et la maîtrise de la parole en public, l’intellectualisme, la spiritualité (Maurice Tardif 2005 : 27) Jusqu’à Platon, l’activité éducative a mis l’accent sur la discussion/le dialogue centré(e) sur la connaissance : on passait de la relation langagière entre l’éducateur et l’éduqué à la relation de ceux-ci à un savoir objectif, consistant, universel, indépendant d’eux-mêmes et de leurs opinions variables
La religion occupe une place essentielle dans la création de la civilisation européenne
Le christianisme dominait l’Europe au Moyen Age Cette religion se fonde sur l’exigence d’une morale individuelle qui doit s’actualiser dans le monde Or, l’individualisme, étant un des quatre traits constitutifs de l’Europe occidentale d’après Henri Mendras2 est issu du Christianisme et du Droit romain (cité par Olivier Galland et Yannick Lemel (2007 : 19) Sous l’impulsion de l’Eglise, l’école est née au Moyen Age, pour la première fois ; afin d’enseigner les bases permettant aux chrétiens d’accéder à la connaissance des textes sacrés L’école était donc d’abord un milieu moral organisé Les monastères avaient des bibliothèques L’acte essentiel et le régime de la pédagogie médiévale sont centrés sur la
2 Les trois traits qui restent sont l’idée de la Nation, le capitalisme et la démocratie
Trang 7lecture L’apprentissage ne consistait qu’à lire, copier, apprendre par coeur, commenter les auteurs classiques (Clermont Gauthier et Maurice Tardif, Clermont Gauthier 2005 : 90)
La Renaissance, avec la Réforme, a fait voir le jour au protestantisme qui se présente comme des sources de l’individualisme moderne (Olivier Galland et Yannick Lemel 2007 : 31) Ce protestantisme exige l’exploitation systématique de toutes les possibilités d’action contribuant au progrès, à la prospérité de la communauté chrétienne Pour lui, le monde est donné pour la création et doit être l’objet de l’action chrétienne L’individualisme, mettant en avant l’autonomie individuelle, se combine toujours à un très fort activisme social (Olivier Galland et Yannick Lemel 2007 : 32)
Suivant le livre de Gauthier et Tardif sur lequel nous nous basons, l’individualisme moderne prend réellement naissance au XVIIIe siècle Les philosophes des Lumières ont dépassé les seuls droits de l’individu pour réfléchir systématiquement à la manière de se gouverner eux-mêmes et de décider de leur destin L’Europe connaissait les libertés individuelles de la pensée : la raison est indépendante de la religion et du pouvoir politique
De l’apparition des maîtres dans l’Antiquité au XVIIIe siècle, en passant par la naissance de l’école au Moyen Age, les réflexions sur la pédagogie se sont formées Mais avant la pensée éducative de Jean-Jacques Rousseau, la conception de l’apprentissage restait centrée sur l’obéissance et l’imitation des modèles, sur la sophistique et la rhétorique L’idée de l’autonomie de l’apprentissage n’est pas encore apparue
Rousseau a créé un nouvel idéal fondé sur l’observation de l’apprenant et centré sur les conceptions suivantes :
- La conception de l’enfant ou de l’apprenant : l’enfant/l’apprenant est son propre modèle, il est naturellement bon et libre Il est même meilleur que l’adulte, car ce dernier est corrompu par la civilisation
- La conception du maître ou de l’enseignant : le maître constitue le pôle secondaire de
la relation pédagogique Il doit être au service de l’enfant Le savoir naît de l’enfant
- La conception de l’apprentissage : l’apprentissage part du principe que l’être humain possède en lui-même la raison L’éducation cherche à favoriser le développement de l’homme complet
Les idées de Rousseau ont été reprises par le courant de la pédagogie nouvelle à partir
de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle : concentration de l’attention sur l’apprenant, sur ses besoins et ses intérêts et définition de l’enseignant comme guide Elle
Trang 8place l’apprenant au centre de ses préoccupations et s’oppose à une pédagogie traditionnellement centrée sur le maître et sur les contenus à transmettre L’opposition entre la pédagogie traditionnelle et la pédagogie nouvelle (d’après les partisans de la pédagogie nouvelle) a été mise en relief par Clermont Gauthier et Maurice Tardif (2005 : 149 - 150) dans
le tableau suivant :
- Pédagogie fermée et formelle
- Pédagogie ouverte et informelle
- Ecole nouvelle (New school)
l’apprenant) N.B : L’expression « Ecole nouvelle » (New school) apparaît en 1889 en Angleterre et en 1899 en France
- Former, mouler l’enfant
- Valeurs objectives (le Vrai, le Beau, le Bien)
- Transmettre la culture à partir des forces vives de l’enfant
- Permettre le développement des forces immanentes à l’enfant
- Valeurs subjectives, personnelles
« dedans »
- Point de départ : le système objectif de la culture que l’on découpe en parties à être assimilées
Trang 9l’enfant molle
- L’enfance a peu de valeur par rapport à l’état adulte
- Il faut agir sur l’enfant
- L’intelligence est surtout visée
- L’enfant tourne autour d’un programme défini en dehors de lui
intérêts, une énergie créatrice
- L’enfance a une valeur en même
elle L’enfant agit
- Il y a développement intégral de l’enfant
- Le programme gravite autour de l’enfant
programme
- Le contenu à enseigner aux enfants ne tient pas compte de leurs intérêts (culture objective)
- Le programme est idéaliste (contenu désincarné)
- Les intérêts des enfants déterminent le programme (structure et contenu)
- Le programme est réaliste (contenu lié au milieu dans lequel vit l’enfant)
Auteurs
représentatifs
Tradition dont les origines se perdent Dewey, Kerschensteiner, Claparède,
Decroly, Cousinet, Freinet, Montessori, Ferrière
- L’école prépare à l’avenir
Milieu naturel et social dans lequel s’écoule la vie de l’enfant (l’école comme milieu de vie)
- Le maître est au centre de l’action : il donne son savoir
- Le maître est actif : il fait l’exercice devant l’enfant ; il est
le modèle à imiter
- Le maître guide, conseille, éveille l’enfant au savoir Il est une personne-ressource
- L’enfant est au centre de l’action
- L’enfant s’exerce
(extrinsèque à l’individu : récompenses/ punitions)
- Discipline personnelle (basée sur les intérêts intrinsèques)
Trang 10- Discipline extérieure qui vise à contraindre
- Discipline qui vient de l’intérieur
Type de pédagogie - Pédagogie de l’objet : la culture
à transmettre
- Pédagogie de l’ordre mécanique
- Pédagogie du sujet : la personne
de ce qu’il est et de ce qu’il veut : c’est sa première libération Cette pédagogie propose des outils d’expression tels que les arts plastiques, ou les arts dramatiques Mais on ne s’exprime pas à vide, pour soi seulement, car on vit en communauté L’expression et la communication sont donc liées, jusqu’à être dépendantes l’une de l’autre De façon logique, la pédagogie Freinet propose ainsi des outils de communication
« La coopération, c’est aussi un choix social En ceci, la pédagogie Freinet est une pédagogie engagée : elle a choisi de valoriser la coopération au détriment de la compétition Elle affirme la nocivité de mettre en opposition les personnes et, ainsi, de limiter leur développement La compétition interdit de voir chez les autres des ressources pouvant être utiles à son propre développement, ressources qui peuvent prendre la forme d’un talent que l’on ne possède pas, d’une connaissance que l’on n’a pas Chaque individu est complémentaire des autres dans un groupe coopératif ; si les autres sont des ressources sur quelques plans, c’est lui qui l’est pour les autres sur d’autres plans C’eût pu être une question de « bonté » ; c’est plutôt une affaire de bon sens » (Clermont Gauthier et Maurice Tardif, Marc Audet
2005 :183)
Il existe aussi, du point de vue de ces auteurs, une coopération entre les enseignants qui pratiquent cette pédagogie, parce qu’ils sont, pour la plupart, des pédagogues de terrain, qui affrontent des problèmes concernant l’organisation et l’efficacité
Marc Audet observe que la pédagogie Freinet individualise l’apprentissage : chaque individu a son rythme, ses propres motivations et besoins, et donc chacun devrait bénéficier
Trang 11d’une aide particulière Grâce aux fichiers individualisés de travail, et souvent autocorrectifs, les apprenants et le maître peuvent aménager le travail selon les besoins réels de chacun Comment s’organise la vie dans une classe Freinet ? Le temps et les ressources sont aménagés en fonction des projets de recherche de connaissances et de développement d’habiletés que les apprenants apportent Le matériel de travail se base sur leurs idées et ce qu’ils en feront
L’auteur Marc Audet affirme que cette pédagogie s’est répandue dans plusieurs écoles
et cela a formé un mouvement organisé et international, actif dans ses échanges D’après nous, c’est la raison pour laquelle Célestin Freinet est devenu une des grandes figures pédagogiques, qui a contribué à une conception de la formation davantage centrée sur l’apprenant
À la fin du XXe siècle, la notion d’autonomie de l’apprentissage est née B Schwartz (L’éducation demain 1973) a défini l’autonomie comme “ la capacité de prendre en charge la responsabilité de ses propres affaires” Dans le contexte de l’apprentissage des langues, l’autonomie selon Henri Holec (1979 : 3) est donc la capacité de prendre en charge son propre apprentissage
Prendre en charge son apprentissage, c’est avoir la responsabilité, et l’assumer, de toutes les décisions concernant tous les aspects de cet apprentissage, c'est-à-dire :
- la détermination des objectifs ;
- la définition des contenus et des progressions ;
- la sélection des méthodes et des techniques à mettre en œuvre ;
- le contrôle du déroulement de l’acquisition proprement dite (rythme, moment, lieu, etc.)
- l’évaluation de l’acquisition réalisée
L’apprenant autonome est capable de prendre lui-même toutes les décisions concernant l’apprentissage dans lequel il désire, ou il se trouve impliqué
Dans une recherche sur de l’autonomie en apprentissage, nous ne pouvons pas laisser
de côté la lecture de John Dewey, philosophe américain le plus marquant de la première moitié du XXe siècle Héritier de C.S Peirce (le père du pragmatisme), il a développé une pensée originale en orientant le pragmatisme dans des voies dont on découvre aujourd’hui l’intérêt, ainsi que dans la pédagogie Pour lui, les enfants n’arrivent pas à l’école comme
Trang 12autant d’ardoises vierges passives sur lesquelles l’enseignant inscrirait les leçons de la civilisation Lorsque l’enfant entre à l’école, il est « déjà intensément actif, et il s’agit pour l’éducation de prendre en main cette activité, de lui donner une direction » (John Dewey
1899 : 25) L’enfant qui commence sa scolarité apporte avec lui quatre « impulsions innées » - celles « de communiquer, de construire, de chercher à savoir et d’affiner son expression » - qui sont « les ressources naturelles, le capital non investi, dont la mise en valeur conditionne
la croissance active de l’enfant » (John Dewey 1899 : 30)
Est aussi très importante cette conception de Dewey, qui affirme que l’éducation est
un processus de vie, et non une préparation à la vie « Apprendre ? Certainement, mais vivre d’abord, et apprendre par la vie, dans la vie » L’individu se réalise, selon Dewey, en utilisant ses talents propres pour contribuer au bien-être de la communauté : en conséquence, la fonction cruciale de l’éducation dans une société démocratique est d’aider l’apprenant à acquérir le « caractère » - somme d’habitudes et de vertus – qui lui permettra de se réaliser pleinement de cette façon (Perspectives : revue trimestrielle d’éducation comparée, UNESCO 2000)
On peut dire que John Dewey a ouvert une nouvelle page sur l’éducation avec trois grands principes (Sciences humaines, No Aỏt-Septembre 2000) :
- la centration sur l’apprenant ;
- l’éducation morale : autonomie, entraide, coopération ;
- la pratique des méthodes actives
En bref, l’autonomie en apprentissage en Occident est caractérisée par : la liberté, l’indépendance, la responsabilité, la capacité de penser et d’agir, avec toute sa force intérieure et sa coopération avec les autres, de l’apprenant dans son apprentissage Ces actions seront menées à son propre profit d’abord, ensuite au profit de la communauté, comme buts d’apprentissage Cela sera favorisé par une pédagogie centrée sur l’apprenant,
ó l’enseignant aura pour fonction d’être un guide, un conseiller et par le fait que l’école est liée à la vie réelle
2 Contexte vietnamien
L’idée d’un apprentissage en autonomie est – elle née dans l’histoire éducative vietnamienne ? La réponse sera trouvée grâce à un savoir panoramique sur l’histoire de l’apprentissage au Vietnam
Trang 13Commençons par quelques mots sur le contexte Géographiquement, le Vietnam est un pays du Sud-Est de l’Asie, qui connaỵt un climat principalement tropical ó la vie des gens s’attache à la culture du riz L’habitat y est stable On travaille en saison, régulièrement Une vie collective, étroitement liée à l’image des villages, faisait partie de la mentalité des Vietnamiens (Phan Ngoc 2002 : 85), d’année en année, de génération en génération Cette mentalité qui surestime la collectivité par rapport à l’individu, selon le linguiste et chercheur dans le domaine de la culture Phan Ngoc, a été aussi gravée par une conception de l’honneur centrée sur l’importance de l’ « être » plus que de l’ « avoir », tandis que la conception occidentale de l’honneur est liée à la possession d’un titre, d’un rang, de richesse (Guichard 1977) Historiquement, le Vietnam a surmonté de nombreuses de vicissitudes, a connu de longues guerres, et a été en conséquence influencé par d’autres cultures, principalement les cultures chinoise, indienne, et plus tard occidentale (notamment française) (Phan Ngoc 2002
et Huu Ngoc 2006)
Pendant l’époque de la domination chinoise, d’après Phan Ngoc (2002), c’était d’abord le bouddhisme qui menait la vie spirituelle du peuple Peu de gens savaient écrire Les intellectuels étaient des bonzes On apprenait l’écriture chinoise dans les pagodes qui restaient les centres culturels Des concours étaient organisés en Chine Durant la féodalité ó
le pays a eu l’indépendance, l’éducation trouvait une place importante
Le confucianisme a une influence profonde dans la culture vietnamienne (comme en Chine et en Corées) et qui y perdure ; avec ses avantages et ses inconvénients selon Phan Ngoc (Ban sac van hoa Viet Nam 2000) Le premier avantage est qu’il affirme la capacité de trouver le bonheur humain dans la vie réelle, sans recours à l’aide d’un Dieu, mais plutơt grâce à la coopération des gens Le deuxième avantage consiste en la formation d’une tradition de la passion pour l’apprentissage dans le pays depuis plus d’un millier d’années Le confucianisme montre que l’apprentissage est une joie de la vie, un besoin vital de l’homme :
il faut apprendre Confucius considère l’apprentissage non seulement comme un moyen mais aussi comme l’objectif que l’homme doit viser tout au long de sa vie Apprendre et s’entraỵner sur ce qu’on a appris est un plaisir Un troisième point avantageux : un attachement très fort et solide au pays natal, à la famille, aux proches, aux amis, aux voisins De plus, cette doctrine peut former des gens à devenir débrouillards devant les difficultés, à s’adapter aux différents milieux Enfin, ces gens s’orientent vers une vie simple, au détriment de la séduction matérielle, vers une vie en harmonie avec la nature et la communauté
Trang 14Parallèlement, cette doctrine présente des désavantages C’est l’idée partagée par les deux auteurs Huu Ngoc et Phan Ngoc Tout d’abord, c’est l’inégalité entre les hommes, qui est l’origine de la société hiérarchisée Il y avait une grande distance entre les êtres supérieurs
et les êtres inférieurs Ainsi, ce que les parents disaient était toujours indiscutable, ce que les maîtres disaient aux élèves était des vérités éternelles, incontestables Ensuite, le confucianisme prend le passé et non l’avenir, ni le progrès, pour le but vers lequel il s’oriente C’est pour cela que, d’une part, sous l’influence du confucianisme, le développement de l’individu était empêché à cause des contraintes de ses responsabilités pour la famille, la parenté, le village, la communauté, et des règles rigoureuses de comportements D’autre part, cet individu était soumis, dépendant, il n’osait pas avoir d’autres pensées que les idées existantes, n’osait pas non plus agir différemment de ses ancêtres, ni défendre ses propres idées contre les règles déjà établies Nous constatons donc que le monde n’y était pas donné pour créer ou changer
Quels ont été les effets de ces circonstances de vie et de ces influences confucianistes sur l’apprentissage ? D’abord, elles ont formé en réalité des apprenants passionnés par leur « métier d’apprendre » L’apprentissage pour un Vietnamien est autrefois comme maintenant une joie, voire l’honneur de la famille, d’un village, et d’un pays Pourtant les deux auteurs cités ont remarqué que le but de l’apprentissage auparavant, était de devenir fonctionnaire dans la Cour féodale, sinon maître Les deux métiers donnaient également l’honneur
Quelle était la méthode d’apprentissage ? Selon Phan Ngoc, c’était totalement apprendre par coeur des livres de la doctrine confucéenne, des poèmes qui vantaient la beauté
du pays, de la Cour, même des mots tabous à éviter dans les concours Nous pouvons trouver qu’il n’y avait pas d’idée de créativité dans ce modèle d’apprentissage, évidemment, ni d’idée
de la recherche du nouveau savoir ; autrement dit, pas d’intérêts pour les progrès techniques et scientifiques Les cours magistraux étaient inévitables En fait, la relation maître-élève était celle du respect absolu : l’image du maître était comme celle du père, sacrée Phan Ngoc a noté que c’était un modèle qui a restreint avant tout le développement personnel
Bien qu’il y ait eu beaucoup d’individus, dans l’histoire, qui ont appris en solitaire, sans maître, pour devenir de grands hommes, nous constatons que ce qui compte, pour l’esprit
de l’autonomie en apprentissage, ce n’est pas simplement la capacité d’apprendre seul, mais
Trang 15c’est la liberté et l’indépendance dans la pensée, dans les actions de l’apprenant, en faveur d’un changement ou d’une progression
À la fin du XIXe siècle et au XXe siècle, le pays a connu une nouvelle civilisation venant de l’Ouest C’est ainsi que le français est arrivé Pierre-Richard Feray (1984) a appelé l’enseignement au Vietnam sous la colonisation française comme « l’apprentissage d’une liberté » par l’étude incontournable d’un savoir scientifique et technique Le « quoc ngu », l’écriture vietnamienne à base de l’alphabet, est né grâce à un prêtre qui s’appelle Alexandre
De Rhodes Cette civilisation occidentale, avec ses idées de base sur le rationalisme, l’humanisme, l’individualisme, la démocratie et puis le progrès de la science et la modernité, s’est répandue sans aucun doute et changeait plus ou moins la génération intellectuelle du pays Le président Ho Chi Minh est un des plus brillants modèles de l’apprentissage en autonomie Il a appris plusieurs langues étrangères, en travaillant, en voyageant, a appris différents métiers, avec toutes ses forces intérieures, en dépit de conditions défavorables pour
la plus grande cause de la vie : l’indépendance et le bonheur de sa patrie
Au début de ce XXIe siècle, l’éducation vietnamienne ayant peur d’une arriération, qui connaît encore une situation majoritaire du modèle « transmission à sens unique du savoir
de l’enseignant et réception passive du savoir de l’apprenant » (Nguyen Canh Toan 2002), se trouve devant des défis Nous notons qu’elle s’inspire progressivement des progrès de l’éducation des pays développés, telles seront les idées incontournables de l’autonomie en apprentissage, et de la pédagogie centrée sur l’apprenant, tout en maintenant des traits positifs constants de la tradition, comme la passion pour l’apprentissage tout au long de la vie et le grand respect pour les enseignants
3 Vers une autonomie en apprentissage
3.1 Pourquoi l’autonomie en apprentissage ? 3
Cette grande question, qui s’est posée dès le début de notre étude, est certes bien liée à
la nécessité de l’apprentissage autonome De nombreuses études ont été menées sur ce sujet - l’autonomie en apprentissage, mais il s’agit pour la plupart d’études consacrées au fait de construire cette capacité chez l’apprenant tout en soulignant son exigence comme bien
3 Cette section reprend une partie de la Communication que nous avons présentée au Séminaire – Formation régional des Jeunes chercheurs francophones à Phnom Penh (Cambodge) en 2008
Trang 16évidente, sans discussion Il est important d’expliquer cette évidence Le résultat de cet éclaircissement sera le fil directeur de notre recherche
Pour commencer, il faut souligner avant tout que le point sur lequel nous devons centrer notre intérêt, c’est « l’apprentissage » Une seule découverte sur la notion d’autonomie
ne suffit pas à donner la réponse On apprend tous les jours, mais qu’est-ce qu’apprendre ? Et qu’est-ce qu’on apprend ? Même en français, le mot apprendre signifie à la fois « s’instruire » (learning) et « instruire » (teaching) (Olivier Reboul 1980 : 9) Sans vouloir entrer dans la complexité de la notion, nous nous contenterons de comprendre ce qu’est « l’apprentissage » envisagé du point de vue de son « but » Dans le rapport à l’UNESCO de la Commission internationale sur l’éducation pour le XXIe siècle de Jacques Delors, l’éducation tout au long
de la vie est considérée comme fondée sur quatre piliers : apprendre à connaître, apprendre à faire, apprendre à vivre et apprendre à être
- apprendre à connaître considère que les apprenants construisent leur propre savoir chaque jour, combinant éléments endogènes et éléments « externes » ;
- apprendre à faire est centré sur l’application pratique de ce qui est appris ;
- apprendre à vivre ensemble concerne les compétences indispensables pour une vie exempte de discrimination, dans laquelle tous ont des chances égales de développer leur propre individualité, leur famille et leur communauté ;
- apprendre à être met l’accent sur les compétences nécessaires pour que les individus mettent à profit tout leur potentiel
Nous croyons que tout apprentissage a trois buts en général : conquérir le savoir, saisir
la façon d’acquérir des connaissances et les appliquer Parmi ces buts, le deuxième est bien important Certes, « tout homme reçoit deux sortes d’éducation : l’une qui lui est donnée par les autres, et l’autre, beaucoup plus importante, qu’il se donne à lui-même » (Edward Gibbon) C’est pourquoi « apprendre à apprendre » devient déjà un slogan, enseigner, c’est aider à apprendre Et « aider à apprendre » signifie d’abord « aider à apprendre à apprendre », aider à être autonome dans l’apprentissage, surtout quand il s’agit d’apprendre une langue - une activité à vie Et s’il va de soi que personne n’apprend à la place de personne, tout apprentissage est alors principalement auto-apprentissage
C’est dans l’idée de la capacité d’auto-apprentissage qu’on trouve le rôle actif de l’apprenant, son aptitude à résoudre lui-même des problèmes, sa créativité, sa prise en charge
de la responsabilité de son apprentissage, qu’on trouve « le trésor caché dedans» Enseigner,
Trang 17c’est découvrir ce trésor et aider l’apprenant à le découvrir lui-même L’apprentissage est, depuis toujours, une nécessité de la vie humaine et la raison de l’existence du métier d’enseignant sans qu’on en ait conscience De cette constatation, nous pouvons affirmer que
« la pédagogie qui se centre sur l’apprenant » est une conséquence incontournable de cette évidence de l’autonomie en apprentissage Poser des questions sur la qualité de l’enseignement, c’est examiner la qualité de l’apprentissage L’enseignement ne doit pas être séparé de l’apprentissage Pour bien enseigner, il faut partir du travail d’apprendre, de la compréhension sur l’apprentissage
3.2 Synthèse
Pour conclure, l’autonomie en apprentissage est déjà une partie de l’apprentissage Elle représente aussi une capacité incontournable pour l’apprentissage tout au long de la vie Elle est liée à la liberté, à l’indépendance, à la responsabilité et à la capacité de penser et d’agir de l’apprenant pour atteindre ses buts d’apprentissage Elle ne signifie pas une liberté sans limites, mais elle est plutôt considérée comme le fondement d’une responsabilité de l’apprentissage L’autonomie est liée à la force intérieure de l’apprenant De plus, elle ne reste pas synonyme d’apprentissage en solitaire, mais elle se fait à la fois avec ou sans présence de l’enseignant L’apprentissage autonome peut se réaliser en trois étapes pour un apprenant : travail personnel, coopération avec d’autres apprenants, discussion avec l’enseignant qui a une fonction d’aide et de conseil Enfin, l’apprentissage en autonomie est favorisé par une pédagogie centrée sur l’apprenant et par le milieu de formation lié à la vie réelle
II L’AUTO-APPRENTISSAGE DU VOCABULAIRE
1 L’importance de l’auto-apprentissage du vocabulaire
De nombreux auteurs soulignent l’importance du vocabulaire dans l’apprentissage et l’emploi des langues étrangères Par exemple, F.-J Hausmann (1984) a affirmé que
“L’apprentissage des L2 consiste en trois grands M: des Mots, des Mots et des Mots” M.-C Tréville et L Duquette (1996) partagent aussi cet avis : “Apprendre une langue, c’est essentiellement apprendre le vocabulaire de cette langue.” Du côté des apprenants, beaucoup trouvent que l’enrichissement du vocabulaire – la chair de la langue – est plus d’une nécessité
Trang 18En fait, c’est une découverte passionnante, “car le mot, qu’on le sache, est un être vivant” (Victor Hugo) et “quand une fois on a gỏté du suc des mots, l’esprit ne peut plus s’en passer On y boit la pensée” (Joseph Joubert)
De plus, le vocabulaire évolue toujours et on doit connaỵtre les mots nouvellement créés Selon Krashen (1979 :163), après tout, les adultes emportent des dictionnaires et pas des livres de grammaire L’apprentissage du vocabulaire est donc un travail qui se fait tous les jours et qui exige beaucoup d’efforts de la part de l’apprenant
Tout ce qui précède montre que le vocabulaire doit s’apprendre principalement en auto-apprentissage Cette acquisition lexicale reste un défi dans l’apprentissage d’une langue
2 Apprentissage / auto-apprentissage du vocabulaire à travers les approches
Il semble indispensable de retracer un bref historique des méthodes d’enseignement du français langue étrangère afin de situer notre recherche
2.1 Méthode traditionnelle
La méthode traditionnelle s’appelle également méthode classique ou méthode grammaire-traduction Le but essentiel de cette méthode est la lecture et la traduction de textes littéraires en langue étrangère, ce qui place donc l’oral au second plan La langue est conçue comme un ensemble de règles et d’exceptions qu’on retrouve dans des textes, et qui peuvent être rapprochées de la langue maternelle Le vocabulaire est appris sous forme de listes de mots présentés hors contexte, que l’apprenant doit apprendre par cœur Le sens des mots est saisi à travers leur traduction en langue maternelle Le dictionnaire bilingue est recommandé La culture est perçue comme l’ensemble des œuvres littéraires et artistiques réalisées dans le pays ó on parle la langue étrangère
L’enseignant dirige l’apprentissage : il domine entièrement la classe, détient le savoir
et l’autorité Il choisit les textes et prépare les exercices, pose les questions et corrige les réponses On utilise en classe la langue maternelle et l’interaction se fait toujours en sens unique du professeur vers les élèves On peut dire enfin qu’il s’agit d’une méthode qui a perduré pendant plusieurs siècles et qui a contribué au développement de la pensée méthodologique, à l’apparition d’autres théories plus attrayantes pour les élèves
Trang 192.2 Méthode audio-orale et méthode SGAV
Durant des années cinquante, la méthode audio-orale apparaỵt, qui privilégie la compétence dans la langue parlée L’enseignant dirige toujours l’apprentissage Au lieu de véritables communications, il s’agit plutơt de répétitions de structures Puis, la méthode SGAV (structuro-globale audio-visuelle) se développe sous l’influence du béhaviorisme, du structuralisme et des technologies nouvelles L’apprentissage d’une langue, d’après le béhaviorisme, est un processus mécanique de formation des réflexes Cette méthode se base sur le français fondamental, un recueil des formes lexicales les plus courantes du français, selon deux critères : la fréquence d’apparition et la disponibilité On apprend le vocabulaire à travers des documents de base dialogués et des structures (le vocabulaire est choisi et présenté
à partir de centres d’intérêt inspirés du français fondamental) La mémorisation lexicale chez les élèves s’effectue à l’aide des exercices structuraux Pour R Galisson, tout le travail effectué pour l’élaboration du français fondamental a surtout servi… à desservir le vocabulaire et abouti à sa paupérisation Les méthodes audiovisuelles bannissent de plus en plus de leurs leçons toute possibilité d’enrichissement lexical (P Bogaard 1994 : 6) Ces méthodes ont cédé la place à l’approche communicative basée sur d’autres théories linguistiques (le fonctionnalisme) et psychologiques (le cognitivisme)
2.3 Approche communicative
L’approche communicative refuse la linguistique structurale et la psychologie béhavioriste Elle modifie les conceptions de l’apprentissage Il ne s’agit pas seulement de susciter un ensemble d’habitudes Les psychologues cognitivistes conçoivent l’apprentissage comme un processus de créateur, qui est soumis à des mécanismes internes plutơt qu’à des influences externes L’approche communicative se centre sur l’apprenant Sa préoccupation est de s’adapter aux besoins langagiers de chaque public L’apprentissage évolue donc vers une forme plus individualisée Avec la psychologie cognitive, la participation de l’individu à son propre apprentissage est prise en compte L’apprenant n’est plus considéré comme un être passif L’autonomie réelle de l’apprenant est une pierre de touche de la méthodologie (Pierre Martinez 1996: 84) Apprendre une langue, c’est apprendre à se comporter de manière adéquate dans des situations de communication ó l’apprenant aura quelque chance de se trouver en utilisant les codes de la langue cible
Trang 20L’enseignant devient ainsi un guide, un conseiller, à l’écoute des apprenants Il doit recourir à des documents appelés “authentiques”, c’est-à-dire non conçus exclusivement pour une classe de langue étrangère Les élèves sont partenaires de communication
Les tenants de l’approche communicative considèrent qu’une communication efficace implique une adaptation des formes linguistiques à la situation de communication (statut de l’interlocuteur, âge, rang social, lieu physique, etc.) et à l’intention de communication (ou fonction langagière: demander d’identifier un objet, demander une permission, donner des ordres, etc.)
L’apprentissage du vocabulaire devient plus raisonnable, plus efficace; les mots appris appartiennent à la langue courante On apprend le vocabulaire dans les actes de parole, tirés d’un Niveau Seuil La culture doit être quotidienne et concerne aussi bien le verbal que le non- verbal C’est la culture non stéréotypée
L’approche communicative présente diverses formes linguistiques destinées à transmettre un même message On utilise en classe de préférence la langue étrangère, mais il est possible d’utiliser la langue maternelle et la traduction
L’approche communicative a donc beaucoup de grands progrès Elle cherche à combler toutes les lacunes des approches précédentes
3 Acquisition du vocabulaire
3.1 Acquisition
L’utilisation du terme acquisition ne désigne aucune opposition avec celle du terme apprentissage Ce choix prépondérant n’a pour but que de s’orienter le mieux possible vers le sujet de recherche Michèle Pendanx (1998) considère l’apprentissage comme le traitement du matériau langagier (qu’il soit imposé de l’extérieur – dans la situation d’enseignement – ou qu’il s’exerce dans le cadre d’un auto-apprentissage plus ou moins guidé) L’acquisition est considérée, selon cet auteur, comme ce qui est automatisé et intériorisé, et qui résulte d’opérations conscientes et non conscientes de traitement langagier Ainsi, nous proposons que l’acquisition soit comprise comme une notion qui recouvre l’apprentissage et qu’elle consiste en un processus : il y a des degrés d’acquisition ; elle est également conçue comme le résultat de ce processus
Trang 213.2 Processus d’acquisition
Pour parvenir à expliquer des mécanismes d’apprentissage, notamment ceux du lexique, Paul Bogaards (1994), en se basant sur les apports psycholinguistiques, a donné d’abord une description succincte du mécanisme cognitif Il se compose de trois éléments : les dispositifs d’entrée, le processeur et la mémoire à long terme
« Les dispositifs d’entrée, appelés habituellement registres sensoriels sont rien d’autre que les cinq sens dont nous disposons : l’oụe, la vue, le toucher, l’odorat et le gỏt C’est à travers ces canaux que l’homme entre en contact avec le monde qui l’entoure et c’est par ce biais que des informations peuvent entrer Il va sans dire que, dans le contexte de l’apprentissage des langues, ce sont les yeux et les oreilles qui occupent une place de choix
Le processeur ou dispositif de traitement est l’instance active qui prend en charge le traitement des informations captées par les registres sensoriels Cette instance porte des noms différents (mémoire à court terme, mémoire de travail,…), selon les théories assez diverses et très nombreuses qui essaient de tirer au clair le fonctionnement exact de cette partie centrale
du mécanisme cognitif
La mémoire à long terme, qu’on appelle aussi mémoire sémantique pour des raisons qui deviendront bien claires, contient tout ce que nous savons Elle contient les traces de toutes nos expériences, de tout notre lexique, de tout ce dont nous nous souvenons et même de tout
ce que nous croyons avoir oublié C’est le dépơt ó sont emmagasinées, de manières bien diverses et très complexes, comme nous le verrons plus loin, toutes nos connaissances, toutes les informations dont nous disposons, qu’elles soient auditives, visuelles, tactiles, olfactives
ou motrices, qu’elles soient conscientes ou non et qu’elles soient exprimables en langue ou non Ces connaissances sont stockées sous forme de ce qu’on appelle des concepts, des unités
de sens qui entretiennent des relations de types divers avec les autres concepts » Paul Bogaards (1994 : 69 – 70)
Afin de tirer au clair les mécanismes fondamentaux de l’apprentissage lexical, Paul Bogaards a aussi repris la théorie « des niveaux de traitement » L’idée de base de cette théorie est que le traitement des informations va laisser des traces dans la mémoire sémantique Plus ce traitement a eu lieu à un niveau profond, plus les traces sont durables et facilement retrouvables Cet auteur souligne qu’un traitement qui n’implique la forme des éléments traités est considéré comme superficiel, tandis qu’un traitement qui fait intervenir le sens s’opère à un niveau plus profond De cette constatation, il déduit que la simple répétition d’un élément n’implique que des niveaux superficiels, tandis que des tâches difficiles comme
Trang 22celles qui font appel à des facultés de raisonnement ou à la comparaison détaillée, et qui font donc intervenir le sens du matériel utilisé, ont lieu à un niveau profond Paul Bogaards (1994 : 92) L’apprentissage consiste donc, selon cet auteur, en la mise en place de traces mémorielles et au renforcement des liens qui les unissent Il affirme également que le sens occupe une place centrale dans l’apprentissage et que ce n’est pas la répétition intentionnelle qui est requise pour obtenir des résultats en termes d’apprentissage
À partir des connaissances sur le modèle de la mémoire sémantique, Bogaards a donné des conclusions très importantes C’est qu’apprentissage ou acquisition peut être défini comme une extension quantitative et qualitative des réseaux de traces mémorielles La mise
en place d’un réseau de façon bien établie et bien structurée exige le temps Ainsi, l’apprentissage est forcément graduel Dans les processus d’apprentissage, ce sont les tâches (les traitements) faisant appels aux contenus sémantiques (le sens) et impliquant la personnalité de l’apprenant qui mènent aux meilleurs résultats C’est pourquoi l’acquisition est une entreprise très individuelle Cette conclusion renforce l’idée de l’autonomie dans l’enrichissement lexical
3.3 Acquisition/apprentissage du vocabulaire
Meara (1986 : 36) retrouve les deux aspects de l’apprentissage verbal en langue maternelle : l’individualisation et le caractère graduel Cela est cité par Paul Boggards (1994), pour arriver à sa constatation que non seulement ces principes généraux de l’apprentissage s’appliquent à l’acquisition du vocabulaire étranger, mais l’acquisition lexicale de la langue maternelle joue aussi un certain rôle dans le développement des réseaux lexicaux de la langue étrangère chez les apprenants Ainsi, cet auteur affirme que les trois objectifs de l’élargissement des connaissances lexicales en langue maternelle de M.-F Graves (1987) peuvent être transposés dans l’apprentissage des langues étrangères Ce sont les trois objectifs suivants :
Apprendre les mots ;
Apprendre à apprendre les mots ;
Apprendre des faits sur les mots
Parmi les tâches du premier objectif de Graves apprendre les mots, Paul Bogaards compte :
- l’apprentissage de nouvelles significations de mots déjà connus ;
Trang 23- l’apprentissage de nouveaux mots pour des concepts déjà connus ;
- l’apprentissage de nouveaux mots pour des concepts nouveaux (la tâche la plus difficile) ;
- le transfert des mots de l’usage réceptif à l’emploi productif
Les tâches de l’objectif apprendre à apprendre les mots incluent :
- l’utilisation de diverses sources d’informations : contexte, parties analysables de mots, ouvrages de référence ;
- la mise au point des techniques pour traiter les mots inconnus
Concernant le dernier objectif apprendre des faits sur les mots, l’apprenant doit se rendre compte :
- de ce que connaître un mot veut dire ;
- du fait que les sens varient et comment ils varient ;
- des mécanismes qui permettent de reconnaître et de manipuler les relations sémantiques entre les mots ;
- des mécanismes qui président à l’emploi figuratif des mots
Il semble clair jusqu’à présent, ce qui concerne les mécanismes du processus de l’acquisition du vocabulaire, mais ce travail d’acquisition n’est pas toujours facile, vu beaucoup de facettes des connaissances du vocabulaire Nous allons étudier, dans la partie suivante, les questions théoriques lexicales du point de vue de l’apprentissage de la langue étrangère
III VOCABULAIRE
1 Définition
Le vocabulaire, selon Christine Sautermeister (1992) est “l’ensemble des mots effectivement employés par le locuteur dans un acte de parole précis, réalisé sous forme de discours oral ou écrit” Pour Lise Duquette (1996), c’est un sous-ensemble du lexique de la langue Il est composé de toutes les unités sémantiques, graphiquement simples et composées
et locutions indécomposables qui s’actualisent dans le discours Il est à noter que le lexique se différencie du vocabulaire Ils sont en rapport d’inclusion : le vocabulaire est toujours une partie, de dimensions variables selon le moment et les milieux socioculturels du lexique individuel, lui-même, partie du lexique global Le lexique est l’ensemble des mots qui, à un
Trang 24moment donné, sont à la disposition du locuteur Le vocabulaire d’une langue est l’ensemble des mots utilisés par un locuteur donné dans ces circonstances données
2 L’unité lexicale
Depuis longtemps, apprendre le vocabulaire est conçu en général comme apprendre des mots Mais il est clair que la plupart des mots sont polysémiques, les connaissances lexicales ne se limitent pas en nombres de mots Ainsi, la maîtrise du vocabulaire semble dépasser la mise de l’accent sur la quantité et signifier plutôt le fait de conquérir différentes facettes lexicales C’est pour ces raisons que P Bogaards (1994 : 19), en partageant l’idée de D.-A Cruse (1986 : 77), propose une notion autre que le mot, appelée unité lexicale, pour désigner un élément ou entité lexicale qui peut assumer la fonction d’unité de base dans l’apprentissage du vocabulaire Cruse décrit unité lexicale (désormais UL) comme « l’union d’une forme lexicale et d’un sens unique » et il définit les unités lexicales comme
« les plus petites parties qui répondent aux deux critères suivants :
(i) une unité lexicale doit être au moins un constituant sémantique
(ii) une unité lexicale doit être au moins un mot »
Par constituant sémantique, Cruse entend une forme lexicale ayant une valeur sémantique identifiable Ainsi, mé- est un constituant sémantique avec une valeur négative dans des mots comme mécontent, méfiance ou mévente Mais il ne s’agit pas d’une UL parce que mé- n’est pas un mot D’autre part, tout en étant un mot, lune n’est pas une UL dans lune
de miel parce que lune n’est pas un constituant sémantique dans cette combinaison Une UL doit donc satisfaire aux deux conditions réunies : mécontent et lune de miel sont des UL et se trouvent ainsi à un même niveau, même s’ils sont dans une certaine mesure encore analysables
En s’appuyant sur la définition de Cruse, Bogaards (1994 : 19) constate que l’UL se distingue nettement des deux entités ayant souvent la place centrale sur le plan du lexique : le morphème et le mot Si le morphème se définit comme la plus petite unité de sens ayant une forme spécifique qui peut être dépendante (comme mé-) ou indépendante (un mot), l’UL est toujours au moins un mot Traditionnellement, le mot est avant tout une forme, simple ou complexe mais ne dépassant pas les limites d’une seule série de lettres (un seul mot graphique) et ayant une ou plusieurs sens « profonds » ; l’UL par contre, comprend un ou
Trang 25plusieurs mots mais n’a qu’un seul sens qui reste essentiellement le même d’un contexte à l’autre
Il va de soi, selon Bogaards, qu’avec la notion d’UL, nous ne pouvons pas résoudre tous les problèmes lexico-sémantiques au niveau de l’apprentissage des langues, mais l’adoption de ce concept a l’avantage de servir d’une unité centrale dans une théorie de l’apprentissage du vocabulaire On peut supposer que chaque UL constitue, en principe, une difficulté que doit surmonter l’apprenant
3 Le sens lexical
Premièrement, en adoptant la notion d’unité lexicale, l’auteur mentionné ci-dessus (1994 : 27) prend l’exemple d’un dialogue imaginaire :
- « Qu’est-ce qu’un nid ?
- C’est une sorte d’abri que se font les oiseaux dans les arbres et ó ils pondent leurs œufs » ;
afin de rappeler qu’il est possible de décrire le sens d’une UL au moyen d’autres UL
Ensuite, il précise que c’est notre compréhension du contexte qui décide du choix des
UL appropriées ainsi que leur sens précis, qu’en général c’est le contexte qui nous oriente vers une interprétation unique Il l’illustre par montrer le changement du sens du verbe sortir sous l’influence du contexte dans les phrases suivantes :
- Ce livre vient de sortir
- Elle sort d’une bonne famille
- Il sort tous les soirs
La troisième remarque est qu’une UL peut avoir un sens dénotatif ou un sens connotatif La dénotation est l’élément stable de la signification d’une UL et la connotation, les éléments subjectifs et variables selon les contextes de cette même signification Nous reprenons l’exemple de l’auteur Bogaards, l’UL vent dont le sens dénotatif « phénomène atmosphérique » évoque en français un certain nombre d’idées (sens connotatifs) : vitesse (filer comme le vent), versatilité (sentir le vent tourner), force (contre vents et marées) … Les sens dénotatif et connotatif forment deux facettes d’une même réalité langagière Selon le contexte, c’est tel aspect de l’un ou de l’autre qui est actualisé Une véritable maỵtrise du vocabulaire prendra en compte de cette dualité
Trang 26Enfin, il existe avec variété des expressions figées qui se présentent comme des expressions constituées de plusieurs mots pour former une unité syntaxique et lexicologique Elles présentent un caractère idiomatique: elles sont intraduisibles telles quelles dans une langue étrangère On les appelle aussi des idiotismes n’ayant aucun correspondant syntaxique dans une autre langue, pourtant qu’on peut traduire le sens d’une langue à autre:
Avoir le cœur gros = être triste Entre chien et loup = à la tombée de la nuit Ours mal léché = quelqu’un grossier Grosse légume = personnage important, influent
Le talon d’Achille = le seul point faible
Il existe aussi des expressions idiomatiques qui se définissent en général en termes de non-équivalence dans une autre langue, par exemple: Comment ça va?
4 La morphologie des unités lexicales
La morphologie est la partie de la grammaire qui étudie la structure interne des mots Elle se divise de façon traditionnelle en trois domaines : la flexion, la dérivation et la composition Bogaards (1994) a donné des remarques importantes concernant la dérivation et
la composition étant des mécanismes plutơt lexicaux et posant souvent problème aux apprenants de langues étrangères
D’abord, des affixes ont des sens très divers D’après cet auteur, si des préfixes comme anti- ou sous- ne posent pas beaucoup de problèmes, il en est autrement de préfixes comme para- (dans parachute, paraphrase) ou pour- (pourboire, poursuivre, pourvoir) ou de suffixe comme –at exprimant un acte dans assassinat, une dignité dans professorat, un collectif dans électorat, etc ou comme –ard, qui est tantơt positif ou neutre (montagnard) tantơt plutơt péjoratif (chauffard, froussard) L’auteur cite aussi d’autres difficultés causées par la polysémie d’éléments comme garde- (dans garde-boue et dans garde-malade) ou porte- (dans porte-couteau et dans porte-fenêtre) Il ajoute aussi le mot avant-gỏt n’étant pas
« la partie avant » du gỏt comme dans l’avant-bras est « la partie avant » du bras Ensuite, il remarque qu’un même sens peut être réalisé par des affixes bien différents Ainsi, le sens privatif est rendu par a- (anormal), par in- et ses variantes phoniques dans invariable, imprudent, illogique, par mal- dans malheureux, par mé- dans mécontent, etc., tandis que le
Trang 27sens collectif se trouve dans les suffixes –age (feuillage), -at (prolétariat, salariat) et –ature comme dans ossature
Bogaards a également remarqué qu’un même mot peut donner lieu à des dérivations très diverses Nous reprenons son exemple du verbe nuire, ce verbe connaît deux adjectifs dérivés, nuisible et nocif, qui ne sont pas strictement synonymes D’ailleurs, il existe des mots
en apparence morphologiquement complexes, mais les parties constituants ne sont ni des racines ni des affixes existant ou fonctionnant comme tels L’auteur l’illustre par des mots comme préparer, précoce, regarder, renoncer… En outre, pour des mots comme insolation,
il sera peut-être tenté de découvrir la racine sol plutôt que soleil L’auteur pose encore la question « Quel rapport pourrait-il deviner entre générer et génération ? »
La morphologie lexicale avec ses règles, ses exceptions reste vraiment un défi à relever pour un apprenant en langue étrangère
Il est à noter que c’est par le vocabulaire qu’est véhiculée la culture d’une communauté (M.-C Tréville & L Duquette 1996) Certes, le culturel est dans le mot Prenons un exemple : en apprenant le mot “âge” dans la structure “Quel âge avez-vous?”, il est nécessaire que l’apprenant connaisse une réalité de la culture occidentale en particulier française, qui considère une telle question lors de la première rencontre comme ‘‘manque de politesse’’; tandis que ce n’est pas toujours le cas au Vietnam car la demande sur l’âge est une habitude des Vietnamiens
Larson & Melby (1991 : 37) assurent que : « Insinuer que quelqu’un est un mouton sera interprété dans une culture comme dire de lui qu’il a les cheveux longs, dans une autre culture comme prétendre qu’il est un ivrogne, dans une autre encore affirmer qu’il est une personne qui ne réplique jamais.» Bogaards (1994) souligne qu’il ne suffit pas de connaître le
Trang 28contenu dénotatif des mots de la langue, il est indispensable de connaître les idées et les images évoquées par ces mots
Selon R Galisson (1991 : 120), tous les mots sont culturels, mais que certains sont plus culturels que d’autres et cela signifie que la charge culturelle des uns est plus lourde, plus évidente, plus disponible que la charge culturelle des autres Cet auteur donne l’exemple en répondant à la question « Le mot maison est-il culturel ? » La réponse est oui, d’après lui, évidemment, parce que la représentation qu’a le Français de la maison est bien différente de celle de l’Américain Le Français investit dans ce mot toutes sortes de fantasmes relatifs :
- à la propriété (cf la « maison individuelle ») ;
- à la sécurité (cf la clôture) ;
- à la stabilité (il n’envisage pas de la quitter, sa vie durant, et il espère la léguer à ses enfants) ;
- au standing (cf., l’expression : avoir pignon sur rue ») ;
- au clan (cf la « maison de famille », dont il n’aime pas séparer)
Nous reprenons cet exemple, non pour demander sur le sexe des anges, mais pour partager fortement l’idée que le mot est chargé d’éléments culturels A elles seules, les connaissances lexicales ne suffisent pas à expliquer des questions telles que : « Pourquoi la France est appelée aussi l’Hexagone ? » ou « De quoi s’agit-il dans le talon d’Achille ? » L’apprentissage du vocabulaire doit certainement s’en rendre compte
Trang 29
CHAPITRE 2 ÉTUDE DU TERRAIN
Le présent chapitre a pour but de découvrir comment les étudiants de la première année vivent leur autonomie dans l’apprentissage du français en général, et du vocabulaire en particulier La première section (I.) sera consacrée aux manuels de français dont ils se sont servis au lycée et à l’université ; la deuxième (II.) aux enquêtes que nous avons menées auprès des étudiants et des enseignants sur ce sujet
11, 12 ET Tout va bien ! 1, 2
Comme nous le savons, les études universitaires d’un apprenant sont toujours influencées par son travail antérieur Ainsi, nous allons étudier les manuels que les étudiants ont utilisés au lycée On distingue trois groupes :
- Le premier groupe travaillait avec les manuels de français du cursus de 3 ans ;
- Le second groupe avec les manuels du cursus de 7 ans ;
- Le dernier groupe avec les manuels de la filière des classes bilingues
1 Apprentissage de vocabulaire avec les manuels 10, 11, 12
1.1 Manuels 10, 11, 12 du cursus de 3 ans
Élaborés par une équipe de professeurs vietnamiens, ces trois manuels sont conçus pour les apprenants débutants de français Les auteurs ont choisi de baser leur travail sur les points suivants :
- l’insistance sur des actes de parole ;
- les moyens linguistiques liés à la situation communicative ;
- les images servant à exprimer une intention de communication ;
- une même intention de communication souvent introduite par plusieurs moyens linguistiques
En voici une brève description de l’architecture : chaque manuel comprend des Unités
et un Lexique
Trang 3016 Unités
12 Unités
9 Unités
a) Situation : on y trouve un dialogue accompagné d’une image, qui a pour but de présenter les actes de parole en question dans une situation de communication précise Il s’agit de dialogues courts ó apparaissent les expressions et les structures grammaticales nouvelles b) Systématisation : cette partie reprend l’ensemble des mots nouveaux relatifs au thème de la situation, ainsi que les règles grammaticales présentées sous la forme de tableaux récapitulatifs
c) Pratique : elle fournit des exercices de type linguistique et de type communicatif (expression écrite)
d) Texte : cette partie met à la disposition des élèves des textes ou dialogues servant à réutiliser les données langagières fournies dans les parties précédentes
e) Un pas de plus : elle donne des activités servant à consolider et à enrichir les connaissances linguistiques et socioculturelles de l’apprenant
Contrairement à ses prédécesseurs, présente une autre architecture :
Chaque unité commence par un document (un texte à lire) suivi des quatre activités suivantes:
a) Exploration du document : à l’aide de questions, on invite les élèves à survoler le document
et à observer les images pour en dégager le contenu global
b) Découvertes : cette partie présente des mots nouveaux et des structures nouvelles tirés du document
c) Compréhension détaillée : sous forme de questions, on demande aux élèves de relire le document pour une compréhension plus approfondie
d) Exercices de réemploi : ce sont des exercices qui favorisent une réutilisation des mots et des structures conformément aux objectifs communicatif et linguistique de chaque unité
Trang 31Observations
Ces manuels fournissent aux apprenants un vocabulaire fondamental du français Les mots clés de chaque Unité, qui porte en général sur un thème, sont présentés pour la plupart dans un contexte ; un même mot peut être utilisé dans plusieurs phrases L’existence des exercices de nominalisation aide certainement l’apprenant débutant à saisir la morphologie des mots
Dans nous apprécions l’effort que font les auteurs pour faire découvrir aux élèves un dictionnaire Français-Vietnamien C’est très important pour leur apprentissage
du vocabulaire
Pourtant, de temps à autre, des mots sont présentés hors de contexte C’est le cas de la page 93, Unité 11, (Systématique et pratique) : on ne cite que des structures courtes sans contexte précis :
« De l’amour à la haine »
J’aime
J’aime J’adore
Je regrette
Je suis désolé J’en ai assez
J’ai été très déçu J’ai été très déçu Il/elle m’a vraiment déçu
Je suis triste J’ai peur
Je déteste
Je hais
Trang 32Avec ces manuels, l’apprentissage du vocabulaire ne fait que commencer, la mémorisation intense est de rigueur Le vocabulaire sert principalement à la compréhension écrite et à l’expression écrite
1.2 Manuels 10, 11, 12 du cursus de 7 ans
Fruits d’une collaboration franco-vietnamienne, ces manuels font l’objet d’un bon investissement aussi bien concernant la forme que le contenu C’est une continuation des
6, 7, 8 utilisés au collège
Il s’agit d’un ensemble de douze leçons et de 4 paliers, soit 4 blocs de trois leçons chacun, suivis d’un palier de révision Chaque Palier propose une série d’activités de révision portant sur les trois leçons précédentes Le Palier final est complété par un ensemble d’activités proposées pour animer le club de français : choses à faire, activités ludiques, chansons à apprendre, saynètes à jouer… A la fin des manuels, il y a une table des verbes et
un Lexique, rassemblant la totalité du vocabulaire étudié depuis (manuel pour la première classe du collège), et qui donne des références aux textes ó apparaissent les mots nouveaux du livre
Concernant l’architecture des manuels, dans chaque leçon il y a deux parties :
+ Un tronc commun qui s’arrête avec « Pour le plaisir » + Un complément SH - Sciences humaines
Elles se décomposent comme suit :
Tronc commun
- Un texte de départ (deux textes pour 12)
- Découvrir : lecture du texte et exercices (ou questions) aidant à la recherche des mots clés, des chiffres, des signes pour suggérer la compréhension du texte
- Approfondir : trois tableaux qui présentent chacun un problème linguistique En général, ce sont des problèmes du lexique, de la syntaxe et de l’organisation du texte
- Comprendre : relecture et questionnaire pour une compréhension plus approfondie du texte de départ
- Pour conclure : rappel des informations essentielles de la leçon
- Pour le plaisir : chanson, façon de parler, poème, citation, dessin humoristique
Section Sciences humaines (activités de production écrite et orale) :
Trang 33- S’exprimer (et un Texte 3 pour ) : réemploi des connaissances apprises pour s’exprimer
- Pour aller plus loin : deux documents et activités complémentaires
Observations
À ce stade, les apprenants ne sont plus débutants C’est pourquoi les auteurs ont une grande occasion de renforcer leur vocabulaire et de l’élargir d’un savoir culturel
On peut y trouver des textes de genres variés Le premier tableau dans chaque
« Approfondir » est réservé à l’apprentissage des mots, ó l’on aborde la formation des mots (polysémie, synonymie, antonymie, définition), et la façon de faire un dictionnaire
La partie Façon de parler encourage l’apprenant à employer des expressions figées à l’oral et
à l’écrit Tout porte à croire que ces manuels guident l’apprenant dans l’acquisition du vocabulaire, ce qui contribue à son auto-apprentissage de la matière
Il est à remarquer que ces trois manuels n’utilisent plus de dialogues comme document
de départ Les exercices s’appuient principalement sur des textes
L’objectif principal du programme Classes bilingues est de préparer des générations d’élèves parfaitement francophones et d’un bon niveau scientifique, à être capables d’accéder aux filières francophones de l’enseignement supérieur
Ces Recueil de textes sont élaborés pour les trois années des classes bilingues du lycée
du cursus A dans le programme de l’Enseignement Intensif Du et En Français Il s’agit d’une version corrigée comprenant notamment les compléments en Culture francophone Ces manuels visent à développer chez l’apprenant les habiletés dans les compétences suivantes :
Compréhension orale, Expression orale, Compréhension écrite, Expression écrite,
Connaissance de la langue, Culture francophone, Textes littéraires, Français de spécialité
Le Recueil de textes 10e A est accompagné d’une cassette vidéo reprenant des documents pour les trois thèmes, et puis trois autres cassettes vidéo, soit une pour chacun des
Trang 34trois thèmes Chaque thème comporte un sommaire portant sur le détail des objectifs et les activités réparties en 5 Unités de 6 séances de 45 minutes Les auteurs invitent aussi l’enseignant à définir le mode de travail (individuel, en groupe, avec la classe) de chaque séance, en suivant ou non les suggestions du recueil.L’enseignant peutégalement ajouter aux
30 séances les compléments grammaticaux et francophones requis soit par les besoins et souhaits de sa classe, soit par harmonisation des contrôles au niveau national
Les Recueil de textes 11e A et 12e A suivent la même structure que le manuel précédent, et chacun propose des activités organisées autour de 4 thèmes Les activités sont réparties en 4 Unités de 9 séances de 45 minutes Un Bilan de 10 séances permet de réviser les connaissances et surtout d’associer et d’approfondir les différents savoir-faire et habiletés acquis au fil des unités Ces manuels s’appuient sur des documents variés par leurs genres, leurs types, leurs origines, leurs univers… et cherchent à mettre les jeunes Vietnamiens francophones au contact des actualités de caractère et d’intérêt universels Ils sont accompagnés du matériel audio et vidéo Outre les compétences citées, ces Recueil de textes proposent des activités en Méthodologie abordant les techniques et méthodes permettant à l’élève une autonomie progressive dans son apprentissage de la langue française, et dans son travail scolaire en général Par ailleurs, s’ils encouragent les interrogations et le travail individuels, ils mettent l’accent plus encore sur les échanges en groupe et entre pairs, sous la coordination de l’enseignant
Ainsi conçus, ces livres ont une double fonction : celle de manuel d’apprentissage et celle de cahier d’activités Ils constituent des outils de référence dont l’élève peut bénéficier jusqu’à la fin de sa 12è A et au-delà
Observations
Ces Recueil de textes sont vraiment une « œuvre grandiose » et précieuse pour les apprenants de français au lycée, qui ont déjà atteint un niveau de langue considérable au bout
de quatre années d’études au collège
Une énorme quantité de vocabulaire accompagnée d’une richesse remarquable d’éléments culturels y est présentée Ces documents exigent un grand effort de la part de
Trang 35l’apprenant, comme l’indique le mot enseignement Intensif Les activités étant nombreuses et complexes, les élèves doivent travailler beaucoup, l’auto-apprentissage est indispensable pour eux Le matériel audio et vidéo reste un point fort indéniable de ces manuels par rapport aux manuels du cursus de 3 et ceux de 7 ans L’enrichissement lexical de l’apprenant est lié au développement égal des quatre compétences de communication L’apprenant y reconnaît toutes les facettes des connaissances lexicales
Observations générales
Après avoir observé les trois types de manuels de français, nous relevons un décalage
de niveau chez les étudiants dès leur entrée à l’université Nous supposons qu’il y ait au moins trois niveaux différents dans la maîtrise du français et dans les méthodes d’apprentissage de la langue Ainsi les étudiants issus de la filière bilingue prennent l’avantage sur ceux du système
de 7 ans qui, à leur tour, ont le dessus sur ceux du système de 3 ans Nous constatons également qu’il y a des étudiants possédant un bagage lexical potentiel, mais qu’ils n’avaient guère d’occasions d’en utiliser pour la compréhension orale et l’expression orale C’est pour cela que certains pratiquent l’oral avec leurs mots plus aisément que d’autres Cet écart semble inévitable
2 Apprentissage de vocabulaire avec les manuels Tout va bien ! 1, 2
Les étudiants de la première année utilisent actuellement Tout va bien! 1 et Tout va bien! 2 Destinées aux grands adolescents et adultes, ces méthodes progressives visent l’acquisition d’une compétence de communication du niveau A1 (introductif et découverte) jusqu’aux niveaux A2 (survie) et B1 (seuil) du Cadre Européen Commun de Référence Suivant un découpage régulier, chaque méthode comprend 6 unités (une unité a 2 leçons), 6 bilans et trois projets avec un CD audio Elle est prévue pour 130 heures de cours environ, soit de 8 à 10 heures par leçon Une leçon est organisée en général avec :
- une double page « situations »,
- une double page « grammaire »,
- une page « lexique/ prononciation »
- une page « civilisation »
Trang 36- 4 pages d’activités (compétences d’expression orale, de compréhension et production écrites, récapitulation des principaux actes de parole)
Après chaque unité, il y a une récapitulation et un bilan, qui permettraient à l’apprenant de se situer dans son apprentissage et d’acquérir une autonomie graduelle La page de vérification des connaissances « bilan langue » donne des exercices de grammaire, de lexique et de prononciation Cette page est complétée par 2 pages de « bilan communication » dans le Portfolio
Conçue pour un enseignement en groupe classe, chaque méthode réserve une large part à l’auto-apprentissage, notamment grâce au cahier d’exercices et au Portfolio ajouté au livre de l’élève Le Portfolio, un petit livret personnalisé, permet à l’apprenant de prendre conscience de son parcours individuel par compétences, et d’attester de son profil linguistique Dans ce petit livret, outre le « bilan communication », pour toutes les 2 unités, la partie « faire le point » aide l’élève à s’auto-évaluer en termes de savoir-faire ; et 2 pages de
« passeport » lui permettent de se situer par rapport aux niveaux A1, ou A2, B1
Ces méthodes offrent une variété des modes travail : les activités soit avec le classe dans son ensemble, soit en petits groupes, soit individuellement Les activités répondent au critère de la progression en spirale ó l’étudiant découvre et réutilise les éléments présentés Les documents et projets proposent des situations de communications Ils cherchent à sensibiliser l’élève aux registres de langue au moyen des supports authentiques ou proches de l’authentique, à stimuler sa motivation, et à éveiller sa curiosité pour la culture francophone ainsi que son intérêt pour la langue
groupe-Observations
Nous constatons que les méthodes Tout va bien ! 1 et Tout va bien ! 2 mettent un accent considérable sur le travail d’apprendre Cette centration sur l’apprenant se montre clairement dans l’objectif fixé par les auteurs L’autonomie en apprentissage est à la fois soulignée par la combinaison des activités en groupe et individuelles, et par l’aide du Portfolio, ce qui est appréciable, c’est qu’elle est visée dans une progression en spirale L’auto-évaluation, qui reste une bonne étape dans l’auto-apprentissage, y occupe une place importante Cela aide l’apprenant à mesurer le résultat de ses études, à déterminer son travail
Trang 37antérieur et à planifier son apprentissage dans le futur Ainsi, il pourra prendre la responsabilité de ses études et donner ses propres décisions pour celles-ci
Il est à noter que le vocabulaire dans ces méthodes s’apprend tout au long du développement des quatre compétences de communication Il est présenté avec des activités spécifiques de mémorisation et de réemploi Il fait également l’objet d’un bilan à la fin de chaque unité Nous remarquons aussi que l’acquisition lexicale de l’apprenant s’effectue, pour
la plupart du temps, en même temps que l’enrichissement de la civilisation, et ce dans des situations de communication bien concrètes
II ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS DES ENQUÊTES
La révélation des questions théoriques nous a amenée à penser que apprentissage ne refuse pas le rôle de l’enseignant mais au contraire, celui-ci est facilité par une pédagogie centrée sur l’apprenant De ce point de vue, nous avons mené deux enquêtes auprès des étudiants et des professeurs en première année de notre Département de Langue et
l’auto-de Civilisation françaises l’auto-de l’Université l’auto-de Langues et d’Étul’auto-des internationales - Université Nationale de Hanoi À partir des résultats de ces enquêtes, nous ferons des remarques nécessaires pour essayer de donner des propositions pédagogiques contribuant à la situation étudiée
1 Enquête auprès des étudiants
1.1 Fiche d’enquête
Afin d’avoir une vue panoramique sur l’auto-apprentissage du vocabulaire en première année, nous avons rédigé une fiche d’enquête comprenant 24 questions dont la plupart sont à choix multiples (QCM) ; il y a aussi une question qui demande aux étudiants de numéroter les items par ordre d’importance Dans l’intention de recevoir des informations variées, nous laissons à la fin de quelques QCM un certain espace pour que des enquêtés citent des exemples ou précisent leurs opinions La question 23 étant ouverte, elle donne aux étudiants l’occasion de présenter librement leurs propositions
- sur le centre de documentation du Département,
- sur les enseignants et les étudiants eux-mêmes,
Trang 38- sur leur manuel et d’autres matériels au profit de l’autonomie dans l’enrichissement lexical
Les fiches d’enquête élaborées sont anonymes Elles sont traduites en vietnamien pour assurer une bonne compréhension auprès des étudiants
L’enquête s’est déroulée au milieu du deuxième semestre de l’année scolaire
2008-2009 Les étudiants ont achevé les trois quarts de la première année, ainsi c’était le bon moment pour une telle enquête Nous avons distribué 75 fiches aux 5 classes et avons recueilli
69 fiches plus ou moins toutes remplies
1.2 Analyse des résultats et remarques générales
b) Vient ensuite la sélection des 5 items qui représentent 5 éléments décisifs de l’apprentissage autonome d’un individu Les étudiants les numérotent par ordre d’importance
Ordre d’importance Apprendre en autonomie, c’est : 1 er 2 ème 3 ème 4 ème 5 ème
Total
1) pouvoir déterminer des objectifs
d’apprentissage
11 (choix)
et techniques d’apprentissage
(97%) 4) pouvoir contrôler et évaluer soi -
d’apprentissage réalisées
(93%)
5) avoir la responsabilité et faire une
planification détaillée (rythme, temps,
lieu…) de son apprentissage et assumer
48 (70%)
(100%)
Trang 39cette planification afin d’atteindre de
- à une grande conscience de l’apprentissage chez l’apprenant ;
- à l’activité et la créativité de l’apprenant ;
- à son besoin d’élargir les connaissances ;
- à des méthodes d’apprentissage efficaces ;
- à la capacité de trouver de diverses sources d’informations comme le centre de documentation et les médias
Question 2
Nous cherchons à savoir à quel degré notre public estime le problème de apprentissage pour l’acquisition d’une langue étrangère
l’auto Aucun (0%) ne pense que l’autol’auto apprentissage est peu important,
- 100% fournissent une réponse positive : c’est important (9%), c’est très important (91%) Question 3
Dans cette question, nous proposons 14 facteurs influençant l’auto-apprentissage et 3 degrés d’influence : Beaucoup, Peu, Aucune
Degrés d’influence Numéro
LES FACTEURS
1 Capacité de déterminer l’objectif d’apprentissage
judicieux
62 (Choix)
Trang 404 Avoir l’habitude de consulter des documents
complémentaires
5 Avoir la capacité de chercher et lire des livres selon
l’exigence de la matière étudiée
6 Avoir des connaissances fondamentales nécessaires pour
l’auto- apprentissage
8 Avoir la volonté de surmonter des difficultés rencontrées
dans l’auto - apprentissage
10 Avoir la capacité de contrôler et évaluer soi-même les
résultats de son apprentissage afin de le régler
13 Les enseignants enseignent bien, ce qui stimule l’activité
de l’auto-apprentissage des étudiants
14 Les conditions matérielles de l’Université au service de
l’auto-apprentissage sont suffisantes
Nous constatons que les facteurs Numéro 7, 1, 8, 3, 13 sont perçus comme les plus
« grands » La bonne conscience (numéro 7) et la détermination d’un objectif d’apprentissage judicieux (numéro 1) ont le nombre de choix le plus élevé : respectivement 63 et 62 (Beaucoup), soit 92% et 90% Les chiffres démontrent également que l’intérêt pour apprendre, les connaissances fondamentales nécessaires pour l’autonomie, et le besoin d’enrichir le savoir passent aussi pour les facteurs importants chez les étudiants
Ensuite, ils optent pour les numéros 4 et 5 un peu nombreux dans la colonne Peu (28
et 29 choix, c’est-à-dire 41% et 43%) Nous supposons donc que près de la moitié des étudiants de la 1ère année n’aient pas encore l’habitude, ni la capacité de consulter des documents complémentaires durant leurs études
En comparant les résultats des deux facteurs 8 et 9, nous notons que dans l’apprentissage, si l’intelligence permet vraiment un certain avantage, c’est la volonté de surmonter des difficultés, et l’effort qui décident