8 Abréviations S Temps de l’énonciation d’après Reichenbach, Comrie R Temps de référence d’après Reichenbach, Comrie E Temps de l’événement d’après Reichenbach, Comrie IE Intervalle de
Trang 1UNIVERSITÉ DE HANOI DÉPARTEMENT D’ÉTUDES POST-UNIVERSITAIRES
ÉTUDE CONTRASTIVE DE LA TEMPORALITÉ EN FRANÇAIS ET EN
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Remerciements
Mes remerciements vont d’abord au professeur Vũ Văn Đại qui a accepté de diriger mon travail de recherche Je le remercie pour sa patience ainsi que pour ses conseils me permettant de mener à bien cette recherche dont l’élaboration est plus longue que d’habitude en raison de mes occupations professionnelles Sans lui, je n’arriverais pas à la finir
Je tiens ensuite à remercier mes parents et mes proches pour m’avoir soutenu moralement et physiquement dans la préparation de cette thèse Sans eux, je ne pourrais pas l’achever
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Attestation sur l’honneur
J’atteste sur l’honneur que cette thèse a été élaborée par même et que les données et les résultats présentés sont exacts et n’ont jamais été publiés ailleurs
moi-Nguyen Duc Nam
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Table des matières
1.1 Conceptions du temps d’après Reichenbach (1947), Co Vet (1980) et
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Chapitre 5 État de lieu des recherches sur la temporalité en vietnamien 90
5.1 Première tendance : absence des moyens de représentation du temps et
Trang 6Quatrième partie Analyse contrastive des systèmes de représentation temporelle et
Chapitre 8 Analyse contrastive des deux systèmes de représentation temporelle et
8.2 Différences de représentation de l’aspect grammatical 142
Trang 74
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Liste des figures
Figure 1 : Système de Co Vet 27
Figure 2: Aspect prospectif 45
Figure 3 : Aspect rétrospectif 45
Figure 4 : Aspect imperfectif 45
Figure 5 : Aspect perfectif 46
Figure 6 : Aspect aoristique 46
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Liste des tableaux
Tableau 1 : Système de Reichenbach 24
Tableau 2 : Catégorisation des procès d'après Vendler 39
Tableau 3 : Autres possibilités 39
Tableau 4 : Modification du système de Vendler 42
Tableau 5 : Catégorisation des procès d'après M.B Olsen 42
Tableau 6 : Récapitulation des valeurs temporelles et aspectuelles des formes verbales en français 70
Tableau 7 : Grille d’analyse de la temporalité en français 72
Tableau 8 : Répartition des catégories de procès 73
Tableau 9 : Répartition des formes verbales dans le corpus 73
Tableau 10 : Répartition des échantillons suivant les catégories de textes 73
Tableau 11 : Répartition des échantillons suivant les catégories de proposition 74
Tableau 12 : Répartition des formes verbales en fonction des catégories de procès 74
Tableau 13 : Répartition des formes verbales en fonction des valeurs temporelles 74
Tableau 14 : Répartition des formes verbales en fonction de leurs valeurs aspectuelles 75
Tableau 15 : Répartition des formes verbales en fonction de leurs interprétations 75
Tableau 16 : Répartition des valeurs temporelles et aspectuelles du passé composé 84
Tableau 17 : Répartition des marqueurs suivant les genres de texte (statistiques faites par Nguyen Kim Than) 120
Tableau 18 : Répartition des échantillons par types de texte 124
Tableau 19 : Répartition des marqueurs suivant les types de texte 124
Tableau 20 : Répartition par types de proposition 125
Tableau 21 : Taux d’absence des marqueurs suivant les types de proposition 125
Tableau 22 : Répartition des types de procès 126
Tableau 23 : Répartition des marqueurs par types de procès 126
Tableau 24 : Répartition des circonstanciels de temps 126
Tableau 25 : Répartition des circonstanciels de temps par types de texte 126
Tableau 26 : Répartition des circonstanciels de temps par marqueurs 127
Tableau 27 : Répartition des marqueurs préverbaux 127
Tableau 28 : Répartition des valeurs temporelles des marqueurs préverbaux 127
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Tableau 29 : Répartition des marqueurs par valeurs aspectuelles 127 Tableau 30 : Répartition des emplois des marqueurs par interprétations 128 Tableau 31 : Répartition des procès sans marqueurs suivant leurs valeurs temporelles 134 Tableau 32 : Répartition des procès sans marqueurs suivant leurs valeurs aspectuelles 134 Tableau 33 : Répartition des procès sans marqueurs suivant leurs interprétations temporelles 134 Tableau 34: Correspondance entre les marqueurs préverbaux en vietnamien et les formes
de l’indicatif en français 146
Tableau 35 : Répartition des formes verbales correspondant au « đã » par types de procès
146 Tableau 36 : Répartition les formes correspondant aux échantillons sans marqueurs en vietnamien suivant les types de procès 149 Tableau 37 : Correspondants des formes verbales de l’indicatif français aux marqueurs vietnamiens 150 Tableau 38 : Répartition des marqueurs vietnamiens suivant les types de procès des échantillons source en français 151
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Abréviations
S Temps de l’énonciation d’après Reichenbach, Comrie
R Temps de référence d’après Reichenbach, Comrie
E Temps de l’événement d’après Reichenbach, Comrie
IE Intervalle de l’énonciation d’après Klein
IA Intervalle d’assertion d’après Klein
IP Intervalle du procès d’après Klein
+++++++++ Représentation du temps dans lequel le procès prend place
[ ] Représentation du temps de l’intervalle d’assertion
-++++++++++
Représentation de la structure temporelle du procès de type deux états dont celui de source et celui de cible
Trang 12Les données temporelles sont encodées d’après un mécanisme très complexe Il implique plusieurs éléments lexicaux et/ou grammaticaux On peut en mentionner entre autres, le verbe et ses compléments, la morphologie verbale (pour les langues qui n’ont pas
de formes verbales, il s’agit des particules, des suffixes verbaux1
), les circonstanciels temporels dont les adverbes de temps2 Ces éléments vont se combiner dans un énoncé d’après les règles bien définies et propres à chaque langue Il est à remarquer qu’ils entretiennent une relation interactionnelle entre eux et que l’un contraint l’interprétation de l’autre et vice versa ainsi que celle de l’ensemble Pour décoder les données temporelles d’un énoncé particulier, l’auditeur (ou le lecteur en cas d’un document écrit) doit tenir compte, d’une part, de la valeur sémantique de chaque élément en relation avec son entourage et d’autre part des facteurs contextuels Ces derniers imposent certaines contraintes dans l’interprétation temporelle de l’énoncé
C’est en raison de sa complexité que dès l’antiquité, la temporalité des langues a fait l’objet d’étude de tant de savants dont Aristote Ce dernier mentionne la présence et l’utilisation des formes verbales servant à indiquer le moment ó a lieu la situation décrite Cependant, ce savant n’arrive pas à expliquer pourquoi le grec ancien a besoin de plus de trois formes verbales tandis que le temps se décline en trois dimensions, à savoir le passé,
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le présent, le futur et que chaque forme verbale sert à représenter une dimension ou un temps La même question peut se poser pour le français Pour représenter le passé, cette langue a six formes verbales dont le passé récent, le passé composé, le passé simple, l’imparfait, le plus-que-parfait, le passé antérieur sans compter le passé surcomposé qui n’est plus d’'emploi courant
Outre la question sur la nature des formes verbales, les chercheurs doivent faire face à d’autres non moins difficiles Pour le français, pourquoi accepte-t-on facilement
l’énoncé « On a trouvé la clé » tandis que celui de « on trouvait la clé » demande un contexte particulier pour être grammaticalement correct ? Ou pourquoi peut-on dire « le livre est en français » et non pas « le livre a été en français » ? Pour le vietnamien, quelle est la raison pour laquelle les énoncés tels que « Cô ấy đã trẻ » ou « Bạn ấy đang hiểu vấn
đề » sont réfutés ou mis en doute par les Vietnamiens D’autres questions peuvent se poser
si on compare le français avec le vietnamien En français, les informations temporelles et aspectuelles de l’action décrite par un énoncé sont représentées essentiellement et
obligatoirement par les formes verbales Par contre, les mots comme «đã », « đang »,
« sẽ » qualifiés comme marqueurs de temps en vietnamien ont un usage qui semble non obligatoire Les deux énoncés « tôi ăn cơm » et « tôi đang ăn cơm » ont souvent la même traduction en français « je mange du riz»
De plus, la détermination de leur valeur reste encore non résolue par les linguistes Donc, quelles sont les divergences et les convergences entre les systèmes de représentation temporelle et aspectuelle de ces deux langues? Pour y répondre, dans le cadre de cette thèse, nous ferons une analyse contrastive de ces deux systèmes Notre travail se limite à l’étude des formes verbales du mode indicatif en français et les marqueurs préverbaux en vietnamien
Nous espérons que les résultats de notre travail pourraient contribuer à une présentation plus claire et plus opératoire du mécanisme d’encodage des informations temporelles en français et en vietnamien Et par ce fait, nous pouvons réduire des difficultés et rendre plus facile l’apprentissage du français chez les apprenants vietnamiens Dans ce qui suit, nous ferons une brève description des questions d’ordre théorique qui intéressent jusqu’à présent les linguistes ainsi que ceux avec des conceptions dites traditionnelles À partir de là, nous présenterons aussi nos objectifs et notre méthodologie
de recherche pour les atteindre
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2 État actuel des recherches
De l’époque d’Aristote jusqu’à maintenant, d’innombrables recherches ont été réalisées dans le but de comprendre le mécanisme d’encodage des informations temporelles des langues naturelles Elles visent essentiellement à répondre à deux
questions principales, à savoir : « Comment peut-on décrire la localisation de la situation
décrite à l’énoncé sur l’axe temporel ?» (Question relative à la notion du temps) et
« Comment l’organisation temporelle interne de la situation est-elle décrite ?» (Question relative à l’aspect) 3
Dans leurs travaux sur la temporalité dans les langues, les linguistes se sont mis d’accord pour dire que la localisation d’un intervalle sur l’axe du temps doit se faire à l’aide d’un autre servant de référence Ce dernier peut être soit celui de l’énonciation, soit celui d’un événement bien défini par les interlocuteurs Dans le deuxième cas, il peut s’agir
d’un fait culturellement connu tel que la naissance de Jésus Christ (localisation par calendrier) ou bien d’une situation déterminée par le contexte (localisation par les relations anaphoriques temporelles)
Pour positionner un intervalle sur l’axe temporel, les langues ont deux moyens explicites qui sont les moyens lexicaux et grammaticaux Les premiers comprennent les
mots, les adverbes, les circonstanciels de temps comme il y a deux jours, l’année dernière, quand je suis entré Les deuxièmes sont les marques d’une utilisation systématique et
obligatoire Dans la plupart des cas, ces marques sont portées par la morphologie verbale
Les oppositions entre entra/entrera en français ou did /will do en anglais en sont des
Pour la deuxième question concernant l’aspect, les linguistes distinguent l’aspect lexical de l’aspect grammatical Le premier concerne les caractéristiques temporelles
3 Ces deux questions sont soulevées par Gustave Guillaume (1929)
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inhérentes à la représentation sémantique formées à partir de l’ensemble d’éléments linguistiques décrivant la situation-concept Cette représentation sémantique est appelée
dorénavant le procès Dans notre travail, ce dernier est mis entre les parenthèses (<>) et
écrit en majuscule Les linguistes distinguent six caractéristiques temporelles internes du procès qui sont : télique/non télique, dynamique/non dynamique et durative/non durative
L’aspect grammatical est défini comme les caractéristiques temporelles de l’occurrence concrète du procès en question Avec la morphologie verbale, les adverbes, les périphrases, les particules, les affixes… un procès peut être décrit par une multitude d’aspects comme
Les linguistes insistent sur la différence entre le temps et l’aspect grammatical En fait, le temps représente les relations temporelles entre le point du procès (E) et le point de référence Ces relations comprennent l’antériorité, la postériorité, la simultanéité Autrement dit, le temps est DÉICTIQUE Par contre, le choix des aspects grammaticaux est totalement indépendant de la position du procès sur l’axe temporel En d’autres termes, l’aspect grammatical est NON DÉICTIQUE
Concernant l’aspect lexical, en se basant sur trois oppositions de caractéristiques
qui sont télique/ non télique (atélique) ; dynamique/ non dynamique (statique) ; duratif/ non duratif (ponctuel), Z Vendler (1967 ) a divisé les procès en quatre catégories : état, activité, accomplissement, achèvement (réalisation instantanée)
Trang 16Cependant, ces théories sont contestées sur plusieurs points En premier lieu, la définition du temps (temps linguistique) comme les relations entre le point du procès décrit (E) et le point de référence (soit celui de l’énonciation (S), soit celui défini suivant le contexte) est remise en cause Suivant cette définition, les temps verbaux français comme l’imparfait, le passé composé… sont des temps absolus du passé Ces formes verbales servent donc à représenter l’antériorité du E par rapport au S En leur présence, le procès est interprété comme ayant lieu avant le moment de l’énonciation La situation décrite par
le procès <IL TRAVAILLER DANS LE JARDIN> de l’énoncé (5) ci-dessous :
(5) Quand je suis entré, il travaillait dans le jardin
devrait être interprétée comme prenant fin avant le moment de l’énonciation Cependant, cette interprétation n’est pas la seule Le procès peut durer et inclure le S car on peut toujours ajouter « il y travaille toujours »
La distinction entre les temps absolus et les temps relatifs est aussi un des sujets de discussion Est-elle bien justifiée dans l’exemple suivant ?
(6) Elle naỵtra, fera de bonnes études, s’occupera de la politique et évitera la
troisième guerre mondiale On dira après sa mort qu’elle fut une hérọne
(7) Dans 20 ans, on comprendra que Robert Kennedy fut un homme politique plus important que son frère 5
4 Nous ferons une étude plus détaillée des formes verbales de l’indicatif en français dans la partie portant sur la temporalité en français
5 Les deux exemples (6) et (7) sont repris de C Vetters (1996) D’après ce linguiste, le procès
<ELLE ÊTRE UNE HÉRỌNE> a lieu avant le procès <ON DIRE> C’est en insistant sur cette relation que
le locuteur a choisi le temps du passé La même explication peut être appliquée pour l’exemple (7)
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Suivant le contexte, les procès <ELLE ÊTRE UNE HÉRỌNE> et <ROBERT KENNEDY ÊTRE UN HOMME POLITIQUE PLUS IMPORTANT QUE SON FRÈRE> devraient avoir lieu après l’énonciation La forme verbale choisie devrait être le futur
simple : « on dira après sa mort qu’elle sera une hérọne » Par contre, le locuteur a choisi
le passé simple Pour l’aspect grammatical, plusieurs linguistes contestent qu’il représente les différentes modes de présentation du procès indépendamment de sa relation avec un
autre point sur l’axe temporel Ainsi, l’énoncé «Il travaillait » marque-t-il l’aspect
imperfectif En choisissant l’imparfait, le locuteur présente le procès comme en cours En fait, pour juger donc un procès en cours ou terminé, il faut le mettre en comparaison avec
un autre moment servant de repère
La catégorisation des procès proposés par Vendler (op.cit.) est aussi critiquée pour
ne pas rendre compte du fait qu’un procès peut changer de caractéristiques temporelles en fonction du contexte ou des éléments lexicaux entourant le verbe Les procès tels que
<ELLE COURIR> de l’énoncé (8) ci-dessous sont, par conséquent, qualifiés de non téliques
comme « đã », « sẽ », « đang », « rồi » ont des valeurs temporelles Cependant, une autre
question se pose, s’agit-il des mots grammaticaux ou des moyens lexicaux ? En fait,
l’emploi de ces mots est assez compliqué Dans certains cas, il est optionnel comme « Cơ
ấy mệt »/ « Cơ ấy đang mệt » Le mot « đang » dans l’énoncé « Cơ ấy đang mệt » a plutơt
la valeur emphatique que celle d’expression temporelle Par contre, dans certains cas, les
marqueurs sont obligatoires comme « Khi tơi đến, anh ấy đã đi rồi »
Les conclusions sur les valeurs des marqueurs constituent un autre sujet de
recherche En effet, pour certains linguistes, les mots comme « đã », « đang », « sẽ » servent à marquer les différences temporelles Le mot « đã » marque le passé, « đang » le
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présent et « sẽ » le futur Par contre, d’autres chercheurs soutiennent l’hypothèse des
marqueurs aspectuels Pour ces derniers, ces trois mots représentent respectivement les aspects perfectif, imperfectif et le prospectif
Une autre limite des études précédentes sur la temporalité est leur méthodologie de travail En effet, ces linguistes s’intéressant à cette problématique se contentent souvent des exemples concrets repris hors du contexte ou fabriqués par eux-mêmes alors qu’il vaut mieux vérifier leurs conclusions par une analyse du corpus
4 Objectifs et délimitation de l’étude
Dans le cadre de ce travail, notre objectif est d’étudier la temporalité en français et
en vietnamien et d’en faire la comparaison pour en tirer des observations et remarques pertinentes afin de proposer des traitements optimaux à chaque cas Cependant, nous sommes conscient que ce sujet d’étude couvrira un champ de travail très vaste car les informations temporelles d’une langue sont représentées par la combinaison de divers moyens linguistiques dont les modes verbaux, les formes verbales, les suffixes, les préfixes (les particules préverbales, en cas de langues non flexionnelles comme le vietnamien, le chinois), les circonstanciels temporels, etc Ces moyens se combinent d’après des mécanismes bien spécifiques de chaque langue qui définissent la compatibilité entre les éléments ainsi que leurs interprétations Considérons l’exemple (9) en français et sa traduction en vietnamien (10)
(9) *Il travaillait dans le jardin en deux heures
(10) *Anh ấy đang làm việc trong vườn trong vòng hai giờ
Nous voyons que le procès télique marqué par « en deux heures » ou « trong vòng hai giờ» est incompatible avec la forme verbale de l’imparfait et le marqueur « đang » en vietnamien
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De plus, les relations interphrastiques et les informations énonciatives participent aussi à la représentation et à l’interprétation temporelle L’exemple suivant confirme encore une fois ces constatations :
(11) Paul a fait tomber la bouteille de la table Elle est cassée en plusieurs pièces
(12) Paul écrit (Bien qu’au moment de l’énonciation, Paul soit en train de parler avec quelqu’un d’autre.)
Pour l’exemple (11), nous comprenons que le procès « la bouteille est cassée en plusieurs pièces » est la conséquence de l’action « Pierre a fait tomber la bouteille » et
qu’il a lieu après l’action accomplie par Pierre L’énoncé (12) est accepté lorsque Pierre est écrivain Il vit de son plume
En raison de la complexité du sujet de travail, nous sommes obligés d’en fixer des limites Par conséquent, concernant la temporalité en français, nous travaillons essentiellement sur les formes verbales de l’indicatif Notre choix est expliqué par le fait que l’indicatif représente la majorité des énoncés Toutefois, nous ne réfutons pas la valeur temporelle des autres modes verbaux tels que le conditionnel ou le subjonctif En effet, l’emploi du conditionnel en tant que marqueur du futur ou le futur antérieur dans le passé des exemples ci-dessous en sont des preuves
(13) Sara a appris hier que son frère l'accompagnerait chez ses parents
(14) Martine croyait que Frédéric serait parti du bureau à cette heure
Cependant, dans ces deux exemples précités, la valeur modale de probabilité a une fonction plus prépondérante que la valeur temporelle
Pour le français, nous proposerons ainsi de faire une description des valeurs temporelles, aspectuelles des formes verbales de l’indicatif et de prévoir leur interprétations dérivées lors de leurs combinaisons avec différents types de procès, des catégories de circonstanciels de temps ainsi que des variations contextuelles Ces variations peuvent être des informations contextuelles ou des relations de cause- conséquence…En ce qui concerne le vietnamien, comme cette langue n’a pas de formes verbales, nous déterminerons les valeurs temporelles et aspectuelles des marqueurs ayant une fréquence
d’emploi importante tels que « đã », « đang », « sẽ » Ce choix est principalement motivé
par le fait que la plupart des linguistes ont reconnu leurs valeurs de représentation
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temporelle et aspectuelle Leurs interprétations typiques ainsi que dérivées dans un cadre interactionnel avec les informations pragmatiques de l’énoncé retiennent également notre attention lors de notre analyse L’absence de ces marqueurs fait, d’autre part, l’objet de notre recherche Dans ces cas, nous essayerons d’expliquer comment les informations temporelles et aspectuelles sont représentées sans recourir aux moyens de représentation explicites
À la différence des travaux précédents, nous adopterons l’approche sémantique Autrement dit, au lieu de porter notre attention sur les facteurs lexicaux et sémantiques servant à représenter les informations temporelles et aspectuelles dans ces deux langues, nous essayons de les mettre en relation interactive et de déterminer leur mécanisme de fonctionnement Nous approfondirons notre étude en comparant les conclusions obtenues des analyses de temporalité en vietnamien et en français Nous espérons déterminer en premier lieu les divergences et les convergences en matière d’expression temporelle en français et en vietnamien Dans la suite, nous essayerons de trouver des équivalences dans ces deux langues Nous comprenons que ces équivalences ne sont pas totales en raison de plusieurs différences dont celles de la pensée, de la morphologie, de la culture, de moyens d’expression Cependant, la comparaison inter-linguistique nous permet de mieux comprendre le fonctionnement du système de représentation temporelle et aspectuelle de ces deux langues De plus, elle peut être utile pour les étudiants lors de leur apprentissage du français langue étrangère et pour la traduction du français en vietnamien et du vietnamien en français
pragmatico-5 Structure de la thèse
Notre étude se divise en quatre parties La première est réservée aux questions théoriques sur la temporalité des langues Nous y présenterons les conceptions traditionnelles du temps, de l’aspect lexical, de l’aspect grammatical et les nôtres sur ces conceptions Nous y expliquerons aussi pourquoi nous choisirons l’approche pragmatico-sémantique pour notre étude
Dans les deuxième et troisième parties, à partir de nos définitions du temps, de l’aspect lexical et de l’aspect grammatical, nous traiterons des questions de temporalité en français et en vietnamien Les conclusions tirées des études sur la temporalité dans ces deux langues seront vérifiées par l’analyse des corpus avec des échantillons repris des textes authentiques en ces deux langues La dernière partie sera réservée à l’étude
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contrastive des deux langues en matière de représentation temporelle et aspectuelle Pour
ce faire, nous partons du français avec la base des formes verbales pour trouver leurs équivalents en vietnamien
6 Méthodologie de recherche
a) Aperçu général
Notre objectif est de faire une étude contrastive des formes verbales de l’indicatif
en français et les marqueurs préverbaux en vietnamien Notre point de départ est que les deux langues utilisent ces moyens pour représenter les informations de temps et de l’aspect relatives au procès décrit par l’énoncé Cependant, ces deux systèmes ont des valeurs ainsi que de modes d’usage différentes La présente étude qui s’inspire de celle de Le Quang Thiem (2004), Bùi Mạnh Hùng (2008), Johansson (2007, p 1) nous permet de chercher
et de décrire les convergences et les divergences entre ces systèmes en termes de valeurs et d’interprétations temporelles et aspectuelles Cette étude se fait essentiellement au niveau phrastique et aux deux directions : français-vietnamien et vietnamien-français
Avant de commencer, nous avons des hypothèses suivantes dont les plus importantes peuvent se résumer comme ci-après Les formes verbales en français sont des moyens grammaticaux Leur usage est obligatoire Par contre, les marqueurs préverbaux sont des moyens lexicaux, ce qui explique leur présence optionnel Concernant les valeurs
de ces moyens, les formes verbales représentent à la fois le temps et l’aspect Par contre,
pour le vietnamien, à l’exception de « sẽ », les autres marqueurs préverbaux n’ont que la
valeur aspectuelle Les informations temporelles doivent être déduites du contexte ainsi que les circonstanciels de temps, les adverbes de temps
Ces hypothèses seront vérifiées par une analyse des corpus parallèles constitués des échantillons repris des ouvrages littéraires authentiques en français et en vietnamien et leurs traductions Les avantages de l’utilisation du corpus parallèle dans les études contrastives ont été bien justifiés par Granger (2003) , Johansson (2007), McEnery (2011; 2001) En effet, cette utilisation nous permet en premier lieu d’avoir une analyse plus empirique des valeurs et des interprétations temporelles des formes verbales en français et leurs équivalences en vietnamien et vice versa
Une autre approche à laquelle nous avons régulièrement recours est sémantique En effet, le rôle des informations pragmatiques jouent un rôle primordial dans
pragmatico-la détermination de pragmatico-la valeur temporelle et aspectuelle d’une forme verbale ou d’un
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marqueur Ce point a été développé et présenté par plusieurs linguistes dont (1998; 2004; Vet (1985); 1996), Klein (1994; 2009), Gosselin (1996) et M.B.Olsen (1997) Les informations pragmatiques peuvent être définies comme les relations relatives au contexte, les connaissances communes aux interlocuteurs sur la situation dont on parle…
Notre approche pragmatico-sémantique est reprise des travaux de W Klein (1994; 2000), de L Gosselin(1996) et de M.B Olsen (1997) Elle est caractérisée par la prise en compte des éléments lexicaux et grammaticaux dans leurs relations interactionnelles ainsi que leur interaction avec les informations pragmatiques présentes ou liées à l’énonciation Nous appliquerons cette approche aux analyses de la temporalité des langues particulières, celles du français et du vietnamien
b) Méthode de collecte de données : constitution du corpus
Dans le cadre de cette thèse, les conclusions seront appuyées par les analyses du corpus constitué des échantillons repris des textes authentiques en français et en vietnamien Dans ce qui suit, nous allons expliquer plus en détail comment nous constituerons notre corpus et quelle en est notre méthodologie de traitement ainsi que les points forts et faibles de notre approche
La source du corpus doit répondre à une série de critères de sélection dont le premier est la représentativité En effet, le corpus doit représenter l’emploi courant des objets ou des phénomènes linguistiques à étudier Comme notre objectif est plus centré sur les formes verbales de l’indicatif et les particules préverbales, nous devrons choisir des documents comportant des formes verbales ou des marqueurs d’un emploi courant Le deuxième critère est la variation des moyens de représentation Les documents choisis doivent avoir une variété des formes verbales en français, des mots et des marqueurs temporels en vietnamien
La taille du corpus est un autre critère de sélection Il doit avoir un nombre de population considérable pour être analysé Cependant, nous ne travaillons pas non plus avec des corpus de la taille trop large Ce rejet s’explique par plusieurs facteurs En premier lieu, la collection des échantillons sera difficile, surtout dans le cadre d’un travail personnel De plus, lors du traitement des données, une variation trop large des faits nous éloigne de notre objectif initial Notre travail sera alors sans intérêt La disponibilité et la facilité à traiter sont aussi des éléments à prendre en compte pour choisir un corpus Les
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documents choisis seront mieux appréciés s’ils sont sous forme numérique et que nous pouvons les entrer directement aux programmes de traitement de corpus
En nous basant sur les critères susmentionnés, nous avons sélectionné les œuvres
« La Parure » de Guy de Maupassant (1884), « Le Petit Prince » de Antoine De Exupéry (1943) et « Lời thề đêm trăng » de Tram Huong(1997)et « Chí Phèo » de Nam
Saint-Cao (1941) Ces documents ont l’avantage d’être traduits en français et en vietnamien par les traducteurs professionnels, ce qui garantit l’objectivité de notre corpus
Notre choix peut être objecté pour plusieurs raisons La première est l’origine des documents en français Ils ont été écrits à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème siècle
Le vocabulaire, l’emploi des modes verbaux peuvent, par conséquent, être désuets voire absents dans le français contemporain De plus, il s’agit des documents littéraires On peut douter que le français dans ces documents soit différent de celui de la vie courante Il en est
de même avec la traduction
Quant à nous, nous ne partageons pas l’avis de ces remarques Car, à ces propos, nous avons vérifié auprès des Francophones natifs Ils ont confirmé que les styles et les vocabulaires de ces documents n’ont pas de grande différence par rapport au langage actuel des Français En outre, certains passages dont particulièrement ceux du « Le Petit Prince » ont été utilisés comme exemple dans les manuels de français
Concernant le choix des documents écrits au lieu des documents sonores, en premier lieu, les premiers nous permettent d’avoir un meilleur accès aux sources et donc de mieux collecter des informations De plus, bien qu’il s’agisse des nouvelles dont le style est influencé par l’objectif littéraire, le langage est totalement proche de la vie courante En outre, dans ces nouvelles surtout celle de Antoine De Saint-Exupéry (1943), nous trouvons plusieurs passages de conversation, ce qui nous permet de mieux analyser l’emploi des moyens de représentation dans le cas des documents écrits et sonores La dernière critique possible est relative au caractère littéraire de notre corpus Nous reconnaissons que ce fait ait une influence sur notre résultat Cependant, il est récompensé par la taille importante de nos échantillons qui comprennent en effet à peu près 1.500 échantillons pour chaque corpus en français ou en vietnamien
La sélection des échantillons se fait en premier lieu par le principe de l’intégralité Chaque échantillon doit être complet Il doit contenir des messages complets Nous évitons
des phrases ayant le sens exclamatif comme « Comme il est beau ! » ou le sens impératif
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comme « qu’il soit à l’heure » Ces énoncés contiennent certes des informations
temporelles et aspectuelles mais ils ne font pas l’objet de notre recherche
Avec le développement de la technologie, les outils informatiques deviennent de plus en plus importants dans le traitement du corpus Ils nous permettent d’exploiter l’avantage des grands corpus en nous donnant des résultats plus précis Notre travail ne sera donc pas une exception Nous allons recourir à un programme de traitement et de management de base de données nommé Microsoft Access Ce programme est choisi pour plusieurs raisons dont la première est sa disponibilité On peut le trouver dans tout ordinateur équipé de Windows La deuxième raison est la capacité de concevoir et modifier les interfaces de la feuille de collection En outre, ce programme nous permet d’extraire des informations obtenues du corpus avec une multitude de formes dont les diagrammes et les taux de pourcentage sont les plus appréciés
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Première partie Cadre théorique
La première partie de notre thèse portera sur les questions théoriques Nous y traiterons les questions fondamentales des études sur la temporalité des langues Il s’agit du temps et de l’aspect comprenant l’aspect lexical et l’aspect grammatical Nous aurons donc trois chapitres discutant respectivement ces trois notions Pour chaque chapitre, nous ferons la présentation des théories souvent reprises par les linguistes lors de l’analyse sur la temporalité des langues Par exemple, en ce qui concerne la question du temps nous allons
y faire la présentation des théories de Reichenbach (1947), de Co Vet (1980), de Comrie (1976, 1985) Pour la question de l’aspect lexical, nous analyserons la théorie de Vendler (1967 ) relative à la catégorisation des procès Pour chaque théorie, nous essayerons d’indiquer ses points forts et ses limites Nous démontrerons également pourquoi nous n’avons pas choisi ces théories comme appui pour notre étude sur la temporalité en vietnamien et en français
Le dernier volet, sera réservé à la présentation de notre cadre théorique : l’approche pragmatico-sémantique de L Gosselin (1996)6 et de M.B Olsen (1997) qui ont développé les travaux de W Klein (1994) Nous croyons que cette approche nous permet de mieux analyser l’interaction des moyens lexicaux, grammaticaux et pragmatiques lors de l’encodage et du décodage des informations temporelles et aspectuelles
6 Cette approche a été développée par les mêmes auteurs dans les années qui suivent (lire Klein (2006; 2009) et Gosselin (2005, 2010))
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Chapitre 1 Question du temps
Dans ce chapitre, nous allons discuter de la question du temps En premier lieu, nous allons présenter les conceptions du temps de Reichenbach (1947), Co Vet (1980) et
de Comrie (1985) Il s’agit des théories que les linguistes appliquent dans l’étude sur la temporalité des langues Nous démontrerons que ces théories ont des points discutables, ce qui explique notre choix de la théorie de W Klein (1994) et de L Gosselin (1996)
1.1 Conceptions du temps d’après Reichenbach (1947), Co Vet (1980) et Comrie (1985)
Dans les recherches sur la temporalité dans une langue, on peut facilement prouver que les théories de temps utilisant les deux paramètres, à savoir le point du procès (E) et le point de l’énonciation (S) ne permettent pas de prendre en compte les formes verbales complexes telles que le plus-que-parfait, le passé antérieur En effet, pour l’exemple
(15) Il travaille dans le jardin
nous pouvons décrire la relation temporelle comme la simultanéité entre le procès <IL TRAVAILLER DANS LE JARDIN> avec le moment de l’énonciation Cependant, le plus- que-parfait dans l’exemple
(16) Quand je suis entré, il était déjà parti
demande des relations temporelles plus compliquées Le procès < IL PARTIR> a lieu avant un moment déterminé qui est antérieur à l’énonciation Pour représenter de telles relations temporelles, les linguistes tels que Reichenbach (1947), Co Vet (1980) ou Klein (1994) ont construit des systèmes plus compliqués
1.1.1 Système de Reichenbach
Reichenbach (1947) construit un modèle d’analyse des temps verbaux avec trois points dont le E, celui de l’événement (point du procès dans nos termes) ; le R, celui de référence et finalement le S, celui d'énonciation Entre ces trois points, seules les relations entre E et R et celles entre R et S sont significatives Chaque paire avec deux relations, à
savoir l’antériorité et la cọncidence, symbolisées respectivement « - », « , » établit trois
relations En fait, entre le R et le S, il existe trois relations possibles dont l’antériorité du R
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au S (R-S), la cọncidence entre le R et le S (R, S) et l’antériorité du S au R (S - R) Il en est de même avec le couple du E et du R Ces deux points établissent trois relations possibles dont l’antériorité du E au R (E-R), la cọncidence entre le E et le R et la postériorité du R au E (R-E) :
En combinant ces trois points (E, R, S) suivant les deux relations (antériorité et cọncidence), nous avons neuf possibilités résumées dans le tableau ci-dessous servant à décrire le système des temps verbaux des langues
Tableau 1 : Système de Reichenbach
Structure Noms de Reichenbach Nom en anglais Exemples
E-R-S Anterior past Past perfect I had seen John
E, R-S Simultanous past Simple past I saw John
R-E-S
R-S, E
R-S-E
Posterior past
E-S, R Anterior present Simple present I see John
S, R-E Posterior Present Simple futur I willsee John
S-E-R
S,E-R
E, S-R
Anterior future Future perfect I will have seen John
S-R, E Simoultanous Futur Simple future I shall go
S-R-E Posterior Future
La case « posterior futur » est vide car il n'y a pas de forme verbale correspondante en anglais Pour le « posterior past », Reichenbach suggère qu'il s'agit du conditionnel
Reichenbach (op.cit p 291) a reconnu que son système n’a pas de place pour les formes progressives de l’anglais Pour y remédier, il propose, pour ces formes, un autre système dans lequel on utilise des périodes (intervalles) de temps au lieu de points Il a argumenté que les formes progressives servent à représenter les procès qui durent ("extended" procès en termes de Reichenbach) D'après C Vetters (1998), cette distinction n’est pas pertinente car les formes simples peuvent représenter les procès temporellement longs Le passé simple est utilisé pour marquer des situations longues comme le cas suivant :
(17) Il resta à Hanoi pendant 30 jours
En outre, le recours à ces deux systèmes pour représenter les formes simples et composées fait perdre la simplicité et l'uniformité Ce sont deux grands avantages de la
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théorie de Reichenbach C'est pour cette raison que François (1986)a modifié le modèle de Reichenbach en remplaçant les points par des intervalles pour qu'ils soient mieux adaptés à l'expression des oppositions aspectuelles La raison de ce remplacement sera présentée dans le chapitre sur l’aspect grammatical
Reichenbach est critiqué d’autre part pour avoir prévu la forme « posterior future » Suivant Comrie (1985) et Dahl (1974), aucune langue n'a de forme verbale marquant la postériorité d'un événement à un autre point se trouvant lui-même postérieur au moment de l'énonciation De plus, Reichenbach a prévu la même relation pour les cases du "simple futur" et du "posterior present" Par contre, dans son système, plusieurs relations peuvent être représentées par une forme verbale Decleck (1986, p 30) a remarqué plusieurs relations temporelles pour une forme verbale telles que celles du « posterior past » ou de l'« anterior futur »
Comrie (op.cit p 129) ajoute qu’à part la distinction entre le passé, le présent et le futur, certaines langues ont aussi des formes grammaticales pour marquer des relations de
type " E before S one day" À notre avis, il s’agit d’une des limites de la théorie de
Reichenbach
La critique la plus importante du système de Reichenbach est la détermination du R (point de référence) D'après C Vetters (op.cit.), Reichenbach n'a pas donné une définition claire sur ce point En effet, il se contente d'en faire une description avec un seul exemple :
(18) Peter had gone
Suivant Reichenbach (op.cit p 288), la forme du pluperfect en anglais ou son équivalent le plus-que-parfait en français indique qu'entre le point du procès à décrire (E)
et le point de l'énonciation (S), il existe un autre appelé le point de référence (R) Cependant, en se basant sur cette description, comment peut-on déterminer le R de l’énoncé (18)? Est-il un moment arbitraire se trouvant sur l'axe temporel entre celui du procès et celui de l'énonciation ? Si c'est le cas, quelle est la différence permettant de distinguer le plus-que-parfait des autres formes verbales servant à indiquer le passé ?
Pour éviter de telles questions, Reichenbach a défini plus tard le point de référence
R comme un autre procès Le fait d'identifier le R comme un autre procès permet de rendre compte de l'emploi du plus-que-parfait dans :
(19) Quand je suis arrivé (R), il était déjà parti (E) (E-R-S)
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En réalité, en (19), le R est déterminé par l'arrivée du locuteur Le procès se passe avant le R qui est à son tour antérieur au point de l’énonciation S Cependant, l'identification du R par un autre procès pose d'autres problèmes Alors quel procès servira
de R dans l’exemple (20) ci-dessous :
(20) À 7 heures, il était déjà parti
Le R dans ce cas est plutơt déterminé par un circonstanciel de temps et non pas comme un quelconque procès
La question est plus compliquée pour les formes simples dont le R est considéré comme simultané au point du procès (E) Quel est le deuxième procès simultané au E pour
le R si le verbe est au passé simple ou au présent indicatif comme dans les exemples suivants ? :
(21) En 1954, je fus en France
(22) Il travaille depuis ce matin
1.1.2 Système temporel à deux points
Co Vet (1980) critique la théorie de Reichenbach (op.cit.) sur la caractéristique indéterminable du R (le point de référence), du traitement non uniforme entre le passé simple et l’imparfait et de la relation de postériorité du R par rapport au S (le point de l’énonciation) (S-R dans les termes de Reichenbach) Concernant la dernière critique, d’après Co Vet (op.cit.), il est possible de représenter le futur et le passé dans la relation de cọncidence entre le R et le S (respectivement le passé simple et le futur simple) et dans la relation d’antériorité du R par rapport au S (le plus-que-parfait et le futur du passé) Par contre, aucune langue n’a de forme pour indiquer le futur et le passé en cas de l’antériorité
de S par rapport au E Autrement dit, la combinaison de S-R-E et E-S-R ne peut pas être représenté En français, ces relations sont représentées par le futur simple et le futur antérieur qui sont censés traduire respectivement la relation S, R-E et S-E-R
À partir de ces critiques, Co Vet propose de construire un système temporel à deux points dont celui de la situation (E) et celui de la perspective qui peut être celui de l’énonciation (S) ou un autre déterminé suivant le contexte (S’) Il est à noter que le S’ est toujours antérieur au S En fonction du fait qu’il s’agit du S et S’, nous avons deux sous-systèmes Le premier servant à représenter les relations entre le point de la situation (E) et celui de l’énonciation (S), le deuxième, celles entre celui de la situation et celui de la
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perspective On a affaire ici, toujours suivant Co Vet, à deux actualités : l’actualité présente et celle du passé Ces deux actualités sont représentées par la figure ci-après
Figure 1 : Système de Co Vet
Pourtant, le système de Co Vet présente aussi des limites En premier lieu, ce chercheur attribue au passé simple et au passé composé la même valeur La seule différence, c’est que le passé simple est réservé à l'écrit tandis que le passé composé peut être utilisé à la fois à l'oral et à l'écrit Cette remarque n'est pas pertinente En fait, dans certains cas, la substitution entre les deux temps verbaux n'est pas totale comme dans les deux cas suivants :
(23) ? Il fut malade (Mais maintenant, il peut travailler.)
(24) Il a été malade (Maintenant, il est très fatigué Il ne peut pas travailler.)
L’exemple (24) peut accepter un énoncé suivant avec un circonstanciel de temps marquant le présent, ce qui n’est pas le cas avec l’exemple (23) Cette différence est due à
la différence entre l’aspect aoristique du passé simple et l’aspect imperfectif de l’état résultant du passé composé.7
La deuxième critique qu’on peut faire à la théorie de Co Vet est le manque d’uniformité Dans son travail, l’auteur a bien précisé que les relations temporelles représentées par les formes verbales n’impliquent que la présence de deux points : celui de
la situation et celui de la perspective Mais il a réfuté lui-même cette opinion en affirmant
7 Nous discuterons ce point dans le Chapitre 3
Analyse des formes verbales de l’indicatif en français du la deuxième partie portant sur la temporalité en français
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que le S’ doit être toujours antérieur au S Autrement dit, le S est implicitement présent dans son système On peut dire qu’au moins, pour représenter le monde d’actualité du passé, Co Vet doit recourir à un système de trois points
1.1.3 Système de quatre points
Comrie (1985) a repris le travail de Reichenbach (op.cit.) en en modifiant une partie En fait, d’après celui-ci, la présence du R (point de référence) dans le système de Reichenbach n’est pas nécessaire pour les analyses de certains temps verbaux tels que le présent de l’indicatif, le futur simple…
En effet, le R est défini par le contexte Il peut être le temps d’un autre procès ou celui déterminé par les circonstanciels temporels Il se peut aussi que le R soit implicite Pour le déterminer, on doit se baser sur d’autres paramètres comme le contexte, etc La définition du R proposée par Comrie est donc plus large que celle proposée par Reichenbach
Dans son système, Comrie a divisé les temps verbaux en trois catégories : temps absolus, temps relatifs et temps absolu-relatifs Les temps absolus représentent les
relations entre le E (point du procès) et le S (point de l’énonciation) Elles comprennent la
simultané du E par rapport au S (présent) (ex : Il travaille) ; l’antériorité du E par rapport
au S (passée) (ex : Il travailla) ; la postériorité du E par rapport au S (futur) (Ex : Il travaillera) Le temps du procès <IL TRAVAILLER> (E) est respectivement simultané,
antérieur et postérieur par rapport au moment de l’énonciation (S)
Les temps relatifs représentent les relations entre le E et le R (point de référence.) Entre le E et le R, il existe trois relations possibles dont la simultanéité du E par rapport au
R (présent relatif) ; l’antériorité du E par rapport au R (passé relatif) ; la postériorité du E par rapport au R (futur relatif) D’après Comrie, les participes sont des temps purement relatifs Considérons les exemples suivants :
(25) Ayant commis une faute grave (E), il a été puni (R) (E<R)
(26) Craignant le pire (E), il a décidé de partir (R) (E=R)
Pour l'énoncé (25), le procès <COMMETTRE UNE FAUTE GRAVE> (E) a lieu et
se termine avant le procès <ÊTRE PUNI> (R) Pour le (26), les deux procès <CRAINDRE
LE PIRE> et <DÉCIDER DE PARTIR> se passent en même temps
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Il est à souligner que suivant Comrie, le point de référence (R) n’est pas nécessairement déictique Sa position sur l’axe temporel n’a pas d’importance pour les temps relatifs En fait, le participe passé et le participe présent sont toujours utilisés pour marquer respectivement l’antériorité et la simultanéité entre le E et le R même en cas de postériorité de ce dernier par rapport au S (point de l’énonciation) comme dans les exemples suivants :
(27) Ayant commis une faute grave (E), il sera puni (R) (E<R)
(28) Craignant le pire (E), il décidera de partir (R) (E=R)
Il est à remarquer aussi que pour les temps relatifs, les relations entre le point de
l’énonciation (S) et le point du procès (E) ne sont pas significatives Dans le cas de « Ayant commis une faute, il sera puni », le procès <COMMETTRE UNE FAUTE> peut se passer
avant ou après le moment de l’énonciation Par le choix du participe passé, le locuteur n’indique que la relation entre le E et le R Pour déterminer celles entre le E et le S, il faut
se baser sur le contexte
Les temps absolus-relatifs impliquent les relations entre trois points dont E (point
du procès), R (point de référence) et le S (point de l’énonciation), ce qui est différent des temps relatifs et des temps absolus qui impliquent seulement les deux points Suivant Comrie, les langues choisissent de représenter essentiellement deux relations impliquant à
la fois la présence de trois points La première implique l’antériorité du E par rapport au R qui est à son tour antérieur au S(R<S, R>E) comme dans l’exemple suivant :
(29) Quand tu es rentré (R), il était déjà parti (E)
Une autre relation que les temps relatifs servent à représenter est l’antériorité du E par rapport au R et la postériorité de ce dernier au S (R>S, E<R)
(30) Quand tu rentreras (R), il sera déjà parti (E)
Le système de Comrie reçoit plusieurs critiques dont la première porte sur la distinction entre les temps absolus et les temps relatifs Cette distinction n’est pas pertinente Certains temps verbaux considérés comme absolus peuvent représenter des relations autres que celles entre le E et le S comme dans l'exemple (6) de l’introduction : « Elle naỵtra, fera de bonnes études, s’occupera de la politique et évitera la troisième guerre mondiale On dira qu’elle fût une hérọne » ou l'exemple (31) ci-dessous :
(31) Pierre dira que Paul est malade
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Pour l’énoncé (6), le procès <ÊTRE HÉRỌNE> se passe après le point d’énonciation (S) Cependant, la forme verbale utilisée est le passé simple Il s'agit de la forme qui d'après Comrie appartient aux temps absolus et qui sert à représenter l'antériorité
du E par rapport au S Quant au (31), cet énoncé n'est valable que dans le contexte ó Paul n'est pas (ou pas encore) malade au moment de l'énonciation Autrement dit, le E n'entre pas en cọncidence avec le S Cependant, la forme verbale choisie pour la subordonnée est
le présent indicatif En second lieu, l’idée de Comrie d’après laquelle les participes sont des temps purement relatifs n’est pas partagée par tous En fait, ces temps n’ont que la valeur aspectuelle : les participes passés marquent le perfectif et les participes présents, l’imperfectif
Cependant, la critique la plus importante du système de Comrie porte sur l’analyse des temps absolus et relatifs respectivement comme des relations entre le point du procès (E) et le point de l’énonciation (S) ou un autre point défini suivant le contexte (R) L’exemple (32) ci-dessous est un de multiple contre- exemples
(32) Où est Jean ?
Je ne sais pas Il était dans le jardin quand je suis sorti
D’après Comrie, l’imparfait fait partie des temps absolus Il sert à représenter l’antériorité du procès (E) par rapport au moment de l’énonciation (S) : le procès <Il ÊTRE DANS LE JARDIN> doit finir avant le moment de l’énonciation Cependant, il est évident que ce n’est pas l’intention du locuteur Par cet énoncé, il veut simplement constater : à sa sortie, il a vu Jean dans le jardin Mais il n’est pas sûr si Jean y est encore ou pas Il en est
de même pour l’exemple (33):
(33) Ils ont trouvé Jean dans sa chambre Il était déjà mort
Un homme qui est mort l’est pour toujours Alors que le procès <Il ÊTRE MORT>-
E doit en principe durer et inclure l’énonciation (S) La forme verbale appropriée devrait être le présent de l’indicatif Pourtant, à sa place, le locuteur a choisi l’imparfait Mais si l’on demande l’avis de tout francophone natif, cet énoncé est grammaticalement correct et approprié au contexte donné
De même dans l’exemple suivant :
(34) Seriez-vous ici à 8 h ce soir ?
-Oui, à cette heure-là, je serai ici
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À la réponse, le locuteur sait qu’il ne fera aucun déplacement jusqu’à 8 h Le procès <JE ÊTRE ICI> dure et inclut donc le S La forme verbale choisie devrait être le présent de l’indicatif au lieu du futur simple
Passons à un autre exemple avec le conditionnel passé
(35) Pierre disait (R) que lundi, Paul aurait terminé son travail (E) depuis longtemps
Suivant Comrie (op.cit.), le conditionnel passé est un temps relatif Il marque la postériorité du E par rapport au R Cependant, il ne s’agit que d’une interprétation possible
de cet exemple En fait, ce dernier peut être toujours utilisé si d’après le contexte, le procès
<PAUL TERMINER SON TRAVAIL> a lieu avant que Pierre le dise Le conditionnel passé ne marque pas l’antériorité du E par rapport à la référence
En résumé, après avoir étudié les théories de Reichenbach (1947), de Co Vet (1980) et de Comrie (1985), nous arrivons à conclure que le système temporel représenté par les formes verbales comprend trois points dont le point de l’énonciation (S ), le point
de procès (E) et le point d’assertion (R)
Les temps absolus ne représentent pas toujours les relations entre le E et le S Les temps relatifs ne représentent pas toujours celles entre le E et le R En fin, le S (point de l’énonciation) et le R (point défini suivant le contexte) sont présents dans les relations temporelles représentées par les temps verbaux
De ces constatations, nous émettons des hypothèses dont La première est que dans les relations temporelles, il faut remplacer le E par un autre point Et comme nous avons opté au début pour un système avec des intervalles et non pas avec des points, cette hypothèse peut être reformulée comme suit : il faut remplacer l’intervalle du procès (IP) par un autre intervalle choisi par le locuteur pour asserter le procès Cet intervalle appelé l’IA (intervalle d’assertion du procès) La deuxième est que les temps absolus représentent les relations entre l’IA et l’IE et les temps relatifs celles entre l’IA du procès et celui d’un autre procès
1.2 Conception du temps d'après Klein(1994)
Dans la partie précédente, avec des exemples simples, nous avons montré que les temps verbaux absolus et relatifs ne représentent pas respectivement les relations entre le E (point du procès) et le S (point de l’énonciation) ou celles entre le E et le R (point de
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référence) Plus précisément, dans l’exemple (5) : « Quand je suis entré, il travaillait dans
le jardin Et l’exemple (6) : « On dira après sa mort qu’elle fut une hérọne », le procès
décrit peut inclure le S Cependant, le locuteur a choisi l’imparfait et le passé simple qui d’après les théories traditionnelles marquent respectivement l’antériorité et la postériorité
du procès par rapport au moment de l’énonciation Alors, on se pose la question : quelle est
la nature du temps ? Pour y répondre, nous proposons de concevoir le temps comme l’ont
envisagé W Klein (1994) et L Gosselin(1996): Le temps représente les relations entre l’intervalle d’assertion du procès (IA) et l’intervalle de référence (IR) L’IA est l’intervalle choisi par le locuteur pour asserter le procès L’intervalle de référence (IR) peut être soit celui de l’énonciation (IE) soit un autre intervalle défini suivant le contexte
Cette nouvelle définition du temps sera justifiée dans les analyses des exemples En
fait, par l'énoncé (5): « Quand je suis sorti, Jean était dans le jardin», le locuteur n’a pas
l'intention d’indiquer que Jean n’est plus là Il veut simplement dire qu’au moment
déterminé par sa sortie- intervalle d’assertion (IA), Jean est dans le jardin (IP) Et comme
ce dernier est antérieur à l’IE, le locuteur a choisi un temps du passé qui est l’imparfait dans ce cas
Pour l’exemple (33) : « Ils ont trouvé Jean dans sa chambre Il était mort », par
connaissances générales, sans conditions contextuelles particulières, la situation <IL ÊTRE MORT> est interprétée comme éternelle Le choix de l’imparfait au lieu du présent indicatif est expliqué par le fait que le locuteur veut parler du procès <IL (JEAN) ÊTRE MORT> à un moment particulier –intervalle d’assertion du procès (IA) Ce dernier est déterminé par le fait de trouver Jean et il est antérieur à l’IE (IA<IE)
Pour l’exemple (34), à la question : "Serez-vous ici à 8 h ?» le locuteur a répondu
« Oui, je serai ici » Il choisit le futur simple au lieu du présent indicatif tout en sachant
que jusqu’à 8 h, il ne fait aucun déplacement Ce choix est expliqué par le fait que le locuteur voulait parler du procès <JE ÊTRE ICI> au moment déterminé par le
circonstanciel temporel «à cette heure-là » Ce moment est l’IA postérieur à l’IE
Pour être plus convaincant, nous analyserons un autre exemple plus compliqué impliquant la présence de plusieurs intervalles comme le cas de (36) ci-dessous,
(36) Paul disait que lundi, Pierre aurait terminé son travail depuis longtemps
Nous distinguons les intervalles présents dans cet énoncé dont :
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- IP1 – intervalle du procès de la principale <PAUL DIRE>
- IA1 - l’intervalle choisi pour asserter le procès de la principale
- IP2– intervalle du procès de la subordonnée <PIERRE TERMINER SON TRAVAIL>
- IA2– intervalle choisi pour asserter le procès de la subordonnée
- IE- intervalle de l’énonciation de tout l’énoncé
Le locuteur a l’intention d’asserter le procès <PIERRE TERMINER SON TRAVAIL> à un moment précis déterminé par l’adverbe temporel « lundi » Autrement dit, l’IA 2 est identifié Notre tâche est de déterminer son intervalle de référence (IR), à savoir que ce dernier doit être antérieur par rapport à l’IA 2 car le conditionnel marque le futur dans le passé Nous savons que la relation entre l’IA 2 et l’IE n’est pas pertinente Il peut s’agir du lundi dernier ou lundi prochain Autrement dit, cet IA 2 peut être antérieur ou postérieur à l’IE La relation entre l’IA 2 et l’IP 1 est aussi non pertinente
Pour l’exemple (37) ci-dessous, l’IP1 est antérieur à l’IA2 Mais cette interprétation n’est pas valable si l’on remplace ce procès de la principale par un autre étant par nature plus long
(37) À ce temps (IA 1 ) Paul croyait (IP 1 ) que lundi (IA 2 ), Pierre aurait terminé son travail (IP 2 ) depuis longtemps
Rien n’impose l’interprétation que Paul a cessé de le croire après ce « lundi »
Seule la relation entre l’IA1 et l’IA2 est pertinente Comme l’IA1 est postérieur à l’IE et que l’IA2 est postérieur à l’IA1, la forme verbale choisie doit être le conditionnel passé
1.3 Nature de l’intervalle d’assertion
L’IA est l’intervalle choisi par le locuteur pour asserter le procès à décrire Sa durée peut varier en fonction de la volonté de celui-ci En fait, cet intervalle peut être très court et bien déterminé sur l’axe temporel comme dans le cas :
(38) Demain, lundi 20 mars 2008, à 8h30, Jean sera présent ici
Mais elle peut occuper tout le passé avant le moment de l’énonciation, voire l’inclure :
(39) Kant a été le plus grand philosophe
Par le choix du passé composé, l’énoncé est interprété comme maintenant Kant n’est plus le plus grand philosophe
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L’IA peut être un intervalle englobant le passé, le présent et le futur, ce qui explique la caractéristique « atemporelle » du présent de l’indicatif comme :
(40) La Terre tourne autour du soleil
Cependant, le choix de l’IA n’est pas totalement libre On ne peut pas en effet dire :
(41) *La Terre a été ronde
Ces contraintes sont dues aux caractéristiques temporelles du procès Il sera sujet
de notre discussion ultérieure
Dans la communication, le choix de l’IA est déterminé par deux facteurs Le premier est la volonté des participants à la communication Dans l’énoncé (42)
(42) Qui est-ce que tu as vu dans la classe ce matin à 7 h (une question du professeur à l’élève)
le professeur a imposé l’intervalle défini par « ce matin à 7 heures » L’élève est requis de parler des événements ayant eu lieu dans ce cadre temporel ainsi que dans le cadre spatial
de la classe La réponse de l’élève peut être : « Dans la classe, il n’y avait que Paul et Pierre Ils révisaient les leçons Les autres n’étaient pas encore arrivés » Tout autre fait ayant lieu avant ou après « ce matin » comme « Demain, Paul sera malade Pierre sera en retard » est considérée comme superflu L’élève serait surement rectifié par des rappels tels que « Je te demande ce que tu as vu dans la classe ce matin et non pas demain »
Le choix de l’IA doit satisfaire une autre condition : La situation à l’IA doit être en contraste avec les autres moments susceptibles de jouer le même rơle Soit l’énoncé suivant :
(43) *Maintenant, le livre est en russe
Cette phrase semble inacceptable dans la communication courante car normalement
un livre en russe l’est pour toujours Par contre, au cas ó l’on utiliserait un livre électronique, on peut changer de langue utilisée suivant la volonté du lecteur, cette phrase est tout à fait acceptable L’IA indique qu’au moment de l’énonciation, le livre a la caractéristique d’être en russe Par contre, avant ou après, il peut être en différentes langues
Trang 3835
1.4 Détermination de l’intervalle d’assertion
L’intervalle d’assertion (IA) est déterminé par sa relation de cọncidence avec un autre intervalle défini dans la communication Ce dernier peut être l’intervalle du procès décrit (IP), l’intervalle de l’énonciation, l’intervalle défini par les circonstanciels de temps, les adverbes ou subordonnées temporelles, l’intervalle de la situation décrite ou l’IA de la phrase précédente
1.4.1 Intervalle du procès décrit
Dans la communication, chaque procès est considéré comme unique et son intervalle dans lequel il prend place (IP) l’est aussi En cas de cọncidence totale avec l’IA,
ce dernier, peut prendre l’intervalle du procès (IP) comme son meilleur antécédent Ce fait explique pourquoi les temps marquant une telle cọncidence comme le passé simple, le futur simple… n’ont pas un besoin pressant des circonstanciels servant à préciser l’IA En
effet, l’énoncé « Il fut malade » peut être utilisé sans contexte particulier alors que celui
de : « il était malade » doit en avoir besoin un, permettant de préciser de quel moment on
parle
1.4.2 Intervalle de l’énonciation de l’énoncé (IE)
En cas des formes verbales du présent de l’indicatif, du passé composé…, l’IA est souvent identifié par l’IE de l’énoncé tel que :
(44) Il est malade
1.4.3 Intervalle défini par les circonstanciels de temps
Les adverbes, les circonstanciels de temps établissent un intervalle défini servant de
l'antécédent pour l’intervalle d’assertion (IA) L’IA est déterminé par «Hier, à 7 heures » à l'énoncé (45) et par la subordonnée temporelle « Quand je suis entré » pour le (46):
(45) Hier, à 7 h (IA), il faisait ses devoirs
(46) Quand je suis entré (IA), il faisait ses devoirs
Cependant, les circonstanciels temporels ne marquent pas toujours l’IA comme l’exemple (47) :
(47) Paul est arrivé à deux heures du matin
Le circonstanciel « à deux heures du matin» sert à localiser le procès lui-même
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Concernant le rôle des circonstanciels temporels, Gosselin(1996, p 30) remarque
que les circonstanciels de durée comme pendant+ durée….servent souvent à préciser l’IP Pour les circonstanciels localisateurs comme à 7 heures, hier….s’ils sont intégrés au
syntagme verbal et constitutif du prédicat, ils servent à préciser l’IP S’ils sont détachés du syntagme verbal (leur place est souvent au début de l’énoncé et ils sont séparés du reste de l’énoncé par une virgule à l’écrit ou une pause à l’oral), ils servent à préciser l’IA Le rôle des circonstanciels localisateurs détachés serait établi par la division thème/rhème dans la phrase française En effet, analysons l’opposition suivante :
(48) À 7 heures, il était déjà rentré
(49) Il était rentré à 7 heures
En (48), en mettant le circonstanciel localisateur temporel au début de l’énoncé, le locuteur veut annoncer que c’est de ce temps qu’il veut parler Par contre, en le mettant à la fin de l’énoncé comme en (49), il veut plutôt attirer l’attention de son interlocuteur sur l’événement et non pas sur les informations temporelles qui y sont liées De ces constations, nous avons conclu que le circonstanciel temporel fait partie de la représentation sémantique du procès
1.4.4 Intervalle du procès se trouvant dans une autre proposition
Dans le cadre d’une phrase, l’antécédent de l’IA peut être celui d’un autre procès se trouvant dans la proposition précédente ou suivante Ce cas est souvent rencontré dans les phrases complétives Dans l'énoncé (50):
(50) À ce temps-là, Luc croyait que Marie était malade
les deux procès <LUC CROIRE> et <MARIE ÊTRE MALADE> ont le même IA déterminé par le circonstanciel de temps « à ce temps-là »
1.4.5 Intervalle d’assertion (IA) de la proposition précédente ou suivante
Dans un paragraphe, plusieurs énoncés peuvent partager le même IA comme le cas
Trang 4037
1.5 Bilan du chapitre
En résumé, après avoir fait une brève présentation des théories de Reichenbach, de
Co Vet, de Comrie, nous avons démontré qu’elles ne sont pas adéquates pour représenter les systèmes temporels des langues En effet, avec des exemples à l’appui, nous avons montré que la conception traditionnelle d’après laquelle le temps représente la position du procès par rapport à un point de référence n’était pas pertinente Par conséquent, pour une meilleure analyse, nous avons proposé la conception de W Klein traitant les questions de temps avec deux intervalles de temps Ils comprennent l’intervalle d’assertion du procès et l’intervalle de référence (IR) Ce dernier peut être celui de l’énonciation ou un autre intervalle défini par le contexte
En fait, l’intervalle du procès (IP) n’est pas toujours présent dans les relations temporelles représentées par les formes verbales À sa place, il s’agit en fait de l’IA, un intervalle choisi par le locuteur pour asserter le procès De ces observations, nous optons
pour notre recherche la définition suivante de W Klein et de L Gosselin : Le temps est la
représentation de la position de l’IA sur l’axe temporel en relation avec l’intervalle de référence (IR) qui est soit l’IE (intervalle de l’énonciation) en cas des temps absolus, soit l’IA d’un autre procès en cas des temps relatifs
Les résultats obtenus nous permettent de distinguer par exemple le présent de l’indicatif du passé simple Cependant, plusieurs autres questions se posent telles que :
Quelle est la différence entre le passé simple et l’imparfait ? Pourquoi utilise-t-on de préférence l’imparfait avec des procès qui durent ? Pourquoi accepte-t-on difficilement les phrases telles que « il trouvait la clé» ? Pour y répondre, il est indispensable d’aborder
la question de l’aspect Cette notion comprend l’aspect lexical et l’aspect grammatical L’aspect lexical concerne les caractéristiques temporelles incluses dans la représentation sémantique de l’ensemble des éléments linguistiques servant à décrire le procès Cet ensemble correspond en général au prédicat L’aspect grammatical désigne les caractéristiques temporelles de l’occurrence du procès décrite à un moment donné Suivant les langues, ces caractéristiques peuvent être représentées par plusieurs moyens dont les formes verbales, les suffixes verbaux ou par des mots, groupes de mots spécifiques comme
le cas de « đã », « sẽ » ou « đang » en vietnamien Dans les chapitres qui suivent, nous
allons approfondir notre étude sur l’aspect Nous traiterons en premier l’aspect lexical La suite sera réservée à l’aspect grammatical