graphie fluorescéinique de ces lésions démontre habi- tuellement une hypofluorescence précoce bloquée, suivie d’une coloration irrégulière de la lésion au temps mi- artérioveineux, suivie par une hyperfluorescence tardive tachetée alors que le motif de la coloration devient plus confluent (figure 4). Occasionnellement, l’hyperfluores- cence tardive tachetée d’une lésion métastatique ressemble à un nid d’abeille. Par contraste, le motif fluorescéinique d’un mélanome amélanotique présente souvent une hyperfluorescence tachetée à un temps plus précoce. Quoi qu’il en soit, l’angiographie fluorescéinique ne permet pas toujours de faire la distinction de façon définitive entre ces deux entités. L’échographie en mode A montre généralement une réflectivité interne modérée à élevée, avec une pointe initiale élevée (figure 5a). L’échographie en mode B mon- tre habituellement une lésion plate/placoïde ou bombée qui est solide sur le plan acoustique, et une absence de signe d’excavation choroïdienne (figure 5b). Un autre aspect caractéristique est que ces lésions n’ont habi- tuellement pas la forme de champignons. Une forme de champignon se produit généralement en présence d’un mélanome uvéal primitif, lorsque celui-ci traverse la membrane de Bruch. Bien qu’ils soient rares, des cas de métastases choroïdiennes en forme de champignons ont déjà été rapportés, simulant un mélanome choroïdien 8 . observation est importante, puisqu’une affection multifo- cale ou bilatérale n’est pas présente en cas de mélanome amélanotique primitif. Lorsque l’iris est touchée, le patient présente le plus souvent un nodule métastatique unilatéral, mais une atteinte bilatérale est aussi possible (figure 3). Le nodule métastatique de l’iris est habituellement blanc jaunâtre, charnu, solitaire et situé dans la partie inférieure de l’œil 3 . La libération de cellules friables entraîne souvent une iritis secondaire, une injection épisclérale et, occasionnelle- ment, un pseudohypopion. Un glaucome secondaire survient très fréquemment, soit dans presque 40 % des cas 7 . Un examen oculaire complet est justifié parce que jusqu’à un tiers des cas présentent également une métastase choroïdienne ipsilatérale associée 7 . Seulement 10 % de ces dépôts métastatiques sur l’iris présentent des vaisseaux sanguins proéminents à l’intérieur de la tumeur, contraire- ment aux mélanomes amélanotiques de l’iris, dans lesquels des vaisseaux sanguins sont davantage visibles 7 . Les patients ayant une métastase au corps ciliaire peuvent présenter un grand vaisseau sentinel sur la sclère sus-jacente, une iridocyclite, une erreur de réfraction ou une masse visible, le plus souvent sur la moitié inférieure de l’œil. Les tests ancillaires Divers tests ancillaires peuvent aider à poser un diagnostic clinique de métastases choroïdiennes. L’angio- Figure 4 : Métastase choroïdienne. Figure 4a : Photographie clinique d’une métastase choroïdienne juxtapapillaire d’un cancer du sein. Figure 4b : L’angiographie à la fluorescéine en 4 phases montre une hypofluorescence précoce et une hyperfluorescence tachetée tardive typique d’une métastase choroïdienne. Figure 2 : Photographie clinique d’un œil droit montrant une tumeur carcinoïde multifocale. Figure 3 : Photographie clinique d’une métastase à l’iris située dans le quadrant supérieur de l’iris droit. (Courtoisie de Hugh McGowan) (Courtoisie de Hugh McGowan) a b Bien que la tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique (IRM) puissent montrer une métastase uvéale, ils sont d’une utilité limitée pour ce qui est de préciser le diagnostic différentiel. Ils jouent un plus grand rôle dans l’évaluation systémique des tumeurs malignes primitives et la détermination de la dissémination métastatique à d’autres sites. Bien qu’elle ne soit pas souvent effectuée, on a décrit une technique de biopsie intra-oculaire 9 . Cette technique peut être importante quand les aspects cliniques et les tests ancillaires décrits ci-dessus ne permettent pas d’établir de façon concluante si la lésion est une métastase ou un mélanome, un lym- phome ou un granulome inflammatoire primitifs. L’aspiration à l’aiguille fine peut être utile quand un bilan systémique ne permet pas de diagnostiquer une tumeur primitive et qu’un diagnostic tissulaire est nécessaire pour mettre en place un traitement approprié. Il est également prudent de diriger le patient vers un oncologue médical et un radio-oncologue afin d’établir le stade de la maladie du patient et de choisir un traitement approprié. Le diagnostic différentiel Le diagnostic différentiel d’une métastase choroï- dienne de couleur crème comprend le mélanome amélanotique primitif, l’hémangione choroïdien primitif, la cicatrice disciforme exsudative, ainsi que le granulome choroïdien primitif 1 . Dans certains cas atypiques, il peut être difficile d’établir la distinction entre le mélanome uvéal primitif et la métastase Ophtalmologie Conférences scientifiques Figure 5 : Lésion métastatique à la choroïde. Figure 5a : Échographie en mode A d’une lésion choroïdienne montrant une réflectivité interne moyenne. Figure 5b : Échographie en mode B correspon- dante d’une métastase choroïdienne montrant une lésion bombée acoustiquement solide avec décollement séreux de la rétine adjacent. Figure 6 : Photographies cliniques et imagerie ancillaire d’un mélanome amélanotique primitif. Figure 6a : Photographie clinique d’un œil gauche montrant un mélanome amélanotique. Figure 6b : Échographie en mode B corres- pondante montrant une lésion bombée avec décollement séreux de la rétine adjacent. Figure 6c : Échographie en mode A corres- pondante montrant une réflectivité interne basse. Figure 6d : Angiographie fluorescéinique correspondante au temps précoce montrant une hyperfluorescence précoce tachetée. Figure 6e : Angiographie fluorescéinique au temps tardif montrant une hyperfluorescence retardée au centre, avec hypofluorescence bloquée en bordure. a a b c d e b uvéale (figure 6). On comprend qu’il est important d’établir cette distinction, parce que le traitement et le pronostic varient significativement entre ces deux affections. Le tableau 1 illustre certaines des carac- téristiques qui permettront de distinguer le mélanome uvéal de la métastase uvéale. Le diagnostic différentiel d’une métastase non pigmentée de l’iris comprend le mélanome amélano- tique, le nævus amélanotique, l’iritis granuloma- teuse, le lymphome, la leucémie et le léiomyome 7 . Le diagnostic différentiel d’une métastase pigmentée de l’iris comprend le mélanome primitif de l’iris, le nævus pigmenté, l’adénome, ainsi que les kystes de l’iris 7 . Des antécédents d’affection maligne en con- jonction avec un examen clinique typique aideront à préciser le diagnostic différentiel. Dans les cas rares où le diagnostic demeure incertain, une biopsie par aspiration à l’aiguille fine peut être indiquée. Le pronostic En général, les métastases aux yeux et aux annexes sont le signe d’un mauvais pronostic pour l’af- fection primitive. Le temps de latence entre le diagnos- tic du carcinome primitif et l’atteinte du globe oculaire dépend du type de tumeur. Habituellement, les tumeurs primitives qui tendent à produire des métastases rapidement au globe oculaire sont les tumeurs au poumon, au rein et à la prostate, alors que le cancer du sein et le mélanome cutané métastasent plus tardive- ment 1 . Dans leurs séries intitulées Metastatic Tumours to the Eye and Orbit, Freedman et Folk ont constaté que le laps de temps médian entre le diagnostic de la tumeur primitive et le développement de métastases choroïdiennes était d’environ trois ans avec le cancer du sein et de un an avec le cancer du poumon 10 . La durée de survie médiane varie également selon le type d’affection primitive diagnostiquée. Par exemple, la durée de survie médiane dans les cas de métastases intra-oculaires d’un cancer du poumon est de 6 mois, comparativement à 22 mois dans les cas de cancer du sein 10 . Dans une revue plus récente, Shields et ses collaborateurs ont déter- miné que la durée moyenne de survie à la suite d’un cancer du sein avec métastases à l’uvée était de 21 mois, avec un taux de survie global de 24 % à 5 ans 4 . La durée médiane de survie des patientes présentant un cancer du sein qui étaient plus âgées ou qui avaient des métastases de l’orbite tendait à être plus longue que celle des patientes plus jeunes 10 . De façon similaire aux tendances obser- vées dans le cas des métastases choroïdiennes, les durées de survie médianes dans les cas de méta- stases à l’iris étaient de 13 mois en présence de cancer du sein et de 4 mois en présence de cancer du poumon 7 . Les métastases oculaires de tumeurs carcinoïdes seraient associées à des durées de survie plus longues, avec une survie moyenne de 34 mois selon une revue récente 5 . Le traitement Les possibilités de traitement des métastases ocu- laires dépendent de la santé générale du patient, de la nature de l’atteinte oculaire, et de la tumeur primi- tive sous-jacente. De plus, tout traitement devra faire l’objet de discussions avec l’oncologue médical et le radio-oncologue traitants. Il est certain que les patients qui présentent des métastases oculaires qui menacent leur vision et/ou des tumeurs qui aug- mentent rapidement de volume, pourraient béné- ficier d’une radiothérapie externe pour améliorer leur vision et leur qualité de vie. La dose de radiation peut varier entre 20 Gy sur une semaine à une dose de 40 Gy fractionnée sur 4 semaines, et on l’admi- nistre habituellement par une approche orbitale latérale 2 . La durée de survie des patients n’est habituellement pas assez longue pour que le patient éprouve des effets secondaires oculaires, tels qu’une rétinopathie radio-induite ou des cataractes radio- induites. En général, de 80 % à 90 % des patients répondent favorablement à la radiothérapie, et la tumeur s’aplatit en un à deux mois, alors qu’il faut légèrement plus de temps pour que le fluide sous- rétinien se résorbe 1 . Les autres méthodes de radio- thérapie comprennent la brachythérapie par plaques d’iode-125 (I-125), de même que la radiothérapie stéréotactique 2 . La chimiothérapie est une autre approche thérapeutique qui est efficace chez les patients qui présentent de petites lésions peu actives et, en parti- culier, chez les patients qui ont une maladie méta- statique dans des endroits autres que l’œil 2 . Chez les patients dont la maladie évolue en dépit de la chimiothérapie, la radiothérapie externe serait recommandée pour le traitement de la métastase intra-oculaire. On choisira l’observation dans le cas des patients qui présentent des lésions inactives cliniquement, asymptomatiques ou de petite taille qui ne menacent pas la vision 2 . L’énucléation peut être indiquée chez les patients dont l’œil est rendu aveugle et douloureux ou dans les rares cas où l’on ne peut éliminer de façon concluante la possibilité que la lésion soit un mélanome uvéal primitif de grande taille. Ophtalmologie Conférences scientifiques Tableau 1 : Caractéristiques pour le diagnostic différentiel Caractéristiques Mélanome Métastase uvéal primitif uvéale Couleur Peut être Jaune crème amélanotique Forme Forme de Plate ou champignon bombée Décollement de Généralement, DR Généralement, la rétine (DR) peu important DR important associé Nombre de Unilatérale, Bilatérale et lésions un site multifocale Caractéristiques En mode A : En mode A : à l’échographie réflectivité réflectivité basse moyenne à élevée à moyenne En mode B : En mode B : vide acoustique, solidité excavation de la acoustique choroïde, en forme de champignon 8. Shields JA, Shields CL, Brown GC, Eagle RC. Mushroom-shaped choroidal metastasis simulating a choroidal melanoma. Retina 2002;22(6):810-813. 9. Shields JA, Shields CL. Diagnostic approaches to intraocular tumors. In: Shields JA, Shields CL. Intraocular Tumors: A Text and Atlas. Philadelphia: WB Saunders Co.; 1992:20-22. 10. Freedman MI, Folk JC. Metastatic tumours to the eye and orbit: patient survival and clinical characteristics. Arch Ophthalmol 1987;105:1215-1219. Réunion scientifique à venir 25 février au 3 mars 2006 32 nd North American Neuro-Ophthalmology Society (NANOS) Annual Meeting Tucson, Arizona Renseigements : Courriel : ekunsey@nanosweb.org Site web : http://www.nanosweb.org/ meetings/nanos2006/ Université de Toronto Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Prochains événements 12 janvier 2006 CPI – D r Ronald Casey, Edmonton, Alberta “Optic Nerve Head and Retinal Fibre Layer Analysis: A Digital Revolution” 19 janvier 2006 CPI – D r Jeff Hurwitz, Chair, U of T Ophthalmology, Toronto “What to do with the tearing patient when the lacrimal system is patent” 28 janvier 2006 2006 Toronto Cataract Course Jan Spencer (416) 978-1617 9 février 2006 CPI – D r Paul Harasymowycz, Montréal, Québec “Angle Closure Glaucoma: diagnosis and treatment” Note : Les conférences des professeurs invités (CPI) de cette année (septembre 2005 à mai 2006) seront tenues à : The Hospital for Sick Children 555 University Avenue, Toronto Amphithéatre principal Conclusions Il est important que l’ophtalmologiste généraliste comprenne bien la maladie métastatique intra-oculaire, étant donné qu’il s’agit de l’affection maligne que l’on trouve le plus fréquemment dans l’œil. Les carcinomes, le plus souvent ceux du sein ou du poumon, produisent fréquemment des metastases à l’œil. Cependant, comme le patient n’a pas toujours des antécédents de carcinome primitif, l’ophtalmologiste doit donc garder un niveau élevé de suspicion clinique. Les cas suspects devraient faire l’objet d’un examen clinique complet, d’une angiographie fluorescéine, d’une échographie, ainsi que d’un bilan systémique, pour établir la distinction entre des lésions semblables. Le traitement le plus approprié pour le patient dépend de la consultation avec l’onco- logue médical et le radio-oncologue, ainsi que de la com- préhension de l’état visuel et général du patient. La majorité des patients présentant des lésions menaçant leur vision répondent favorablement à la radiothérapie externe. Bien que la maladie métastatique intra-oculaire soit associée à un mauvais pronostic sur le plan de la survie des patients, une évaluation effectuée en temps utile, un diagnostic précis et un traitement mis en place rapidement peuvent aider à améliorer la qualité de vie de ces patients. Le D r Somani est chargé d’enseignement de clinique au Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, à l’Université de Toronto. Il fait partie du personnel du Princess Margaret Hospital, University Health Network, Toronto. Remerciements : L’auteur souhaite remercier E. Rand Simpson, qui a révisé le manuscript du présent article, les docteurs Hugh D. McGowan et Allan Connor, pour les photographies cliniques, et le D r Charles J. Pavlin, pour la biomicroscopie ultrasonique. La prise en charge clinique a été fournie par Lee Penney, coordonnateur de l’oncologie oculaire, et par le personnel de soutien de la clinique d’oncologie oculaire. Références 1. Volpe NJ, Albert DM. Metastases to the uvea. In: Albert DM, Jakobiec FA. Principles and Practice of Ophthalmology. Philadelphia: WB Saun- ders Co.; 2000. 2. Shields JA. Metastatic tumors to the uvea. Int Ophthalmol Clin 1993; 33(3):155-161. 3. Shields CL, Shields JA, Gross NE, et al. Survey of 520 eyes with uveal metastases. Ophthalmol 1997;104:1265-1276. 4. Demirci H, Shields CL, Chao AN, Shields JA. Uveal metastasis from breast cancer in 264 patients. Am J Ophthalmol 2003;136:264-271. 5. Harbour JW, De Potter P, Shields CL, Shields JA. Uveal metastases from carcinoid. Ophthalmol 1994;101(6):1084-1090. 6. Truong SN, Fern CM, Costa DL, Spaide RF. Metastatic breast carci- noma to the retina: optical coherence tomography findings. Retina 2002;22(6):813-815. 7. Shields JA, Shields CL, Kiratli H, De Potter P. Metastatic tumors to the iris in 40 patients. Am J Ophthalmol 1995; 119:422-430. © 2005 Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médecine, Université de Toronto, seul responsable du contenu de cette publication. Édition : SNELL Communication Médicale Inc. avec la collaboration du Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médecine, Université de Toronto. MD Ophtalmologie – Conférences scientifiques est une marque de commerce de SNELL Communication Médicale Inc. Tous droits réservés. L’administration d’un traitement thérapeutique décrit ou mentionné dans Ophtalmologie – Conférences scientifiques doit toujours être conforme aux renseignements d’ordonnance approuvés au Canada. SNELL Communication Médicale se consacre à l’avancement de l’éducation médicale continue de niveau supérieur. L’élaboration de cette publication a bénéficié d’une subvention à l’éducation de Novartis Ophthalmics 130-019F Les avis de changement d’adresse et les demandes d’abonne- ment pour Ophtalmologie – Conférences Scientifiques doivent être envoyés par la poste à l’adresse C.P. 310, Succursale H, Montréal (Québec) H3G 2K8 ou par fax au (514) 932-5114 ou par courrier électronique à l’adresse info@snellmedical.com. Veuillez vous référer au bulletin Ophtalmologie – Conférences Scientifiques dans votre correspondence. Les envois non distribuables doivent être envoyés à l’adresse ci-dessus. Poste-publications #40032303 SNELL La version française a été révisée par le professeur Pierre Lachapelle, Montréal. Ophtalmologie Conférences scientifiques JANVIER/FÉVRIER 2006 Volume 4, numéro 1 COMPTE RENDU DES CONFÉRENCES SCIENTIFIQUES DU DÉPARTEMENT D’OPHTALMOLOGIE ET DES SCIENCES DE LA VISION, FACULTÉ DE MÉDECINE, UNIVERSITÉ DE TORONTO Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Faculté de médecine Université de Toronto 60 Murray St. Bureau 1-003 Toronto (Ontario) M5G 1X5 Le contenu rédactionnel d’Ophtalmologie – Conférences scientifiques est déterminé exclusivement par le Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médicine, Université de Toronto. Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Jeffrey Jay Hurwitz, M.D., Rédacteur Professeur et président Martin Steinbach, Ph.D. Directeur de la recherche The Hospital for Sick Children Elise Heon, M.D. Ophtalmologiste en chef Mount Sinai Hospital Jeffrey J. Hurwitz, M.D. Ophtalmologiste en chef Princess Margaret Hospital (Clinique des tumeurs oculaires) E. Rand Simpson, M.D. Directeur, Service d’oncologie oculaire St. Michael’s Hospital Alan Berger, M.D. Ophtalmologiste en chef Sunnybrook and Women’s College Health Sciences Centre William S. Dixon, M.D. Ophtalmologiste en chef The Toronto Hospital (Toronto Western Division and Toronto General Division) Robert G. Devenyi, M.D. Ophtalmologiste en chef La prise en charge des trous maculaires PA R DAVID T. WONG, M.D., FRCSC Les trous maculaires sont des lésions de la pleine épaisseur du tissu rétinien et centrés au niveau de la fovea. Ils ont été décrits, pour la première fois, par Knapp, en 1869, dans un cas de traumatisme oculaire 1 . Au cours des 100 années qui ont suivi, d’autres descriptions de trous maculaires ont été publiées et de nouvelles théories cherchant à en expliquer les causes ont vu le jour; mais aucun traitement n’a été conçu. La situation a toutefois consi- dérablement évolué au cours des 20 dernières années. En 1988, en effet, Gass a conçu la théorie de la traction tangentielle du vitré 2 , et en 1991, Kelly et Wendel ont montré que l’ablation chirurgicale du vitré pouvait traiter efficacement cette maladie 3 . De nos jours, les techniques modernes de diagnostic par imagerie permettent d’établir un diagnostic plus précoce et de déterminer avec plus de précision l’état d’avancement de la maladie. Conjoin- tement, les techniques chirurgicales modernes, appuyées par des traitements pharmaco- chirurgicaux d’appoint, ont permis d’augmenter le taux de fermeture des trous maculaires, améliorant ainsi les résultats obtenus au niveau de la vision. Ce numéro d’ Ophtalmologie – Conférences scientifiques décrit l’épidémiologie, l’histoire naturelle, le diagnostic et le traite- ment des trous maculaires. Epidémiologie Les données sur la prévalence des trous maculaires situés dans l’épaisseur du tissu rétinien sont limitées, et peu d’études basées sur la population ont été publiées sur ce sujet. L’étude Beaver Dam Eye a constaté que cette prévalence est de 0,3 % sur l’ensemble de la population. Cette prévalence passe de 0 % chez les sujets de moins de 54 ans, à 0,8 % chez les sujets âgés de plus de 75 ans 4 . D’autres études ont confirmé ces chiffres. 5,6 On peut donc en déduire que dans un pays comme le Canada, dont la population totale était estimée, en 2004, à 32 millions d’individus, il y avait 96 000 personnes présentant des trous maculaires. L’âge de la population augmentant, on peut s’attendre à ce que l’incidence des trous maculaires augmente. Pour des raisons qui ne sont pas encore complètement élucidées, la probabilité d’avoir des trous maculaires est trois fois plus élevée chez la femme que chez l’homme 7 . Est-ce que ce sont les changements hormonaux ou démographiques (il y a, en effet, une proportion plus élevée de femmes que d’hommes dans la tranche d’âge dite du « troisième âge ») qui sont à l’origine de cette différence? : le débat est permanent sur ce sujet. Les causes idiopathiques sont à l’origine de 85 % du nombre total de trous maculaires, alors que les causes induites par un traumatisme n’interviennent que dans 15 % des cas. Pathogenèse et évolution de la maladie. De nombreuses théories sur la pathogenèse des trous maculaires ont été élaborées au fil des ans. À l’origine, on expliquait la formation des trous maculaires par un traumatisme, accom- pagné d’une séparation mécanique et d’une nécrose 9 . Plus tard, suite à de nouvelles descrip- tions, on a constaté que les trous maculaires pouvaient se produire sans qu’il y ait eu de traumatisme. La théorie de la dégénérescence kystique s’est développée à partir du manque d’explication de l’origine des trous maculaires non traumatiques. Des kystes intra-rétiniens situés au voisinage des trous maculaires ayant été décrits, il a été postulé que la dégénéres- cence rétinienne constituait le mécanisme de formation des trous maculaires. On croyait égale- ment que la dégénérescence kystique était provoquée par la diminution du flux vasculaire liée à l’âge. Au fur et à mesure que ces kystes grossissaient, ils fusionnaient et formaient les trous maculaires. De nombreux traitements destinés à augmenter le flux vasculaire (les vasodilata- teurs comme l’acide nicotinique) ont été mis en avant, mais sans succès apparent. Sachant que la traction du vitré constituait l’une des causes de déchirure rétinienne périphérique, l’idée selon laquelle la traction antéro-postérieure du vitré était à l’origine de la formation des trous maculaires a été décrite pour la première fois en 1924. Toutefois, l’impos- sibilité de détecter une traction du vitré sur le trou maculaire a fait que cette théorie a été diffi- MC Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision FACULTY OF MEDICINE University of Toronto Disponible sur Internet à : www.ophtalmologieconferences.ca cilement acceptộe. Dautres auteurs ont essayộ dunier les thộories. Ils ont suggộrộ un ô mộcanisme combinộ ằ, associant la diminution de lộpaisseur de la macula aux transformations induites par la formation de kystes due une insufsance vasculaire, et, par la suite, la traction exercộe par le vitrộ sur un tissu maculaire devenu plus n, conduisant, ainsi, la formation des trous 10 . Cest seulement en 1988, quand Gass a crộộ un sys- tốme de classication, que lattention sest dộplacộe de la traction antộro-postộrieure du vitrộ vers la traction tangen- tielle sexerỗant le long de linterface vitro rộtinienne, pour expliquer la formation des trous maculaires. Il en rộsulta un regain dintộrờt pour les trous maculaires 11 . Gass a sug- gộrộ que la contraction tangentielle crộe un dộplacement de photorộcepteurs, avec perte de photorộcepteurs 12 . Au dộbut, lhistopathologie des opercules na rộvộlộ aucune perte de photorộcepteurs. Cependant, des ộtudes histo- pathologiques plus rộcentes, menộes sur des opercules de trous maculaires, ont mis en ộvidence une certaine perte de tissu fovộal, incluant des photorộcepteurs 13 . Le passage dun stade lautre, dans lộvolution des trous maculaires, est liộ diffộrentes forces de traction. Au stade 1, la classication de Glass dộcrivait la sộpara- tion de la rộtine et de lộpithộlium pigmentaire rộtinien (EPR) provoquộe par la traction. Cependant, des donnộes rộcentes obtenues grõce des ộtudes dimagerie par tomographie en cohộrence optique (TCO), permettent de penser que la localisation de cette sộparation subit une modication. On observe, en effet, au niveau des trous maculaires en cours de formation, la prộsence dun dộcollement de la zone corticale pộrifovộale du vitrộ, avec attachement du vitrộ au niveau de lombilic. Cette trac- tion du vitrộ pộrifovộal au niveau de la fovộa peut entraợner la sộparation des cellules de Muller des photo- rộcepteurs, ce niveau, crộant, au dộbut, un clivage au niveau des couches intra-rộtiniennes et, par la suite, une cavitộ kystique 14 . Au stade 1A, on observe une perte de lombilic avec le clivage intra-rộtinien et la traction exercộe, ce qui crộe la tache jaune ponctuelle reprộsentant probablement le pig- ment xanthophylle Au stade 1B, comme la rộtine fovộale se soulốve de la cavitộ vers la rộgion rộtinienne pộrifovộale on constate une perte totale de lombilic et les points jaunes fusion- nent pour former un anneau jaune. Au stade 2, on observe une dộhiscence de la paroi supộrieure de la cavitộ kystique, conduisant un trou maculaire de stade 2, avec un dộfaut rộtinien <400 àm. Au stade 3 : la traction tangentielle entraợne la poursuite de la dộhiscence au niveau de la couche photorộceptrice, et conduit la formation dun trou maculaire situộ dans lộpaisseur du tissu rộtinien. Cette traction tangentielle peut ộgalement former lopercule, dans la mesure oự elle libốre la paroi supộrieure du kyste. Cela permet la face postộrieure de la membrane hyaloùde de se sộparer de la rộtine, tout en restant attachộe au nerf optique, crộant ainsi un trou maculaire de stade 3 (Figure 1). Une nouvelle traction va agrandir le trou, tangen- tiellement. Un trou de stade 4 apparaợt lorsque la membrane hyaloùde postộrieure sest sộparộe du nerf optique. Diagnostic Les patients prộsentant des trous maculaires de stade 1 se plaignent rarement de troubles de la vision, alors que ceux qui en sont aux stades ultộrieurs se plaignent frộquemment de troubles de leur acuitộ visuelle centrale ou mộtamorphopsie. Au fur et mesure que les trous sagrandissent, la perte de vision augmente. Le Tableau 1 montre en dộtail lacuitộ visuelle chacun des stades. La distorsion du coussinet axial est courante : elle est due au dộplacement des photorộcepteurs 15 . Lexamen clinique demeure la mộthode la plus couramment utilisộe pour dộtecter la prộsence de trous maculaires. Lutilisation de verres de contact en biomicro- scopie oculaire lampe fente est bien supộrieure, pour dộtecter les trous maculaires et pour dộterminer leur stade davancement, lutilisation de verres tels que les verres 78D ou 90D, qui nentrent pas en contact avec la cornộe. Si lon consacre sufsamment de temps lexa- men clinique, on peut dộceler les trous maculaires tous les stades de leur ộvolution. Au stade 1, les trous mon- trent des dộpụts jaunes indiquant, un possible dộplace- ment des pigments xanthophylles. Au stade 2, on peut voir de petites dộchirures, au niveau de la couche interne, avec traction vitrộo-rộtinienne adjacente. Au stade 3, on constate une perte arrondie de tissu rộtinien > 400 àm, ainsi que la prộsence dun opercule superposộ. Une pig- mentation jaune peut ộgalement ờtre observộe, au niveau de lEPR, au sein du trou: un manchon subrộtinien liquide, environnant, peut ộgalement ờtre observộe. Un anneau de Weiss rộvốle, habituellement, la sộparation de la membrane hyaloùde postộrieure, au stade 4. Plusieurs tests, rộalisables en cabinet, peuvent aider diagnostiquer un trou maculaire. Le test Watzke - Allen, qui se pratique en biomicroscopie lampe fente, est Figure 1 : Photo de la rộtine montrant un trou maculaire de stade 3, aprốs ộlimination du rouge Tableau 1 : Caractộristiques des diffộrents stades des trous maculaires Stade 1 Stade 2 Stade 3 Stade 4 Bio- 1a-point jaune Diamốtre Diamốtre Diamốtre microscopie 1b-anneau du trou du trou du trou lampe fente jaune <400 àm >400 àm >400 àm Vitrộ Attachộ Attachộ Attachộ Sộparộ postộrieur Accuitộ 20/20 20/40 20/60 20/60 CF visuelle 20/60 20/100 20/200 Fermeture 60 % 4 %-33 % 5 %-12 % 5 %-12 % spontanộe Candidat Non Excellent Bon Assez bon la chirurgie l’intérieur du trou et la présence d’une vision relative- ment bonne, font la différence entre les pseudo trous et les trous maculaires 18 . De plus, le test de Watzke – Allen, tout comme le test au faisceau de pointage laser sont négatifs dans le cas des pseudo trous. Une TCO différen- cie facilement un pseudo trou d’un trou maculaire situé dans l’épaisseur du tissu rétinien. Il n’est pas rare que les patients présentent une mem- brane épirétinienne (MER) associée à un trou maculaire. L’examen clinique révèle la présence d’une MER dans un trou maculaire dans 25 à 65 % des cas : toutefois, ce pour- centage peut atteindre 73 % des cas, avec un examen histopathologique. Les études préliminaires n’ont pas permis de déterminer si les MER sont à l’origine ou contribuent à la formation des trous maculaires, ou si elles proviennent des déchirures ouvertes. Toutefois, une étude du Groupe « Vitrectomy for Macular Hole Study (VMHS) » a montré que la prévalence des MER est plus élevée dans les trous les plus grands, de même que la taille des MER est corrélée avec la durée du trou 19 . Ceci couramment utilisé. Cette technique consiste à diriger, à travers la fente, un faisceau étroit sur la fovea. Ce test est positif quand le patient perçoit une interruption ou un rétrécissement du faisceau. La sensibilité du test de Watzke - Allen est de 95 % par rapport à l’examen clini- que; toutefois, si on la compare à la TCO, cette sensibilité réelle chute à 60 %. 16 Une variante du test de Watzke – Allen consiste à diriger le faisceau laser de pointage sur une tache de 50 µm de diamètre située au centre du trou maculaire. L’incapacité du patient à détecter le faisceau de pointage révèle la présence d’un trou maculaire situé dans l’épaisseur du tissu rétinien. Il s’agit là d’un test extrêmement sensible. Un autre test réalisable en cabinet, hautement sensible mais non spécifique: le test de la grille de Amsler 17 . L’angiographie à la fluorescéine n’est ni sensible, ni spécifique, pour la détection des trous maculaires. En effet, au stade 2, 3 ou 4, il existe un défaut d’ouverture avec une hyperfluorescence précoce dans le trou due au manque de pigment xanthophylle et de tissu. Si la choroïde est fortement pigmentée, l’hyperfluorescence dans le trou maculaire peut être très faible, voire inexis- tante. Parfois, on observe une hypofluorescence à l’inté- rieur du trou, due aux dépôts jaunes L’échographie aux ultrasons mode B est utile pour déterminer si une séparation de la membrane hyaloïde postérieure est intervenue et peut être utile pour préciser l’état d’avancement de la maladie aux cours des derniers stades. Elle se limite, toutefois, à la détermination de la présence et du stade d’évolution des trous maculaires pré- coces. La présence d’une membrane hyaloïde postérieure attachée permet de prévoir, avec une certitude renforcée, la formation de trous maculaires dans le futur. La TCO est devenue la méthode de référence pour détecter des trous maculaires : elle a supplanté presque tous les autres tests, du fait de sa nature non invasive. Elle fournit une excellente définition de la pathologie et per- met de déterminer le stade et la taille des trous macu- laires. La TCO est supérieure au test de Watzke – Allen en termes de sensibilité. Compte tenu de sa capacité à détecter la membrane hyaloïde postérieure, la TCO a été particulièrement précieuse pour comprendre la patholo- gie des trous maculaires (Figure 2). La détection précoce d’une traction périfovéale du vitré permet d’identifier les patients qui présentent un risque de formation de trous maculaires, avant que ne surviennent les modifications kystiques. D’un point de vue pratique, la représentation graphique d’un trou par l’imagerie TCO constitue un excellent moyen pour éduquer les patients en leur per- mettant de mieux comprendre leur pathologie. La mise en œuvre de la TCO a permis d’observer l’étiologie de la maladie ainsi que le résultat des traitements. D’autres tests, tels que la micropérimétrie, l’ophtalmo- scopie à balayage laser, peuvent détecter des scotomes et mieux délimiter l’étendue des photorécepteurs atteints. Toutefois, l’impact de ces nouvelles techniques reste encore à démontrer. Diagnostic différentiel De nombreuses affections de la macula peuvent faire penser à des trous maculaires. Les membranes épiréti- niennes (MERs) peuvent avoir un faux aspect de trous (on les appelle « pseudo trous »). L’absence d’un manchon liquide subrétinien, de taches pigmentaires jaunes à Figure 2 : TCO de trous maculaires de stades 1 à 4 EPR = epithélium pigmentaire rétinien Stade 1 – traction du vitré au niveau de la bordure périfovéale, avec formation d’une cavité intra rétinienne. Stade 2 – lambeau rétinien interne relié à la face postérieure de la membrane hyaloïde avec un trou dans l’épaisseur du tissu rétinien. A noter la formation de kystes. Stade 3 – trou avec opercule superposé. Stade 4 – séparation de la membrane hyaloïde postérieure et trou maculaire. 1 2 3 4 EPR Membrane hyaloïde postérieure constitue un argument supplémentaire en faveur de la thèse selon laquelle les MERs se développent après la formation du trou maculaire. Les trous lamellaires, qui résultent d’une perte partielle de tissu rétinien peuvent également faire penser à un trou maculaire. L’étiologie précise des trous lamellaires n’est pas claire, mais on pense qu’ils sont créés par la séparation soudaine du vitré et de la surface rétinienne, dans un trou en cours de forma- tion. Un pseudo opercule peut également être observé, rendant le diagnostic plus difficile. On pense que le pseudo opercule représente le vitré condensé. La TCO fera la différence entre un trou lamellaire et un trou maculaire. (Figure 3) Il existe d’autres entités pathologiques que l’on peut confondre avec les trous maculaires, en parti- culier avec les trous maculaires de stade 1, comme l’œdème maculaire cystoïde (OMC), la rétinopathie séreuse centrale (RSC), la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) avec de larges druses centrales, le syndrome de traction vitro-maculaire et la rétinopathie solaire. L’histoire naturelle On a identifié la traction oblique du vitré comme étant un précurseur de la formation des trous macu- laires. En général, les trous maculaires progressent du stade 1A au stade 1B en quelques semaines à quelques mois. En moyenne, la durée de la conver- sion en trou dans l’épaisseur du tissu rétinien est de 4,1 mois, mais elle peut n’être que d’un mois. Les patients dont la vision est de 20/50 à 20/80 ont 66 % de chance d’évoluer, par rapport à ceux dont la vision est supérieure à 20/50, qui n’évolueront que dans 30 % des cas. Sur une période de 2 ans, 40 % des trous de stade 1 se convertiront en trous de stade 3 19 . Par conséquent, 60 % des patients atteints de trous maculaires de stade 1 ne subiront pas de con- version. Des modifications résiduelles, cohérentes avec un trou lamellaire, sont observées dans certains cas où la conversion ne s’est pas produite. Les patients porteurs de trous de stade 2 risquent, dans 67 à 94 % des cas, de voir ces trous évoluer vers les stades 3 et 4. Ces trous peuvent, dans 3 à 33% des cas, connaître une résolution spon- tanée qui peut prendre de 2 à 8 ans 20,21 . Les trous s’a- grandissent jusqu’à plus de 400 µm dans 85% des cas, avec un risque supérieur à 70% de perdre plus de 2 dixièmes d’acuité visuelle. Dans les trous de Ophtalmologie Conférences scientifiques stades 3 et 4, on constate une nouvelle perte d’acuité visuelle accompagnée d’une extension du manchon liquide subrétinien, de modifications kystiques au sein de la rétine et d’une dégénérescence des photorécepteurs. Si le manchon liquide subrétinien s’étend, le reste de la macula de même que, proba- blement, la rétine périphérique peuvent se décoller. Toutefois, cela ne se produit habituellement que dans les cas de myopie supérieure à 6 dioptries 22 . Bien que rare, la fermeture spontanée du trou peut se produire dans 5 % à 12 % des cas 23 . Le risque qu’un trou maculaire se développe dans le deuxième œil (l’œil sain) est de 3 à 22 %. Chew et col. ont rapporté que le risque de développement d’un trou maculaire était de 4,3 % dans les 3 ans, de 6,5 % dans les 4 à 5 ans et de 7,1 % après 6 ans 24 . L’usage de la TCO, dans le deuxième œil, a facilité l’identification des patients à risque élevé. S’il existe une insertion oblique du vitré au niveau de la fovea, le risque qu’un patient développe un trou maculaire est multipliée par 6 25 . Bien que le risque d’un développement bilatéral soit faible, un suivi étroit et l’éducation des patients sur leurs symptômes permettront un diagnostic et un traite- ment précoces. Traitement Avant 1991, il n’existait aucun traitement contre les trous maculaires situés dans l’épaisseur du tissu rétinien. Toutefois, à cette époque, Kelly et Wendel décrivaient la vitrectomie, le peeling de la mem- brane et le tamponnement gazeux comme des mé- thodes efficaces pour traiter les trous maculaires. Depuis cette première description, les techniques se sont perfectionnées et ont permis la mise en œuvre de stratégies extrêmement efficaces dans le traite- ment des trous maculaires. En ce qui concerne les trous maculaires de stade 1, un essai multi-centrique, randomisé, conduit par le VMHS, a montré que les interventions chirurgi- cales n’apportaient aucun bénéfice. De plus, étant donné l’évolution naturelle des trous de stade 1, – avec au moins 60 % de cas de résolution spontanée, et une conversion en trous dans l’épaisseur du tissu rétinien se produisant en 4 mois en moyenne, – la conduite habituelle consiste à observer et à surveiller pendant 3 à 4 mois. La grille d’Amsler, permettant un auto-contrôle par le patient, permet d’apprécier l’évolution entre les visites de suivi. En ce qui concerne les trous de stades 2, 3 et 4, la vitrectomie de la zone postérieure, la séparation de la membrane hyaloïde postérieure et le tampon- nement ont constitué des traitements très efficaces. Au départ, Kelly et Wendel ont montré que la ferme- ture du trou était efficace, au plan anatomique, dans 58 % des cas, avec, dans 42 % des cas, des patients qui gagnaient au moins 2 dixièmes d’acuité visuelle, après vitrectomie chirurgicale. Le pourcentage de succès de la fermeture du trou passe à 73 % et le nombre de cas où les patients gagnent au moins 2 dixièmes de vision passe à 55 %, quand les patients se font opérer dans les 6 mois qui suivent le développement du trou maculaire. Figure 3 : Trou lamellaire. Il y a encore du tissu au dessus de l’EPR EPR Le recours à une chirurgie d’appoint et au peel- ing de la membrane limitante interne (MLI) sont intéressants et peuvent permettre d’améliorer les pourcentages de succès. Auparavant, le facteur de croissance TGF-ß 2 26 , les plaquettes, le sérum auto- logue, la thrombine et le sang total 27 , étaient utilisés pour augmenter la fermeture anatomique. Con- ceptuellement, une fois que la traction à l’interface du vitré est réduite, ces appoints favorisent la ferme- ture du trou en créant une membrane permettant d’obturer le trou. On pensait que le succès connu par la fermeture des trous allait s’amplifier. Pourtant, les échecs et la réouverture ultérieure des trous ont stimulé de nouvelles recherches sur de nouvelles façons de fermer les trous. En revenant au concept de Gass de traction tan- gentielle, l’attention s’est portée sur la MLI considérée comme pouvant être à l’origine de cette traction. Cer- taines études ont montré que le peeling de cette mem- brane n’apportait aucun bénéfice alors que d’autres ont démontré le contraire. Bien que le but initial du peeling de la MLI ait été de réduire la traction qui s’exerçait sur la bordure du trou maculaire, il semble que la stimulation de la gliose constitue un facteur plus important dans le processus de réparation 28 . La MLI est fine et translucide, ce qui la rend diffi- cile à enlever et peut expliquer pourquoi son ablation a donné des résultats inconstants. En utilisant le vert d’indocyanine (ICG)pour colorer la MLI, on a rendu le peeling de la MLI plus facile et plus sûr (Figure 4) 29 . Les pourcentages de succès, au plan anatomique, ont augmenté de l’ordre de 90 %, avec une intervention chirurgicale 30 . Toutefois, on a commencé à avoir des doutes sur l’innocuité de cette méthode 31 . En effet, les patients ayant subi un peeling de la MLI utilisant de l’ICG semblaient avoir une capacité de récupération de leur acuité visuelle amoindrie par rapport à ceux qui n’avaient pas utilisé d’ICG. On a, également, pu observer des modifications de la pigmentation au niveau de l’EPR environnant, après un peeling de la MLI utilisant d’ ICG. Le mécanisme exact de la sur- venue de cette toxicité reste peu clair. Des lésions au niveau des mitochondries et l’osmolalité sont des facteurs qui peuvent contribuer à cette toxicité. On a réalisé des études pour déterminer si, en utilisant des doses réduites d’ICG, pendant l’inter- vention, on pouvait améliorer la tolérance au niveau de l’œil. On a montré que des concentrations d’ICG inférieures à 0,5 mg/mL n’étaient pas toxiques sur des cultures de cellules d’ERP 32 , mais que les faibles concentrations diminuaient la coloration de la MLI par rapport aux concentrations plus élevées. Il faudra faire de nouvelles études in vivo pour déter- miner les concentrations d’ICG qui ne provoquent pas de lésions. La toxicité possible de l’ICG a suscité un intérêt pour d’autres méthodes permettant d’améliorer la visualisation de la MLI. Le Kenalog peut être utilisé pour mieux visualiser la MLI. Bien qu’il ne colore pas la MLI, le kenalog adhère à la membrane hyaloïde postérieure qu’il rend plus facile à détecter. De plus, s’il se crée une bordure au niveau de la MLI, les précipités de kenalog permettront de la visualiser. Toutefois, l’innocuité du kenalog est toujours questionnée. Les effets à long terme, tels que la formation d’une cataracte, le glaucome, la toxicité vis à vis de l’EPR, n’ont pas été bien étudiés avec ce produit que l’on utilise comme adjuvant de visualisation. L’utilisation du bleu trypan pour améliorer la visualisation de la MLI est prometteuse. Bien qu’il ne colore pas la MLI, la contre–coloration est semblable à celle du kenalog et renforce la visualisation des bordures de la membrane : ce qui est utile pour le peeling de la MLI. A ce jour, les études n’ont montré aucune toxicité. Bien que ce produit ne soit pas encore autorisé au Canada, de récents travaux con- duits en Europe se sont révélés prometteurs 33 . Pour faciliter la fermeture des trous maculaires, on a souvent recours à un tamponnement au gaz pour réduire le manchon liquide subrétinien et pour permettre la réobturation. La durée de la position « face vers le bas » varie de 24 heures à 3 semaines, la plupart des chirurgiens optant pour 7 à 10 jours environ et utilisant le perfluoropropane (C3F8) de préférence à l’hexafluorure de soufre (SF6). Un autre gaz, le C2F6, est idéal pour la chirurgie du trou maculaire car sa durée se situe entre celle du SF6 et celle du C3F8. Il n’est toutefois pas autorisé au Canada. L’huile de silicone, un tamponnement à long terme, peut-être utilisée pour les patients qui ne peuvent pas supporter la position « face vers le bas » ou qui ont connu des échecs. Mais pour des complications telles que le glaucome, la décompen- sation cornéenne, la nécessité de pratiquer une nou- velle ablation chirurgicale, un décalage significatif de la réfraction, montrent que ce n’est pas le tamponnement idéal pour une réparation primaire. Une vitrectomie auto-obturante chirurgicale, utilisant une technique à jauge de 23 à 25 est idéale pour la chirurgie du trou maculaire. L’inconfort du patient et la réponse inflammatoire sont minimisés et le patient récupère plus vite sans sutures. Les taux de complications à long terme ne sont, à ce jour, pas différents de ceux que l’on observe avec les systèmes à jauge de 20 34 . Ophtalmologie Conférences scientifiques Figure 4 : Peeling de la membrane limitante interne (MLI), utilisant l’ICG (vert d’indocyanine). 24. Chew EY, Sperducto RD, Hiller R, et al. Clinical course of macular holes: the Eye Disease Case-Control Study. Arch Ophthalmol 1999;117(2):242-246. 25. Chan A, Duker JS, Schman JS, Fujumoto JG. 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Le D r Wong déclare qu'il est Directeur médical et consultant pour Labtician Ophthalmics, Inc. et a reçu des fonds de recherche et des honoraires à titre de conférencier et de consultant d’Alcon Canada. Réunions scientifiques à venir 30 avril – 4 mai 2006 Réunion annuelle de l’Association for Research in Vision and Ophthalmology (ARVO) Fort Lauderdale, Floride Renseignements : Tél. : 240-221-2900 Fax : 240-221-0370 Site web : www.arvo.org 21 au 24 juin 2006 Réunion annuelle de la Société canadienne d’ophtalmologie (SCO) Westin Harbour Castle Toronto, Ontario Renseignements : Ms Kim Ross Courriel : kross@eyesite.ca Site web : www.eyesite.ca/annualmeet- ing/2006/ Conclusion Il y a 15 ans environ, un trou maculaire était une maladie incurable. De nos jours, des traitements chirurgi- caux bien établis ont changé le pronostic global pour ces patients. On enregistre d’excellents taux de fermeture dans plus de 90 % des interventions et les techniques de visualisation renforcée de la MLI permettent de fixer de nouvelles normes pour la récupération visuelle. De nou- veaux progrès, grâce aux nouvelles techniques chirurgi- cales, continueront d’apporter aux patients des bénéfices toujours plus grands. En très peu de temps, nous avons parcouru un très long chemin. Le D r Wong est professeur adjoint au sein du Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision (DOSV) à l’Université de Toronto. Il est directeur d’un programme de bourses de recherche au sein du DOSV et chirurgien spécialisé en chirurgie de la rétine à l’Hôpital St. Michael. Références 1. Knapp H. Uber isolorite zerreissungen der aderhaut in folge von traumen auf dem augopfel. Arch Augenheilkd 1869;1:6-12. 2. Gass JDM. Idiopathic senile macular hole: its early stages and development. Arch Ophthalmol 1988;106:629-639. 3. Kelly NE, Wendel RT. 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L’élaboration de cette publication a bénéficié d’une subvention à l’éducation de Novartis Ophthalmics 130-20F Les avis de changement d’adresse et les demandes d’abonne- ment pour Ophtalmologie – Conférences Scientifiques doivent être envoyés par la poste à l’adresse C.P. 310, Succursale H, Montréal (Québec) H3G 2K8 ou par fax au (514) 932-5114 ou par courrier électronique à l’adresse info@snellmedical.com. Veuillez vous référer au bulletin Ophtalmologie – Conférences Scientifiques dans votre correspondence. Les envois non distribuables doivent être envoyés à l’adresse ci-dessus. Poste-publications #40032303 SNELL La version française a été révisée par le professeur Pierre Lachapelle, Montréal. [...]... monoculaire La C N PG est ộgalement la mộthode de choix chez les patients prộsentant un risque dhypotonie post-opộratoire La non-pộnộtration de la chambre antộrieure rộduit le degrộ dinammation post-opộratoire, diminuant ainsi le risque post-opộratoire de formation de la cataracte Cela est particuliốrement bộnộfique chez les jeunes patients De plus, la morphologie de la bulle associộe la C N PG (absente... revue de 35 ộtudes importantes examinant ces deux paramốtres dans la CNPG est prộsentộe dans les paragraphes suivants 17, 2 3-2 5-5 8 La premiốre ộtude de rộfộrence sur la CNPG a ộtộ menộe par Stegmann en 1999 57 Lauteur a ộvaluộ une sộrie consộcutive de 214 patients subissant une VC; la PIO moyenne a ộtộ rộduite de 47, 4 16,9 mm Hg et les taux de succốs ộtaient de 82 ,7 % et 89 % (pour un succốs ô complet ằ et... RENDU DES CONFẫRENCES SCIENTIFIQUES DU DẫPARTEMENT DOPHTALMOLOGIE ET DES SCIENCES DE LA VISION, FACULTẫ DE MẫDECINE, UNIVERSITẫ DE TORONTO FACU LT Y OF MEDICINE Un i v e r s i t y o f To r o n t o Dộpartement dophtalmologie et des sciences de la vision Dộpartement dophtalmologie et des sciences de la vision Jeffrey Jay Hurwitz, M.D., Rộdacteur Professeur et prộsident Martin Steinbach, Ph.D Directeur de. .. SCIENTIFIQUES DU DẫPARTEMENT DOPHTALMOLOGIE ET DES SCIENCES DE LA VISION, FACULTẫ DE MẫDECINE, UNIVERSITẫ DE TORONTO FACU LT Y OF MEDICINE Un i v e r s i t y o f To r o n t o Dộpartement dophtalmologie et des sciences de la vision Dộpartement dophtalmologie et des sciences de la vision Jeffrey Jay Hurwitz, M.D., Rộdacteur Professeur et prộsident Martin Steinbach, Ph.D Directeur de la recherche The... Progression de cataracte tardive Trabộculectomie 17, 21 14,15 16, 67 13,89 8,00 12,89 Viscocanulostomie 13,16 5,86 4,63 3, 47 1,00 4,50 8 ,77 2,84 0,86 3 ,73 0,00 9,63 Sclộrectomie profonde Ophtalmologie Confộrences scientifiques avec implant de collagốne34 48 mois, le taux de succốs complet (mitigộ) ộtait de 38 (69 %) et de 69 (100 %) pour la SP et la SP avec implant de collagốne, respectivement La compilation des... rộduit le risque de fuite tardive, de blộbite et dendophtalmite Les connaissances acquises grõce lộtude de la CNPG ont contribuộ largement mieux connaợtre lanatomie de langle ainsi que limportance des choroùdes comme site de drainage de lhumeur aqueuse La question de savoir si la chirurgie du glaucome reposera lavenir sur la CNPG reste dộterminer, ộtant donnộ que de nombreuses nouvelles interventions... dappoint incluent le 5-uorouracile et la goniopuncture au laser Nd-YAG La goniopuncture consiste en des microperforations de la MTD laide dun laser Nd-YAG pour augmenter la filtration Le rụle de ces traitements dappoint ainsi que de celui de la CNPG en tant quentitộ chirurgicale viable est examinộ ci-dessous Mộcanisme daction Le mộcanisme daction la base de la rộduction de la PIO est ộvident dans la trabộculectomie... arriver sur le ligament de lộperon sclộral oự les bres sont blanches et parall les au limbe La dissection est ensuite poursuivie en avant jusqu la membrane de Descemet (MD), ce qui ouvrira le canal de Schlemm (CS) ce stade, peu de force, sinon aucune, est nộcessaire pour progresser Notez le pelage de la paroi interne du CS dans la gure Membrane de Descemet Figure 2: An de xer limplant de collagốne pour... moyens de complications pour la trabộculectomie, la VC et la SP dans les 35 ộtudes examinộes Les auteurs ont rộcemment terminộ une ộtude prospective randomisộe comparant la trabộculectomie et la SP avec un traitement dappoint ( savoir les antimộtabolites, la goniopuncture, les ponctions avec des aiguilles et la lyse de suture au laser) utilisộes selon les indications Dans cette ộtude, la rộduction de la... sciences de la vision Facultộ de mộdecine Universitộ de Toronto 60 Murray St Bureau 1-0 03 Toronto (Ontario) M5G 1X5 Le contenu rộdactionnel dOphtalmologie Confộrences scientiques est dộterminộ exclusivement par le Dộpartement dophtalmologie et des sciences de la vision, Facultộ de mộdicine, Universitộ de Toronto Tableau 1 : Sộlection des patients Indications Tous les glaucomes angle ouvert (en particulier . que dans 30 % des cas. Sur une période de 2 ans, 40 % des trous de stade 1 se convertiront en trous de stade 3 19 . Par conséquent, 60 % des patients atteints de trous maculaires de stade 1 ne subiront. taux de fermeture dans plus de 90 % des interventions et les techniques de visualisation renforcée de la MLI permettent de fixer de nouvelles normes pour la récupération visuelle. De nou- veaux. sufsamment de temps lexa- men clinique, on peut dộceler les trous maculaires tous les stades de leur ộvolution. Au stade 1, les trous mon- trent des dộpụts jaunes indiquant, un possible dộplace- ment