Victor Hugo - Claude Gueux pdf

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Claude Gueux Hugo, Victor Publication: 1834 Catégorie(s): Fiction, Nouvelles Source: http://www.ebooksgratuits.com A Propos Hugo: Victor-Marie Hugo (26 February 1802 — 22 May 1885) was a French poet, novelist, playwright, essayist, visual artist, statesman, human rights campaigner, and perhaps the most influential exponent of the Romantic movement in France In France, Hugo's literary reputation rests on his poetic and dramatic output Among many volumes of poetry, Les Contemplations and La Légende des siècles stand particularly high in critical esteem, and Hugo is sometimes identified as the greatest French poet In the English-speaking world his best-known works are often the novels Les Misérables and Notre-Dame de Paris (sometimes translated into English as The Hunchback of Notre-Dame) Though extremely conservative in his youth, Hugo moved to the political left as the decades passed; he became a passionate supporter of republicanism, and his work touches upon most of the political and social issues and artistic trends of his time Source: Wikipedia Disponible sur Feedbooks pour Hugo: • Fantine (1862) • Cosette (1862) • Marius (1862) • Jean Valjean (1862) • L'idylle rue Plumet et l'épopée rue Saint-Denis (1862) • Notre-Dame de Paris - 1482 (1831) • La fin de Satan (1886) • Le Dernier Jour d'un condamné (1829) • Les Contemplations (1859) • Les Burgraves (1843) Note: Ce livre vous est offert par Feedbooks http://www.feedbooks.com Il est destiné une utilisation strictement personnelle et ne peut en aucun cas être vendu Note de la première édition La lettre ci-dessous, dont l’original est déposé aux bureaux de la Revue de Paris1, fait trop d’honneur son auteur pour que nous ne la reproduisions pas ici Elle est désormais liée toutes les réimpressions de Claude Gueux « Dunkerque, le 30 juillet 1834 « Monsieur le directeur de la Revue de Paris, « Claude Gueux, de Victor Hugo, par vous inséré dans votre livraison du courant, est une grande leỗon ; aidez-moi, je vous prie, la faire profiter « Rendez-moi, je vous prie, le service d’en faire tirer mes frais autant d’exemplaires qu’il y a de députés en France, et de les leur adresser individuellement et bien exactement « J’ai l’honneur de vous saluer « CHARLES CARLIER, « Négociant » 1.Claude Gueux a paru d’abord dans la Revue de Paris CLAUDE GUEUX Il y a sept ou huit ans, un homme nommé Claude Gueux, pauvre ouvrier, vivait Paris Il avait avec lui une fille qui était sa mtresse, et un enfant de cette fille Je dis les choses comme elles sont, laissant le lecteur ramasser les moralités mesure que les faits les sèment sur leur chemin L’ouvrier était capable, habile, intelligent, fort maltraité par l’éducation, fort bien traité par la nature, ne sachant pas lire et sachant penser Un hiver, l’ouvrage manqua Pas de feu ni de pain dans le galetas L’homme, la fille et l’enfant eurent froid et faim L’homme vola Je ne sais ce qu’il vola, je ne sais où il vola Ce que je sais, c’est que de ce vol il résulta trois jours de pain et de feu pour la femme et pour l’enfant, et cinq ans de prison pour l’homme L’homme fut envoyé faire son temps la maison centrale de Clairvaux Clairvaux, abbaye dont on a fait une bastille, cellule dont on a fait un cabanon, autel dont on a fait un pilori Quand nous parlons de progrès, c’est ainsi que certaines gens le comprennent et l’exécutent Voilà la chose qu’ils mettent sous notre mot Poursuivons Arrivé là, on le mit dans un cachot pour la nuit, et dans un atelier pour le jour Ce n’est pas l’atelier que je blâme Claude Gueux, honnête ouvrier naguère, voleur désormais, était une figure digne et grave Il avait le front haut, déjà ridé quoique jeune encore, quelques cheveux gris perdus dans les touffes noires, l’œil doux et fort puissamment enfoncé sous une arcade sourcilière bien modelée, les narines ouvertes, le menton avancé, la lèvre dédaigneuse C’était une belle tête On va voir ce que la société en a fait Il avait la parole rare, le geste peu fréquent, quelque chose d’impérieux dans toute sa personne et qui se faisait obéir, l’air pensif, sérieux plutôt que souffrant Il avait pourtant bien souffert Dans le dépôt où Claude Gueux était enfermé, il y avait un directeur des ateliers, espèce de fonctionnaire propre aux prisons, qui tient tout ensemble du guichetier et du marchand, qui fait en même temps une commande l’ouvrier et une menace au prisonnier, qui vous met l’outil aux mains et les fers aux pieds Celui-là était lui-même une variété de l’espèce, un homme bref, tyrannique, obéissant ses idées, toujours courte bride sur son autorité ; d’ailleurs, dans l’occasion, bon compagnon, bon prince, jovial même et raillant avec grâce ; dur plutôt que ferme ; ne raisonnant avec personne, pas même avec lui ; bon père, bon mari sans doute, ce qui est devoir et non vertu ; en un mot, pas méchant, mauvais C’était un de ces hommes qui n’ont rien de vibrant ni d’élastique, qui sont composés de molécules inertes, qui ne résonnent au choc d’aucune idée, au contact d’aucun sentiment, qui ont des colères glacées, des haines mornes, des emportements sans émotion, qui prennent feu sans s’échauffer, dont la capacité de calorique est nulle, et qu’on dirait souvent faits de bois ; ils flambent par un bout et sont froids par l’autre La ligne principale, la ligne diagonale du caractère de cet homme, c’était la ténacité Il était fier d’être tenace, et se comparait Napoléon Ceci n’est qu’une illusion d’optique Il y a nombre de gens qui en sont dupes et qui, certaine distance, prennent la ténacité pour de la volonté, et une chandelle pour une étoile Quand cet homme donc avait une fois ajusté ce qu’il appelait sa volonté une chose absurde, il allait tête haute et travers toute broussaille jusqu’au bout de la chose absurde L’entêtement sans l’intelligence, c’est la sottise soudée au bout de la bêtise et lui servant de rallonge Cela va loin En général, quand une catastrophe privée ou publique s’est écroulée sur nous, si nous examinons, d’après les dộcombres qui en gisent terre, de quelle faỗon elle s’est échafaudée, nous trouvons presque toujours qu’elle a été aveuglément construite par un homme médiocre et obstiné qui avait foi en lui et qui s’admirait Il y a par le monde beaucoup de ces petites fatalités têtues qui se croient des providences Voilà donc ce que c’était que le directeur des ateliers de la prison centrale de Clairvaux Voilà de quoi était fait le briquet avec lequel la société frappait chaque jour sur les prisonniers pour en tirer des étincelles L’étincelle que de pareils briquets arrachent de pareils cailloux allume souvent des incendies Nous avons dit qu’une fois arrivé Clairvaux, Claude Gueux fut numéroté dans un atelier et rivé une besogne Le directeur de l’atelier fit connaissance avec lui, le reconnut bon ouvrier, et le traita bien Il part même qu’un jour, étant de bonne humeur, et voyant Claude Gueux fort triste, car cet homme pensait toujours celle qu’il appelait sa femme, il lui conta, par manière de jovialité et de passe-temps, et aussi pour le consoler, que cette malheureuse s’était faite fille publique Claude demanda froidement ce qu’était devenu l’enfant On ne savait Au bout de quelques mois, Claude s’acclimata l’air de la prison et parut ne plus songer rien Une certaine sérénité sévère, propre son caractère, avait repris le dessus Au bout du même espace de temps peu près, Claude avait acquis un ascendant singulier sur tous ses compagnons Comme par une sorte de convention tacite, et sans que personne sût pourquoi, pas même lui, tous ces hommes le consultaient, l’écoutaient, l’admiraient et l’imitaient, ce qui est le dernier degré ascendant de l’admiration Ce n’était pas une médiocre gloire d’être obéi par toutes ces natures désobéissantes Cet empire lui était venu sans qu’il y songeât Cela tenait au regard qu’il avait dans les yeux L’œil de l’homme est une fenêtre par laquelle on voit les pensées qui vont et viennent dans sa tête Mettez un homme qui contient des idées parmi des hommes qui n’en contiennent pas, au bout d’un temps donné, et par une loi d’attraction irrésistible, tous les cerveaux ténébreux graviteront humblement et avec adoration autour du cerveau rayonnant Il y a des hommes qui sont fer et des hommes qui sont aimant Claude était aimant En moins de trois mois donc, Claude était devenu l’âme, la loi et l’ordre de l’atelier Toutes ces aiguilles tournaient sur son cadran Il devait douter lui-même par moments s’il était roi ou prisonnier C’était une sorte de pape captif avec ses cardinaux Et, par une réaction toute naturelle, dont l’effet s’accomplit sur toutes les échelles, aimé des prisonniers, il était détesté des geôliers Cela est toujours ainsi La popularité ne va jamais sans la défaveur L’amour des esclaves est toujours doublé de la haine des mtres Claude Gueux était grand mangeur C’était une particularité de son organisation Il avait l’estomac fait de telle sorte que la nourriture de deux hommes ordinaires suffisait peine sa journée M de Cotadilla avait un de ces appétits-là, et en riait ; mais ce qui est une occasion de gaieté pour un duc, grand d’Espagne, qui a cinq cent mille moutons, est une charge pour un ouvrier et un malheur pour un prisonnier Claude Gueux, libre dans son grenier, travaillait tout le jour, gagnait son pain de quatre livres et le mangeait Claude Gueux, en prison, travaillait tout le jour et recevait invariablement pour sa peine une livre et demie de pain et quatre onces de viande La ration est inexorable Claude avait donc habituellement faim dans la prison de Clairvaux Il avait faim, et c’était tout Il n’en parlait pas C’était sa nature ainsi Un jour, Claude venait de dévorer sa maigre pitance, et s’était remis son métier, croyant tromper la faim par le travail Les autres prisonniers mangeaient joyeusement Un jeune homme, pâle, blanc, faible, vint se placer près de lui Il tenait la main sa ration, laquelle il n’avait pas encore touché, et un couteau Il restait debout, près de Claude, ayant l’air de vouloir parler et de ne pas oser Cet homme, et son pain, et sa viande, importunaient Claude – Que veux-tu ? dit-il enfin brusquement – Que tu me rendes un service, dit timidement le jeune homme – Quoi ? reprit Claude – Que tu m’aides manger cela J’en trop Une larme roula dans l’œil hautain de Claude Il prit le couteau, partagea la ration du jeune homme en deux parts égales, en prit une, et se mit manger – Merci, dit le jeune homme Si tu veux, nous partagerons comme cela tous les jours – Comment t’appelles-tu ? dit Claude Gueux – Albin – Pourquoi es-tu ici ? reprit Claude – J’ai volé – Et moi aussi, dit Claude Ils partagèrent en effet de la sorte tous les jours Claude Gueux avait trente-six ans, et par moments il en paraissait cinquante, tant sa pensée habituelle était sévère Albin avait vingt ans, on lui en eût donné dixsept, tant il y avait encore d’innocence dans le regard de ce voleur Une étroite amitié se noua entre ces deux hommes, amitié de père fils plutôt que de frère frère Albin était encore presque un enfant ; Claude était déjà presque un vieillard Ils travaillaient dans le même atelier, ils couchaient sous la même clef de voûte, ils se promenaient dans le même préau, ils mordaient au même pain Chacun des deux amis était l’univers pour l’autre Il part qu’ils étaient heureux Nous avons déjà parlé du directeur des ateliers Cet homme, haï des prisonniers, était souvent obligé, pour se faire obéir d’eux, d’avoir recours Claude Gueux, qui en était aimé Dans plus d’une occasion, lorsqu’il s’était agi d’empêcher une rébellion ou un tumulte, l’autorité sans titre de Claude Gueux avait prêté main-forte l’autorité officielle du directeur En effet, pour contenir les prisonniers, dix paroles de Claude valaient dix gendarmes Claude avait maintes fois rendu ce service au directeur Aussi le directeur le détestait-il cordialement Il était jaloux de ce voleur Il avait au fond du cœur une haine secrète, envieuse, implacable, contre Claude, une haine de souverain de droit souverain de fait, de pouvoir temporel pouvoir spirituel Ces haines-là sont les pires Claude aimait beaucoup Albin, et ne songeait pas au directeur Un jour, un matin, au moment où les porte-clefs transvasaient les prisonniers deux deux du dortoir dans l’atelier, un guichetier appela Albin, qui était côté de Claude et le prévint que le directeur le demandait – Que te veut-on ? dit Claude – Je ne sais pas, dit Albin Le guichetier emmena Albin La matinée se passa, Albin ne revint pas l’atelier Quand arriva l’heure du repas, Claude pensa qu’il retrouverait Albin au préau Albin n’était pas au préau On rentra dans l’atelier, Albin ne reparut pas dans l’atelier La journée s’écoula ainsi Le soir, quand on ramena les prisonniers dans leur dortoir, Claude y chercha des yeux Albin, et ne le vit pas Il part qu’il souffrait beaucoup dans ce moment-là, car il adressa la parole un guichetier, ce qu’il ne faisait jamais – Est-ce qu’Albin est malade ? dit-il – Non, répondit le guichetier – D’où vient donc, reprit Claude, qu’il n’a pas reparu aujourd’hui ? – Ah ! dit négligemment le porte-clefs, c’est qu’on l’a changé de quartier Les témoins qui ont déposé de ces faits plus tard remarquèrent qu’à cette réponse du guichetier la main de Claude, qui portait une chandelle allumée, trembla légèrement Il reprit avec calme : – Qui a donné cet ordre-là ? Le guichetier répondit : – M D Le directeur des ateliers s’appelait M D La journée du lendemain se passa comme la journée précédente, sans Albin Le soir, l’heure de la clôture des travaux, le directeur, M D., vint faire sa ronde habituelle dans l’atelier Du plus loin que Claude le vit, il ôta son bonnet de grosse laine, il boutonna sa veste grise, triste livrée de Clairvaux, car il est de principe dans les prisons qu’une veste respectueusement boutonnée prévient favorablement les supérieurs, et il se tint debout et son bonnet la main l’entrée de son banc, attendant le passage du directeur Le directeur passa – Monsieur ! dit Claude Le directeur s’arrêta et se détourna demi – Monsieur, reprit Claude, est-ce que c’est vrai qu’on a changé Albin de quartier ? – Oui, répondit le directeur – Monsieur, poursuivit Claude, j’ai besoin d’Albin pour vivre Il ajouta : – Vous savez que je n’ai pas assez de quoi manger avec la ration de la maison, et qu’Albin partageait son pain avec moi – C’était son affaire, dit le directeur – Monsieur, est-ce qu’il n’y aurait pas moyen de faire remettre Albin dans le même quartier que moi ? – Impossible Il y a décision prise – Par qui ? – Par moi – Monsieur D., reprit Claude, c’est la vie ou la mort pour moi, et cela dépend de vous – Je ne reviens jamais sur mes décisions – Monsieur, est-ce que je vous fait quelque chose ? – Rien – En ce cas, dit Claude, pourquoi me séparez-vous d’Albin ? – Parce que, dit le directeur Cette explication donnée, le directeur passa outre Claude baissa la tête et ne répliqua pas Pauvre lion en cage qui l’on ôtait son chien ! Nous sommes forcé de dire que le chagrin de cette séparation n’altéra en rien la voracité en quelque sorte maladive du prisonnier Rien d’ailleurs ne parut sensiblement changé en lui Il ne parlait d’Albin aucun de ses camarades Il se promenait seul dans le préau aux heures de récréation, et il avait faim Rien de plus Cependant ceux qui le connaissaient bien remarquaient quelque chose de sinistre et de sombre qui s’épaississait chaque jour de plus en plus sur son visage Du reste, il était plus doux que jamais Plusieurs voulurent partager leur ration avec lui, il refusa en souriant Tous les soirs, depuis l’explication que lui avait donnée le directeur, il faisait une espèce de chose folle qui étonnait de la part d’un homme aussi sérieux Au moment où le directeur, ramené heure fixe par sa tournée habituelle, passait devant le métier de Claude, Claude levait les yeux et le regardait fixement, puis il lui adressait d’un ton plein d’angoisse et de colère, qui tenait la fois de la prière et de la menace, ces deux mots seulement : Et Albin ? Le directeur faisait semblant de ne pas entendre ou s’éloignait en haussant les épaules Cet homme avait tort de hausser les épaules, car il était évident pour tous les spectateurs de ces scènes étranges que Claude Gueux était intérieurement déterminé quelque chose Toute la prison attendait avec anxiété quel serait le résultat de cette lutte entre une ténacité et une résolution Il a été constaté qu’une fois entre autres Claude dit au directeur : – Écoutez, monsieur, rendez-moi mon camarade Vous ferez bien, je vous assure Remarquez que je vous dis cela Une autre fois, un dimanche, comme il se tenait dans le préau, assis sur une pierre, les coudes sur les genoux et son front dans ses mains, immobile depuis plusieurs heures dans la même attitude, le condamné Faillette s’approcha de lui, et lui cria en riant : – Que diable fais-tu donc là, Claude ? Claude leva lentement sa tête sévère, et dit : – Je juge quelqu’un Un soir enfin, le 25 octobre 1831, au moment où le directeur faisait sa ronde, Claude brisa sous son pied avec bruit un verre de montre qu’il avait trouvé le matin dans un corridor Le directeur demanda d’où venait ce bruit – Ce n’est rien, dit Claude, c’est moi Monsieur le directeur, rendezmoi mon camarade – Impossible, dit le mtre – Il le faut pourtant, dit Claude d’une voix basse et ferme ; et, regardant le directeur en face, il ajouta : – Réfléchissez Nous sommes aujourd’hui le 25 octobre Je vous donne jusqu’au novembre Un guichetier fit remarquer M D que Claude le menaỗait, et que c’était un cas de cachot – Non, point de cachot, dit le directeur avec un sourire dédaigneux ; il faut être bon avec ces gens-là ! Le lendemain, le condamné Pernot aborda Claude, qui se promenait seul et pensif, laissant les autres prisonniers s’ébattre dans un petit carré de soleil l’autre bout de la cour – Eh bien ! Claude, quoi songes-tu ? tu parais triste – Je crains, dit Claude, qu’il n’arrive bientôt quelque malheur ce bon M D Il y a neuf jours pleins du 25 octobre au novembre Claude n’en laissa pas passer un sans avertir gravement le directeur de l’état de plus en plus douloureux où le mettait la disparition d’Albin Le directeur, fatigué, lui infligea une fois vingt-quatre heures de cachot, parce que la prière ressemblait trop une sommation Voilà tout ce que Claude obtint Le novembre arriva Ce jour-là, Claude s’éveilla avec un visage serein qu’on ne lui avait pas encore vu depuis le jour où la décision de M D l’avait séparé de son ami En se levant, il fouilla dans une espèce de caisse de bois blanc qui était au pied de son lit, et qui contenait ses quelques guenilles Il en tira une paire de ciseaux de couturière C’était, 10 La laine était courte, la poitrine était profonde Il y fouilla longtemps et plus de vingt reprises en criant – Cœur de damné, je ne te trouverai donc pas ! – Et enfin il tomba baigné dans son sang, évanoui sur le mort Lequel des deux était la victime de l’autre ? Quand Claude reprit connaissance, il était dans un lit, couvert de linges et de bandages, entouré de soins Il avait auprès de son chevet de bonnes sœurs de charité, et de plus un juge d’instruction qui instrumentait et qui lui demanda avec beaucoup d’intérêt : – Comment vous trouvezvous ? Il avait perdu une grande quantité de sang, mais les ciseaux avec lesquels il avait eu la superstition touchante de se frapper avaient mal fait leur devoir ; aucun des coups qu’il s’était portés n’était dangereux Il n’y avait de mortelles pour lui que les blessures qu’il avait faites M D Les interrogatoires commencèrent On lui demanda si c’était lui qui avait tué le directeur des ateliers de la prison de Clairvaux Il répondit : Oui On lui demanda pourquoi Il répondit : Parce que Cependant, un certain moment, ses plaies s’envenimèrent ; il fut pris d’une fièvre mauvaise dont il faillit mourir Novembre, décembre, janvier et février se passèrent en soins et en préparatifs ; médecins et juges s’empressaient autour de Claude ; les uns guérissaient ses blessures, les autres dressaient son échafaud Abrégeons Le 16 mars 1832, il parut, étant parfaitement guéri, devant la cour d’assises de Troyes Tout ce que la ville peut donner de foule était Claude eut une bonne attitude devant la cour Il s’était fait raser avec soin, il avait la tête nue, il portait ce morne habit des prisonniers de Clairvaux, mi-parti de deux espèces de gris Le procureur du roi avait encombré la salle de toutes les bayonnettes de l’arrondissement, « afin, dit-il l’audience, de contenir tous les scélérats qui devaient figurer comme témoins dans cette affaire » Lorsqu’il fallut entamer les débats, il se présenta une difficulté singulière Aucun des témoins des événements du novembre ne voulait dộposer contre Claude Le prộsident les menaỗa de son pouvoir discrétionnaire Ce fut en vain Claude alors leur commanda de déposer Toutes les langues se délièrent Ils dirent ce qu’ils avaient vu Claude les écoutait tous avec une profonde attention Quand l’un d’eux, par oubli, ou par affection pour Claude, omettait des faits la charge de l’accusé, Claude les rétablissait De témoignage en témoignage, la série des faits que nous venons de développer se déroula devant la cour 16 Il y eut un moment où les femmes qui étaient pleurèrent L’huissier appela le condamné Albin C’était son tour de déposer Il entra en chancelant ; il sanglotait Les gendarmes ne purent empêcher qu’il n’allât tomber dans les bras de Claude Claude le soutint et dit en souriant au procureur du roi – Voilà un scélérat qui partage son pain avec ceux qui ont faim – Puis il baisa la main d’Albin La liste des témoins épuisée, monsieur le procureur du roi se leva et prit la parole en ces termes – Messieurs les jurés, la société serait ébranlée jusque dans ses fondements, si la vindicte publique n’atteignait pas les grands coupables comme celui qui, etc Après ce discours mémorable, l’avocat de Claude parla La plaidoirie contre et la plaidoirie pour firent, chacune leur tour, les évolutions qu’elles ont coutume de faire dans cette espèce d’hippodrome qu’on appelle un procès criminel Claude jugea que tout n’était pas dit Il se leva son tour Il parla de telle sorte qu’une personne intelligente qui assistait cette audience s’en revint frappée d’étonnement Il part que ce pauvre ouvrier contenait bien plutôt un orateur qu’un assassin Il parla debout, avec une voix pénétrante et bien ménagée, avec un œil clair, honnête et résolu, avec un geste presque toujours le même, mais plein d’empire Il dit les choses comme elles étaient, simplement, sérieusement, sans charger ni amoindrir, convint de tout, regarda l’article 296 en face, et posa sa tête dessous Il eut des moments de véritable haute éloquence qui faisaient remuer la foule, et où l’on se répétait l’oreille dans l’auditoire ce qu’il venait de dire Cela faisait un murmure pendant lequel Claude reprenait haleine en jetant un regard fier sur les assistants Dans d’autres instants, cet homme qui ne savait pas lire était doux, poli, choisi, comme un lettré ; puis, par moments encore, modeste, mesuré, attentif, marchant pas pas dans la partie irritante de la discussion, bienveillant pour les juges Une fois seulement, il se laissa aller une secousse de colère Le procureur du roi avait établi dans le discours que nous avons cité en entier que Claude Gueux avait assassiné le directeur des ateliers sans voie de fait ni violence de la part du directeur, par conséquent sans provocation – Quoi ! s’écria Claude, je n’ai pas été provoqué ! Ah ! oui, vraiment, c’est juste, je vous comprends Un homme ivre me donne un coup de poing, je le tue, j’ai été provoqué, vous me faites grâce, vous m’envoyez aux galères Mais un homme qui n’est pas ivre et qui a toute sa raison me comprime le cœur pendant quatre ans, m’humilie pendant quatre ans, 17 me pique tous les jours, toutes les heures, toutes les minutes, d’un coup d’épingle quelque place inattendue pendant quatre ans ! J’avais une femme pour qui j’ai volé, il me torture avec cette femme ; j’avais un enfant pour qui j’ai volé, il me torture avec cet enfant ; je n’ai pas assez de pain, un ami m’en donne, il m’ôte mon ami et mon pain Je redemande mon ami, il me met au cachot Je lui dis vous, lui mouchard, il me dit tu Je lui dis que je souffre, il me dit que je l’ennuie Alors que voulez-vous que je fasse ? Je le tue C’est bien, je suis un monstre, j’ai tué cet homme, je n’ai pas été provoqué, vous me coupez la tête Faites Mouvement sublime, selon nous, qui faisait tout coup surgir, au-dessus du système de la provocation matérielle, sur lequel s’appuie l’échelle mal proportionnée des circonstances atténuantes, toute une théorie de la provocation morale oubliée par la loi Les débats fermés, le président fit son résumé impartial et lumineux Il en résulta ceci Une vilaine vie Un monstre en effet Claude Gueux avait commencé par vivre en concubinage avec une fille publique, puis il avait volé, puis il avait tué Tout cela était vrai Au moment d’envoyer les jurés dans leur chambre, le président demanda l’accusé s’il avait quelque chose dire sur la position des questions – Peu de chose, dit Claude Voici, pourtant Je suis un voleur et un assassin ; j’ai volé et tué Mais pourquoi ai-je volé ? pourquoi ai-je tué ? Posez ces deux questions côté des autres, messieurs les jurés Après un quart d’heure de délibération, sur la déclaration des douze champenois qu’on appelait messieurs les jurés, Claude Gueux fut condamné mort Il est certain que, dès l’ouverture des débats, plusieurs d’entre eux avaient remarqué que l’accusé s’appelait Gueux, ce qui leur avait fait une impression profonde On lut son arrêt Claude, qui se contenta de dire : – C’est bien Mais pourquoi cet homme a-t-il volé ? Pourquoi cet homme a-t-il tué ? Voilà deux questions auxquelles ils ne répondent pas Rentré dans la prison, il soupa gaiement et dit : – Trente-six ans de faits ! Il ne voulut pas se pourvoir en cassation Une des sœurs qui l’avaient soigné vint l’en prier avec larmes Il se pourvut par complaisance pour elle Il part qu’il résista jusqu’au dernier instant, car, au moment où il signa son pourvoi sur le registre du greffe, le délai légal des trois jours était expiré depuis quelques minutes 18 La pauvre fille reconnaissante lui donna cinq francs Il prit l’argent et la remercia Pendant que son pourvoi pendait, des offres d’évasion lui furent faites par les prisonniers de Troyes, qui s’y dévouaient tous Il refusa Les détenus jetèrent successivement dans son cachot, par le soupirail, un clou, un morceau de fil de fer et une anse de seau Chacun de ces trois outils eût suffi, un homme aussi intelligent que l’était Claude, pour limer ses fers Il remit l’anse, le fil de fer et le clou au guichetier Le juin 1832, sept mois et quatre jours après le fait, l’expiation arriva, pede claudo, comme on voit Ce jour-là, sept heures du matin, le greffier du tribunal entra dans le cachot de Claude, et lui annonỗa quil navait plus qu’une heure vivre Son pourvoi était rejeté – Allons, dit Claude froidement, j’ai bien dormi cette nuit, sans me douter que je dormirais encore mieux la prochaine Il part que les paroles des hommes forts doivent toujours recevoir de l’approche de la mort une certaine grandeur Le prêtre arriva, puis le bourreau Il fut humble avec le prêtre, doux avec l’autre Il ne refusa ni son âme, ni son corps Il conserva une liberté d’esprit parfaite Pendant qu’on lui coupait les cheveux, quelqu’un parla, dans un coin du cachot, du cholộra qui menaỗait Troyes en ce moment Quant moi, dit Claude avec un sourire, je n’ai pas peur du choléra Il écoutait d’ailleurs le prêtre avec une attention extrême, en s’accusant beaucoup et en regrettant de n’avoir pas été instruit dans la religion Sur sa demande, on lui avait rendu les ciseaux avec lesquels il s’était frappé Il y manquait une lame, qui s’était brisée dans sa poitrine Il pria le geôlier de faire porter de sa part ces ciseaux Albin Il dit aussi qu’il désirait qu’on ajoutât ce legs la ration de pain qu’il aurait dû manger ce jour-là Il pria ceux qui lui lièrent les mains de mettre dans sa main droite la pièce de cinq francs que lui avait donnée la sœur, la seule chose qui lui restât désormais À huit heures moins un quart, il sortit de la prison, avec tout le lugubre cortège ordinaire des condamnés Il était pied, pâle, l’œil fixé sur le crucifix du prêtre, mais marchant d’un pas ferme On avait choisi ce jour-là pour l’exécution, parce que c’était jour de marché, afin qu’il y eût le plus de regards possible sur son passage ; car il part qu’il y a encore en France des bourgades demi sauvages où, quand la société tue un homme, elle s’en vante 19 Il monta sur l’échafaud gravement, l’œil toujours fixé sur le gibet du Christ Il voulut embrasser le prêtre, puis le bourreau, remerciant l’un, pardonnant l’autre Le bourreau le repoussa doucement, dit une relation Au moment où l’aide le liait sur la hideuse mécanique, il fit signe au prêtre de prendre la pièce de cinq francs qu’il avait dans sa main droite, et lui dit : – Pour les pauvres Comme huit heures sonnaient en ce moment, le bruit du beffroi de l’horloge couvrit sa voix, et le confesseur lui répondit qu’il n’entendait pas Claude attendit l’intervalle de deux coups et répéta avec douceur : – Pour les pauvres Le huitième coup n’était pas encore sonné que cette noble et intelligente tête était tombée Admirable effet des exécutions publiques ! ce jour-là même, la machine étant encore debout au milieu d’eux et pas lavée, les gens du marché s’ameutèrent pour une question de tarif et faillirent massacrer un employé de l’octroi Le doux peuple que vous font ces lois-là ! Nous avons cru devoir raconter en détail l’histoire de Claude Gueux, parce que, selon nous, tous les paragraphes de cette histoire pourraient servir de têtes de chapitre au livre où serait résolu le grand problème du peuple au dix-neuvième siècle Dans cette vie importante il y a deux phases principales : avant la chute, après la chute ; et, sous ces deux phases, deux questions : question de l’éducation, question de la pénalité ; et, entre ces deux questions, la société tout entière Cet homme, certes, était bien né, bien organisé, bien doué Que lui a-til donc manqué ? Réfléchissez C’est le grand problème de proportion dont la solution, encore trouver, donnera l’équilibre universel : Que la société fasse toujours pour l’individu autant que la nature Voyez Claude Gueux Cerveau bien fait, cœur bien fait, sans nul doute Mais le sort le met dans une société si mal faite, qu’il finit par voler ; la société le met dans une prison si mal faite, qu’il finit par tuer Qui est réellement coupable ? Est-ce lui ? Est-ce nous ? Questions sévères, questions poignantes, qui sollicitent cette heure toutes les intelligences, qui nous tirent tous tant que nous sommes par le pan de notre habit, et qui nous barreront un jour si complètement le 20 chemin, qu’il faudra bien les regarder en face et savoir ce qu’elles nous veulent Celui qui écrit ces lignes essaiera de dire bientụt peut-ờtre de quelle faỗon il les comprend Quand on est en présence de pareils faits, quand on songe la manière dont ces questions nous pressent, on se demande quoi pensent ceux qui gouvernent, s’ils ne pensent pas cela Les Chambres, tous les ans, sont gravement occupées Il est sans doute très important de désenfler les sinécures et d’écheniller le budget ; il est très important de faire des lois pour que j’aille, déguisé en soldat, monter patriotiquement la garde la porte de M le comte de Lobau, que je ne connais pas et que je ne veux pas conntre, ou pour me contraindre parader au carré Marigny, sous le bon plaisir de mon épicier, dont on a fait mon officier3 Il est important, députés ou ministres, de fatiguer et de tirailler toutes les choses et toutes les idées de ce pays dans des discussions pleines d’avortements ; il est essentiel, par exemple, de mettre sur la sellette et d’interroger et de questionner grands cris, et sans savoir ce qu’on dit, l’art du dix-neuvième siècle, ce grand et sévère accusé qui ne daigne pas répondre et qui fait bien ; il est expédient de passer son temps, gouvernants et législateurs, en conférences classiques qui font hausser les épaules aux mtres d’école de la banlieue ; il est utile de déclarer que c’est le drame moderne qui a inventé l’inceste, l’adultère, le parricide, l’infanticide et l’empoisonnement, et de prouver par qu’on ne connt ni Phèdre, ni Jocaste, ni Œdipe, ni Médée, ni Rodogune ; il est indispensable que les orateurs politiques de ce pays ferraillent, trois grands jours durant, propos du budget, pour Corneille et Racine, contre on ne sait qui, et profitent de cette occasion littéraire pour s’enfoncer les uns les autres qui mieux mieux dans la gorge de grandes fautes de franỗais jusqu la garde Tout cela est important ; nous croyons cependant qu’il pourrait y avoir des choses plus importantes encore Que dirait la Chambre, au milieu des futiles démêlés qui font si souvent colleter le ministère par l’opposition et l’opposition par le ministère, si, tout coup, des bancs de la Chambre ou de la tribune publique, qu’importe ? quelqu’un se levait et disait ces sérieuses paroles : 3.Il va sans dire que nous n’entendons pas attaquer ici la patrouille urbaine, chose utile, qui garde la rue, le seuil et le foyer ; mais seulement la parade, le pompon, la gloriole et le tapage militaire, choses ridicules, qui ne servent qu’à faire du bourgeois une parodie du soldat 21 – Taisez-vous, qui que vous soyez, vous qui parlez ici, taisez-vous ! vous croyez être dans la question, vous n’y êtes pas La question, la voici La justice vient, il y a un an peine, de déchiqueter un homme Pamiers avec un eustache ; Dijon, elle vient d’arracher la tête une femme ; Paris, elle fait, barrière Saint-Jacques, des exécutions inédites Ceci est la question Occupez-vous de ceci Vous vous querellerez après pour savoir si les boutons de la garde nationale doivent être blancs ou jaunes, et si l’assurance est une plus belle chose que la certitude Messieurs des centres, messieurs des extrémités, le gros du peuple souffre ! Que vous l’appeliez république ou que vous l’appeliez monarchie, le peuple souffre, ceci est un fait Le peuple a faim, le peuple a froid La misère le pousse au crime ou au vice, selon le sexe Ayez pitié du peuple, qui le bagne prend ses fils, et le lupanar ses filles Vous avez trop de forỗats, vous avez trop de prostituộes Que prouvent ces deux ulcères ? Que le corps social a un vice dans le sang Vous voilà réunis en consultation au chevet du malade ; occupez-vous de la maladie Cette maladie, vous la traitez mal Étudiez-là mieux Les lois que vous faites, quand vous en faites, ne sont que des palliatifs et des expédients Une moitié de vos codes est routine, l’autre moitié empirisme La flétrissure était une cautérisation qui gangrenait la plaie ; peine insensée que celle qui pour la vie scellait et rivait le crime sur le criminel ! qui en faisait deux amis, deux compagnons, deux inséparables ! Le bagne est un vésicatoire absurde qui laisse résorber, non sans l’avoir rendu pire encore, presque tout le mauvais sang qu’il extrait La peine de mort est une amputation barbare Or, flétrissure, bagne, peine de mort, trois choses qui se tiennent Vous avez supprimé la flétrissure ; si vous êtes logiques, supprimez le reste Le fer rouge, le boulet et le couperet, c’étaient les trois parties d’un syllogisme Vous avez ôté le fer rouge ; le boulet et le couperet n’ont plus de sens Farinace était atroce ; mais il n’était pas absurde Démontez-moi cette vieille échelle boiteuse des crimes et des peines, et refaites-la Refaites votre pénalité, refaites vos codes, refaites vos prisons, refaites vos juges Remettez les lois au pas des mœurs 22 Messieurs, il se coupe trop de têtes par an en France Puisque vous êtes en train de faire des économies, faites-en là-dessus Puisque vous êtes en verve de suppressions, supprimez le bourreau Avec la solde de vos quatrevingts bourreaux, vous payerez six cents mtres d’école Songez au gros du peuple Des écoles pour les enfants, des ateliers pour les hommes Savez-vous que la France est un des pays de l’Europe où il y a le moins de natifs qui sachent lire ! Quoi ! la Suisse sait lire, la Belgique sait lire, le Danemark sait lire, la Grèce sait lire, l’Irlande sait lire, et la France ne sait pas lire ? c’est une honte Allez dans les bagnes Appelez autour de vous toute la chiourme Examinez un un tous ces damnés de la loi humaine Calculez l’inclinaison de tous ces profils, tâtez tous ces crânes Chacun de ces hommes tombés a au-dessous de lui son type bestial ; il semble que chacun d’eux soit le point d’intersection de telle ou telle espèce animale avec l’humanité Voici le loup-cervier, voici le chat, voici le singe, voici le vautour, voici la hyène Or, de ces pauvres têtes mal conformées, le premier tort est la nature sans doute, le second l’éducation La nature a mal ébauché, l’éducation a mal retouché l’ébauche Tournez vos soins de ce côté Une bonne éducation au peuple Développez de votre mieux ces malheureuses têtes, afin que l’intelligence qui est dedans puisse grandir Les nations ont le crâne bien ou mal fait selon leurs institutions Rome et la Grèce avaient le front haut Ouvrez le plus que vous pourrez l’angle facial du peuple Quand la France saura lire, ne laissez pas sans direction cette intelligence que vous aurez développée Ce serait un autre désordre L’ignorance vaut encore mieux que la mauvaise science Non Souvenezvous qu’il y a un livre plus philosophique que Le Compère Mathieu, plus populaire que le Constitutionnel, plus éternel que la charte de 1830 ; c’est l’Écriture sainte Et ici un mot d’explication Quoi que vous fassiez, le sort de la grande foule, de la multitude, de la majorité, sera toujours relativement pauvre, et malheureux, et triste À elle le dur travail, les fardeaux pousser, les fardeaux trner, les fardeaux porter Examinez cette balance : toutes les jouissances dans le plateau du riche, toutes les misères dans le plateau du pauvre Les deux parts ne sont-elles pas inégales ? La balance ne doit-elle pas nécessairement pencher, et l’état avec elle ? 23 Et maintenant dans le lot du pauvre, dans le plateau des misères, jetez la certitude d’un avenir céleste, jetez l’aspiration au bonheur éternel, jetez le paradis, contre-poids magnifique ! Vous rétablissez l’équilibre La part du pauvre est aussi riche que la part du riche C’est ce que savait Jésus, qui en savait plus long que Voltaire Donnez au peuple qui travaille et qui souffre, donnez au peuple, pour qui ce monde-ci est mauvais, la croyance un meilleur monde fait pour lui Il sera tranquille, il sera patient La patience est faite d’espérance Donc ensemencez les villages d’évangiles Une bible par cabane Que chaque livre et chaque champ produisent eux deux un travailleur moral La tête de l’homme du peuple, voilà la question Cette tête est pleine de germes utiles Employez pour la faire mûrir et venir bien ce qu’il y a de plus lumineux et de mieux tempéré dans la vertu Tel a assassiné sur les grandes routes qui, mieux dirigé, eût été le plus excellent serviteur de la cité Cette tête de l’homme du peuple, cultivez-la, défrichez-la, arrosez-la, fécondez-la, éclairez-la, moralisez-la, utilisez-la ; vous n’aurez pas besoin de la couper 24 À propos de cette édition électronique Texte libre de droits Corrections, édition, conversion informatique et publication par le groupe : Ebooks libres et gratuits http://fr.groups.yahoo.com/group/ebooksgratuits Adresse du site web du groupe : http://www.ebooksgratuits.com/ — Octobre 2007 — – Élaboration de ce livre électronique : Les membres de Ebooks libres et gratuits qui ont participé l’élaboration de ce livre, sont : Jean-Marc, Coolmicro et Fred – Dispositions : Les livres que nous mettons votre disposition, sont des textes libres de droits, que vous pouvez utiliser librement, une fin non commerciale et non professionnelle Tout lien vers notre site est bienvenu… – Qualité : Les textes sont livrés tels quels sans garantie de leur intégrité parfaite par rapport l'original Nous rappelons que c'est un travail d'amateurs non rétribués et que nous essayons de promouvoir la culture littéraire avec de maigres moyens Votre aide est la bienvenue ! VOUS POUVEZ NOUS AIDER À FAIRE CONNTRE CES CLASSIQUES LITTÉRAIRES 25 Vous avez aimé ce livre ? Nos utilisateurs ont aussi téléchargé Victor Hugo Le Dernier Jour d'un condamné À la prison de Bicêtre, un condamné mort note heure par heure les événements d'une journée dont il apprend qu'elle sera la dernière Il rappelle les circonstances de la sentence, puis de son emprisonnement et la raison qui le fait écrire, jusqu'au moment où il lui sera physiquement impossible de continuer Décrivant sa cellule, détaillant la progression de la journée, évoquant d'horribles souvenirs comme le ferrement des forỗats, la complainte argotique d'une jeune fille, des rờves, il en arrive au transfert la Conciergerie Hugo ne donne pas son nom, ne dit presque rien sur son passé, ni pourquoi cet homme est emprisonné Peu importe ! Ce texte est un plaidoyer contre la peine de mort, contre toutes les peines de mort, il n'a pour objet que cette mort qui appart dans toute son horreur inoụe et impensable, dans son inhumanité intrinsèque Ce condamné «anonyme», n'est personne, et donc tout le monde, et nous vivons sa peur et son Enfer Victor Hugo Quatrevingt-treize Initialement prévu pour une trilogie qui aurait compris, outre L'homme qui rit, roman consacré l'aristocratie, un volume sur la monarchie, Quatrevingt-Treize, écrit Guernesey de décembre 1872 juin 1873, après l'échec de Hugo aux élections de janvier 1872, achève la réflexion de l'écrivain sur la Révolution la lumière de la Commune et tente de répondre ces questions: quelles conditions une révolution peut-elle créer un nouvel ordre des choses? 1793 était-il, est-il toujours nécessaire? Le roman valut son auteur la haine des conservateurs En mai 1793, le marquis de Lantenac, âme de l'insurrection vendéenne, arrive en Bretagne sur la Claymore, une corvette anglaise À bord, il n'a pas hésité décorer puis faire exécuter un matelot qui n'avait pas arrimé assez solidement un canon La consigne du marquis est claire: il faut tout mettre feu et sang D'horribles combats s'ensuivent Lantenac massacre des Bleus et capture trois enfants Victor Hugo 26 Le Roi s'amuse Qui mieux que Victor Hugo pouvait présenter une de ses plus belles pièces: «La pièce est immorale? croyez-vous? Est-ce par le fond? Voici le fond Triboulet est difforme, Triboulet est malade, Triboulet est bouffon de cour - triple misère qui le rend méchant Triboulet hait le roi parce qu'il est le roi, les seigneurs parce qu'ils sont les seigneurs, les hommes parce qu'ils n'ont pas tous une bosse sur le dos Son seul passe-temps est d'entre-heurter sans relâche les seigneurs contre le roi, brisant le plus faible au plus fort Il déprave le roi, il le corrompt, il l'abrutit - il le pousse la tyrannie, l'ignorance, au vice - il le lâche travers toutes les familles des gentilshommes, lui montrant sans cesse du doigt la femme séduire, la soeur enlever, la fille déshonorer Le roi dans les mains de Triboulet n'est qu'un pantin tout-puissant qui brise toutes les existences au milieu desquelles le bouffon le fait jouer Un jour, au milieu d'une fête, au moment même où Triboulet pousse le roi enlever la femme de monsieur de Cossé, monsieur de Saint-Vallier pénètre jusqu'au roi et lui reproche hautement le déshonneur de Diane de Poitiers Ce père auquel le roi a pris sa fille, Triboulet le raille et l'insulte Le père lève le bras et maudit Triboulet De ceci découle toute la pièce Le sujet véritable du drame, c'est la malédiction de monsieur de Saint-Vallier Écoutez Vous êtes au second acte Cette malédiction, sur qui est-elle tombée? Sur Triboulet fou du roi? Non Sur Triboulet qui est homme, qui est père, qui a un coeur, qui a une fille Triboulet a une fille, tout est Triboulet n'a que sa fille au monde - il la cache tous les yeux, dans un quartier désert, dans une maison solitaire Plus il fait circuler dans la ville la contagion de la débauche et du vice, plus il tient sa fille isolée et murée Il élève son enfant dans l'innocence, dans la foi et dans la pudeur Sa plus grande crainte est qu'elle ne tombe dans le mal, car il sait, lui méchant, tout ce qu'on y souffre Eh bien ! la malédiction du vieillard atteindra Triboulet dans la seule chose qu'il aime au monde, dans sa fille Ce même roi que Triboulet pousse au rapt, ravira sa fille, Triboulet » La présentation ci-dessus est extraite d'un texte que Victor hugo écrivit en défense de sa pièce qui fut interdite dès le soir de la première représentation, la monarchie de Juillet ne tolérant pas plus qu'une autre, et malgré la révolution de 1830, qu'on représente un 27 roi dominé par la luxure Quelques années plus tard, Verdi composera Rigoletto, sur un livret fidèlement adapté de cette pièce, et son opéra conntra le même sort Victor Hugo Notre-Dame de Paris - 1482 Le janvier 1482, jour de la fête des Fous, on donne dans la grande salle du Palais de Justice de Paris un mystère du poète Gringoire, alors que sur le parvis de Notre-Dame danse la bohémienne Esmeralda Quasimodo, le sonneur disgracieux de la cathédrale, essaie de l'enlever sur l'ordre de l'archidiacre Claude Frollo Le capitaine Phoebus de Châteaupers la sauve Esmeralda, elle, sauve en l'épousant Gringoire, prisonnier des truands alors qu'il s'était égaré dans la cour des Miracles Le hideux Quasimodo vit au milieu de ses cloches Mis au pilori pour avoir attaqué Esmeralda, il en tombe amoureux quand elle vient lui offrir boire Victor Hugo L'idylle rue Plumet et l'épopée rue Saint-Denis En 1832, Jean Valjean habite, avec Cosette, rue Plumet, Thénardier est en prison, sa fille Éponine, amoureuse de Marius, aide pourtant le jeune homme retrouver la trace d'une jeune fille rencontrée au Luxembourg Il s'agit de Cosette Victor Hugo Jean Valjean Soulevé, le peuple de Paris est symbolisé par les combattants de la barricade Jean Valjean s'est vu confier la garde de l'inspecteur Javert, arrêté par les insurgés Il feint de l'exécuter mais le libère, puis sauve Marius blessé en passant par les égouts Victor Hugo Les Contemplations Les 11 000 vers des Contemplations furent écrits dès 1834, mais surtout pendant l'exil Jersey, puis Guernesey, en particulier partir de 1853 alors que Hugo composait les Châtiments Mettant fin au silence lyrique qu'il observait depuis les Rayons et les Ombres (1840), le recueil, sommet de sa production poétique, somme de sa vie, de sa sensibilité et de sa pensée, se présente comme «les Mémoires d'une âme» (Préface) Si «une destinée est écrite jour jour», le recueil s'érige aussi en expression d'une expérience, celle d'un homme qui se veut comme les autres : «Quand je vous parle de moi, je vous parle de vous.» Victor Hugo 28 Marius Apparaissent deux nouveaux personnages : Gavroche, fils de Thénardier, qui incarne le gamin de Paris, et Marius Pontmercy, fils du colonel de Waterloo Marius rejoint un groupe d'étudiants républicains Victor Hugo Les Burgraves Château de Heppenheff, Burg du Rhin Il y a 70 ans, les deux fils, l'un naturel et l'autre légitime, de l'empereur d'Allemagne (dont ils ignorent l'identité) aiment la même femme Le fils naturel, Fosco, assassine Donato, son frère, pour l'amour de Ginevra et il vend cette dernière comme esclave pour lui avoir préféré son frère 70 ans plus tard, le nonagénaire burgrave Job, bouleversé par l'enlèvement, 20 ans auparavant, de son plus jeune fils encore tout enfant, a été évincé, avec son fils Magnus, par leurs descendants dégénérés et avilis Ceux-ci commettent les pires exactions et terrorisent la région entre deux orgies Régina, fragile, aimante, se consumant d'un mal inexpliqué, est promise au brutal petit-fils de Job, mais elle aime Otbert, noble, vaillant et loyal et qui le lui rend bien Ils sont l'unique compagnie de Job et son unique source de réconfort Guanhumara, une vieille esclave mystérieuse, promet Otbert de sauver Régina l'aide d'une potion miracle en échange de l'assassinat d'un inconnu qui, dit-elle, le mérite bien Otbert s'engage frapper la victime inconnue sur l'ordre de Guanhumara et tout semble aller pour le mieux pour les tourtereaux, qui obtiennent la bénédiction de Job leur union Or le Burg abrite un énigmatique visiteur, vieillard chenu, accueilli, contre l'avis des jeunes générations, par Job et Magnus Victor Hugo Cosette À la bataille de Waterloo, Thénardier avait détroussé le colonel baron Pontmercy, tout en lui portant secours Nous sommes en 1823 Jean Valjean a été repris et renvoyé au bagne Il s'évade de nouveau, on le croit noyé Ayant caché sa fortune près de l'auberge des Thénardier, il délivre Cosette de cet enfer 29 www.feedbooks.com Food for the mind 30 ... t’appelles-tu ? dit Claude Gueux – Albin – Pourquoi es-tu ici ? reprit Claude – J’ai volé – Et moi aussi, dit Claude Ils partagèrent en effet de la sorte tous les jours Claude Gueux avait trente-six... serviteur de la cité Cette tête de l’homme du peuple, cultivez-la, défrichez-la, arrosez-la, fécondez-la, éclairez-la, moralisez-la, utilisez-la ; vous n’aurez pas besoin de la couper 24 À propos de... désormais liée toutes les réimpressions de Claude Gueux « Dunkerque, le 30 juillet 1834 « Monsieur le directeur de la Revue de Paris, « Claude Gueux, de Victor Hugo, par vous inséré dans votre livraison

Ngày đăng: 30/03/2014, 14:20

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